Dictionnaire pratique du droit humanitaire

« Mal nommer les choses c’est ajouter au malheur du monde. » Albert Camus.

Cour pénale internationale (CPI)

I. Contexte

Le statut de la Cour pénale internationale (CPI) a été adopté à Rome le 17 juillet 1998 à l’issue d’une conférence diplomatique internationale organisée sous l’égide de l’Organisation des Nations unies (ONU). Le Statut de Rome est entré en vigueur le 1er juillet 2002 après avoir été ratifié par 60 États. La Cour a son siège à La Haye, aux Pays-Bas, et a commencé à fonctionner en mars 2003, lorsque le procureur, les juges et le greffier ont été nommés.

En juin 2025, La CPI compte 125 Etats membres actifs ayant ratifié le Statut de Rome . Deux pays avaient notifié leur décision de se retirer mais l’ont révoquée par la suite : L’Afrique du Sud (notification faite le 19 octobre 2016 et révoquée le 7 mars 2017) et la Gambie (notification faite le 10 novembre 2016 et révoquée le 10 février 2017). Deux autres pays se sont effectivement retirés de la CPI : Le Burundi (retrait effectif en octobre 2017) et les Philippines (retrait effectif le 17 mars 2019).

La CPI est le premier tribunal pénal international permanent compétent pour juger les personnes accusées de génocide, de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de crime d’agression (article 5 du Statut de Rome). La CPI ne doit pas être confondue avec la Cour internationale de justice (CIJ), qui a été créée par la Charte des Nations unies en 1945 pour statuer sur les différends juridiques entre États et qui est également basée à La Haye.

L’idée de créer une cour pénale internationale permanente a été envisagée pour la première fois après les procès de Nuremberg tenus sous l’égide du Tribunal militaire international (TMI) créé après la Seconde Guerre mondiale en 1945, mais les États ne sont parvenus à se mettre d’accord qu’en 1998. Le statut de Rome a été adopté dans le but de combler le vide laissé depuis la Seconde Guerre mondiale dans la capacité de la communauté internationale à poursuivre et à punir les auteurs des crimes les plus graves. Il s’appuie sur l’expérience des deux tribunaux pénaux internationaux ad hoc créés par les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies (CSNU) pour poursuivre les crimes commis dans l’ex-Yougoslavie (TPIY) (opérationnel de 1993 à 2017) et au Rwanda (TPIR) (opérationnel de 1994 à 2015).

Contrairement aux juridictions du TPIY et du TPIR, la CPI n’a pas la primauté sur les juridictions pénales nationales, mais est plutôt complémentaire des poursuites nationales. La CPI ne peut engager des poursuites que si l’État en question « n’a pas la volonté ou est dans l’incapacité de mener véritablement à bien l’enquête ou les poursuites » (article 17 du Statut de Rome). Cela signifie que si une entité juridique nationale mène une telle procédure, la CPI ne peut agir que si elle peut prouver que la procédure n’est pas menée de bonne foi (section IV). L’objectif de cette approche est d’inciter les Etats à mener les poursuites devant leurs propres tribunaux chaque fois que cela est possible.

La compétence de la CPI à l’égard de ces crimes reste subordonnée à la condition du consentement de l’État par le biais d’un processus de ratification et de conditions spéciales en fonction de la nature du crime ( infra , section III).

Qu’il s’agisse de génocide, de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité, la Cour ne peut enquêter sur ces crimes que si l’État de nationalité de l’accusé ou l’État sur le territoire duquel le crime a été commis a accepté la compétence de la CPI (article 12 du Statut de Rome). L’absence de référence à l’État de nationalité de la victime ou à l’État où se trouve l’accusé a limité la capacité de la Cour à enquêter sur des situations de conflits armés non internationaux, puisque l’État de nationalité de l’accusé et l’État où le crime a été commis sont les mêmes.

En ce qui concerne le crime d’agression, la compétence théorique de la CPI est devenue effective le 17 juillet 2018 avec l’entrée en vigueur des amendements pertinents au Statut de Rome. Toutefois, la compétence de la CPI à l’égard du crime d’agression reste facultative pour les États parties et est soumise à des conditions restrictives qui diffèrent de celles applicables à la compétence de la Cour à l’égard d’autres crimes internationaux.

