Peine de mort
La peine de mort est admise par le droit international si elle est prévue par le droit pénal d’un État pour sanctionner les crimes les plus graves. La peine de mort doit résulter d’une décision de justice rendue par un tribunal régulièrement constitué et conformément aux règles du procès équitable (art. 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques).
- Il ne faut pas confondre peine de mort et exécution sommaire ou extrajudiciaire. L’exécution sommaire ou extrajudiciaire consiste à priver arbitrairement une personne de sa vie, en l’absence de tout jugement d’un tribunal compétent et indépendant ou de tout recours. Elle est strictement interdite par le droit international, en période de paix comme en situation de conflit.
- Un rapporteur spécial du Conseil des droits de l’homme de l’ONU (anciennement la Commission) est chargé de suivre la question des exécutions sommaires et extrajudiciaires. Depuis 2010 il s’agit de M. Christof Heyns (Afrique du Sud).
Le droit humanitaire limite l’usage qui peut être fait de la peine de mort contre certaines catégories de personnes.
• Les personnes âgées de moins de dix-huit ans, les femmes enceintes et les mères d’enfants en bas âge.
Dans les conflits armés non internationaux, l’article 6.4 du Protocole additionnel II de 1977 inclut, parmi les garanties judiciaires, certaines limitations à l’usage de la peine de mort à leur encontre : « La peine de mort ne sera pas prononcée contre lespersonnes âgées de moins de dix-huit ans au moment de l’infraction et elle ne sera pas exécutée contre les femmes enceintes et les mères d’enfants en bas âge. »
• La population civile des territoires occupés
Les garanties judiciaires prévues au profit de la population civile concernent également l’usage de la peine de mort :
- l’application de la peine de mort est strictement limitée aux actes d’espionnage ou aux actes de sabotage graves des installations militaires de la puissance occupante ou aux infractions intentionnelles qui ont causé la mort d’une ou plusieurs personnes et à condition que la législation du territoire ait déjà prévu la peine de mort dans de tels actes, avant le début de l’occupation ;
- dans tous les cas, la peine de mort ne devra pas être prononcée sans que la cour ait pris en compte le fait que la personne accusée n’est pas un ressortissant de la puissance occupante et qu’elle n’est donc liée par aucun devoir de fidélité ;
- en aucun cas la peine de mort ne sera prononcée contre une personne protégée âgée de moins de dix-huit ans au moment de l’infraction (GIV art. 68) ;
- les personnes condamnées à mort auront toujours le droit de recourir en grâce ;
- aucune condamnation à mort ne sera exécutée avant l’expiration d’un délai d’au moins six mois à partir du moment où la puissance protectrice (le CICR) aura reçu la communication du jugement définitif (GIV art. 75).
• Les prisonniers de guerre
- Les prisonniers de guerre et les puissances protectrices devront être informés le plus vite possible des infractions passibles de la peine de mort selon le droit pénal en vigueur sur le territoire de la puissance détentrice ;
- avant de prononcer la peine de mort, le tribunal devra considérer le fait que le prisonnier n’est pas un ressortissant de la puissance détentrice et ne lui est lié par aucun devoir de fidélité […] (GIII art. 100) ;
- si la peine de mort est prononcée contre un prisonnier de guerre, la peine ne pourra pas être exécutée avant l’expiration d’un délai d’au moins six mois à partir du moment où la notification de cette décision aura été faite à la puissance protectrice (le CICR) (GIII art. 101).
Plusieurs conventions internationales relatives aux droits de l’homme proposent de façon facultative aux États qui le désirent de renoncer à la peine de mort en tant que sanction pénale :
- le deuxième Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, adopté sous l’égide de l’ONU en 1989 et entré en vigueur en 1991 (86 États parties en juin 2015) ;
- le Protocole 6 à la Convention européenne des droits de l’homme concernant l’abolition de la peine de mort, adopté par le Conseil de l’Europe en 1983 et entré en vigueur en 1985 (46 États parties). Ce traité permet toutefois de maintenir la peine de mort pour des actes commis en situation de guerre ou de danger imminent de guerre ;
- le Protocole 13 à la Convention européenne des droits de l’homme relatif à l’abolition de la peine de mort en toutes circonstances, adopté par le Conseil de l’Europe en 2002 et entré en vigueur en 2003 (44 États parties) ;
- le Protocole à la Convention américaine des droits de l’homme traitant de l’abolition de la peine de mort, adopté sous l’égide de l’OEA en 1990 et entré en vigueur en 1991 (12 États parties).
