Dictionnaire pratique du droit humanitaire

« Mal nommer les choses c’est ajouter au malheur du monde. » Albert Camus.

Réquisition

Il s’agit d’une mesure par laquelle un belligérant ou un représentant de l’État s’assure de la jouissance temporaire ou définitive de certains biens (meubles ou immeubles) ou de la prestation de certains services. La réquisition se fait en principe moyennant indemnité.

  • Le droit humanitaire réglemente de nombreux cas de réquisitions, particulièrement dans les territoires occupés. Les réquisitions doivent être proportionnées aux ressources du pays pour ne pas porter atteinte aux biens essentiels à la survie de la population. Elles ne peuvent pas viser à obliger des personnes à participer aux opérations militaires contre leur pays (GPI art. 63 ; GIV art. 51 et 55).
  • Des règles précises limitent la réquisition des installations, du personnel, du matériel et des moyens de transport sanitaires. Elles sont contenues de façon fragmentée dans les Conventions de Genève (GI art. 33, 34, 35 ; GIV art. 57 ; GPI art. 14) :
  • la puissance occupante ne pourra réquisitionner les hôpitaux civils que temporairement et qu’en cas de nécessité urgente, pour soigner des blessés et des malades militaires, et à condition que les mesures appropriées soient prises en temps utile pour assurer les soins et le traitement des personnes hospitalisées et répondre aux besoins de la population civile. Le matériel et les dépôts des hôpitaux civils ne pourront pas être réquisitionnés tant qu’ils seront nécessaires aux besoins de la population civile (GIV art. 57) ;
  • les biens mobiliers et immobiliers des sociétés de secours […] seront considérés comme propriété privée. Le droit de réquisition reconnu aux belligérants par le droit de la guerre ne s’exercera qu’en cas de nécessité urgente et une fois le sort des blessés et des malades assuré (GI art. 34) ;
  • des règles de protection s’appliquent également aux bâtiments et au matériel sanitaires des forces armées. Ils ne pourront jamais être détournés de leur emploi tant qu’ils seront nécessaires aux malades et aux blessés et ne pourront pas être intentionnellement détruits (GI art. 33). Les transports de blessés et malades ou de matériel sanitaire seront respectés et protégés. Lorsque ces transports ou véhicules tomberont aux mains de la partie adverse, ils seront soumis aux lois de la guerre, à la condition que la partie au conflit qui les aura capturés se charge dans tous les cas des blessés et des malades qu’ils contiennent (GI art. 35).
  • Concernant les territoires occupés, le premier Protocole de 1977 (GPI art. 14) fournit une rédaction détaillée des mesures relatives aux réquisitions sanitaires. Ce texte peut servir de référence dans les autres situations. Il unifie et clarifie ces règles en les appliquant de façon uniforme aux hôpitaux, mais aussi aux formations sanitaires provisoires et ambulantes, et en incluant le personnel sanitaire, le matériel sanitaire et les moyens de transport sanitaire dans l’interdiction de réquisition :

« 1. La puissance occupante a le devoir d’assurer que les besoins médicaux de la population civile continuent d’être satisfaits dans les territoires occupés.

  1. En conséquence, la puissance occupante ne peut réquisitionner les unités sanitaires civiles, leur équipement, leur matériel ou leur personnel, aussi longtemps que ces moyens sont nécessaires pour satisfaire les besoins médicaux de la population civile et pour assurer la continuité des soins aux blessés et malades déjà sous traitement.
  2. La puissance occupante peut réquisitionner les moyens mentionnés ci-dessus à condition de continuer à observer les règles générales établies aux points 1 et 2 précédents et sous réserve des conditions particulières suivantes :
  3. que les moyens soient nécessaires pour assurer un traitement médical immédiat et approprié aux blessés et malades des forces armées de la puissance occupante et aux prisonniers de guerre ;
  4. que la réquisition n’excède pas la période ou cette nécessité existe ; et
  5. que des dispositions immédiates soient prises pour que les besoins médicaux de la population civile, ainsi que ceux des blessés et malades sous traitements affectés par la réquisition, continuent d’être satisfaits. »

Services sanitairesMission médicalePersonnel sanitaireTerritoire occupéPillage

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