Ces protocoles et les restrictions posées au recours à la peine de mort dans de nombreux traités et déclarations sur les droits de l’homme reflètent la tendance générale du droit international à encourager les États à abolir la peine de mort.
L’adhésion à l’Union européenne est soumise à la condition de supprimer la peine de mort en droit et en pratique. La Convention américaine sur les droits de l’homme demande également que la peine de mort ne soit pas rétablie dans les États qui l’ont abolie (art. 4.3).
Aucun des deux tribunaux pénaux internationaux constitués, en 1993 et 1994, pour juger les auteurs des crimes commis en ex-Yougoslavie et au Rwanda, ni le statut de la Cour pénale internationale, adopté le 17 juillet 1998, ne prévoient la possibilité de prononcer la peine de mort.
La Sous-commission des droits de l’homme de l’ONU (aujourd’hui le Comité consultatif du Conseil des droits de l’homme) a demandé l’abolition de la peine de mort pour les délinquants âgés de moins de 18 ans au moment de leur crime, dans une résolution du 24 août 1999. Elle a également demandé aux États qui maintiennent la peine capitale dans leur législation d’appliquer un moratoire sur les exécutions durant l’année 2000.
En 2007 et 2010, l’Assemblée générale de l’ONU a appelé à un moratoire mondial sur la peine de mort (résolution 62/149 et 65/206). Depuis lors, la peine de mort a été abolie par un certain nombre de pays, dont l’Albanie, l’Argentine, le Burundi, le Gabon, le Kirghizistan, la Lettonie, l’Ouzbékistan, le Rwanda, le Togo et le Turkménistan ( source : Amnesty International).
Liste des pays où la peine de mort n’est pas abolie en droit mais qui peuvent être considérés comme abolitionnistes en pratique car ils n’ont procédé à aucune exécution judiciaire depuis au moins dix ans et ont mis en place des moratoires sur la peine de mort ( source : Amnesty International) : Cameroun, Corée du Sud, Érythrée, Ghana, Laos, Liberia, Malawi, Mongolie, Sierra Leone, Swaziland, Tadjikistan, Tanzanie, Zambie.
Liste des principaux États dans lesquels la peine de mort est maintenue en droit et en pratique : Afghanistan, Antigua-et-Barbuda, Arabie Saoudite, Autorité palestinienne, Bahamas, Bahreïn, Bangladesh, Barbade, Belize, Biélorussie (Bélarus), Botswana, Chine, Comores, Corée du Nord, Cuba, Dominique, Égypte, Émirats arabes unis, États-Unis, Éthiopie, Guatemala, Guinée, Guinée équatoriale, Guyana, Inde, Indonésie, Irak, Iran, Jamaïque, Japon, Jordanie, Kazakhstan (la peine de mort pour les crimes de droit commun a été abolie dans ce pays), Koweït, Lesotho, Liban, Libye, Malaisie, Nigeria, Oman, Ouganda, Pakistan, Qatar, République démocratique du Congo, St. Kitts et Nevis, Sainte-Lucie, Saint-Vincent et les Grenadines, Singapour, Somalie, Soudan, Soudan du Sud, Syrie, Taiwan, Tchad, Thaïlande, Trinité-et-Tobago, Viêt-nam, Yémen, Zimbabwe.
Au total, l’ONU considère que, sur ses 193 pays membres, 140 ont aboli la peine de mort ou ont introduit un moratoire, en droit ou en pratique.
Consulter aussi
▸ Garanties judiciaires ▹ Femme ▹ Enfant ▹ Droits de l’homme ▹ Cour pénale internationale (CPI) ▹ Puissance protectrice ▹ Territoire occupé
Pour en savoir plus
Amnesty International , La Peine de mort , Paris, 1989.
Badinter R. , L’Abolition , Fayard poche, 2002, 286 p.
Cornu E., Parayre S., « Le protocole n° 13 à la Convention européenne des droits de l’homme : l’abolition totale et définitive de la peine de mort en Europe ? », Actualité et droit international , avril 2003. Disponible sur [ http://www.ridi.org/adi ]
Manchesi A., « The death penalty in wartime », Revue internationale de droit pénal, 1996, n° 1-2, p. 319-331.