Le Conseil de sécurité des Nations unies a une grande autorité sur la compétence de la CPI. Il est le seul organe à pouvoir contourner l’exigence du consentement de l’État, puisqu’il peut imposer la compétence de la CPI à tout État, à condition qu’aucun de ses cinq membres permanents n’utilise son droit de véto pour bloquer la décision. Le CSNU peut également différer ou interdire l’ouverture ou la poursuite d’une enquête ou de poursuites pendant une période d’un an, qui peut être prolongée indéfiniment (article 16 du Statut de Rome). Les privilèges spéciaux accordés par le Statut de Rome au CSNU reflètent la nature hybride de la CPI en tant qu’organe judiciaire indépendant d’une part et en tant qu’instrument de gestion des conflits internationaux d’autre part. Cela a conduit à des situations inconfortables et déroutantes d’application sélective de la justice internationale. La politisation du renvoi initial d’une affaire peut être exacerbée par la dépendance du procureur à l’égard des preuves fournies par les États. Mais elle peut aussi être atténuée par les juges qui exigent le respect strict des procédures régulières et des normes élevées en matière de preuves dans les phases d’enquête et de poursuite, même si cela conduit à l’acquittement des suspects.

Malgré ces contraintes, la CPI représente un progrès dans la consolidation et la mise en œuvre du droit pénal international. Elle a déjà permis l’unification de la définition des crimes internationaux et le rapprochement des différents systèmes juridiques du monde entier concernant les normes d’enquête criminelle, de procès équitable et de procédure régulière. En favorisant la complémentarité entre la CPI et les tribunaux nationaux pour les crimes internationaux, elle a également renforcé l’application du principe de compétence universelle, qui permet aux tribunaux nationaux de poursuivre les auteurs de crimes de masse commis à l’étranger.

Le nombre de pays qui ont ratifié le statut de Rome a démenti les prévisions des pessimistes. Il montre que la CPI est considérée comme un instrument de protection pour les nombreux pays qui ne peuvent pas compter sur leur superpuissance militaire.

La structure et l’organisation de la CPI reflètent sa nature mixte, internationale et judiciaire (II). Les différents organes ont des rôles et des pouvoirs distincts dans l’exercice concret de la compétence de la CPI à l’égard des différents crimes et situations (III). La relation entre les États et la CPI est fondée sur la complémentarité (IV). La CPI accorde pour la première fois en droit pénal international un statut spécial aux victimes et aux témoins, y compris la reconnaissance du droit à réparation des victimes (V ). Les nombreuses situations et affaires examinées par la CPI (VI), illustrent les défis associés aux enquêtes et jugements. Malgré certains échecs et frustrations, ces jugements contribuent à l’émergence d’une jurisprudence internationale en matière de crimes de masse et sur l’interprétation pénale du Droit International Humanitaire applicable aux conflits armés. (Voir infra, Section VI Jurisprudence,).

II. Structure et organisation de la CPI

La CPI est composée de plusieurs organes principaux : (1) l’Assemblée des États Parties (AEP), (2) le Bureau du Procureur (BdP), (3) les sections et chambres judiciaires (appels, première instance et préliminaire), (4) le Greffe, et (5) la Présidence (art. 34 du Statut de Rome).

Le financement de la CPI (195,481 millions d’euros dans le budget proposé pour 2025) provient de contributions fixes versées par les États parties, de fonds fournis par l’ONU et de contributions volontaires de gouvernements, d’organisations internationales, de particuliers, d’entreprises et d’autres entités conformément à des critères spécifiques (articles 115 et 116 du Statut de Rome).

1. L’Assemblée des Etats parties (AEP)

La spécificité de la CPI se traduit par l’existence d’un organe supplémentaire au sein duquel chaque État partie dispose d’un représentant. Créée par l’article 112 du Statut de Rome, l’AEP joue un rôle important dans l’orientation et le soutien du fonctionnement de la Cour.

En particulier, c’est l’Assemblée, et non la Cour elle-même, qui est responsable de l’adoption de deux documents procéduraux clés : le Règlement de procédure et de preuve et les Éléments des crimes.

L’AEP est aussi l’organe chargé d’élire le procureur et les juges et d’approuver le budget. Elle est également chargée de superviser la présidence, le procureur et le greffe en ce qui concerne l’administration de la Cour, y compris son budget, et d’examiner toute question relative à la non-coopération des États.

2. Le Bureau du Procureur (BdP)

Depuis le 12 février 2021, le Procureur de la CPI est Karim A. A. Khan . Il a succédé à Fatou Bensouda de la Gambie. Le Bureau du Procureur est « chargé de recevoir les renvois et tous les renseignements étayés concernant les crimes relevant de la compétence de la Cour, de les examiner et de mener des enquêtes et des poursuites devant la Cour » (article 42 du Statut de Rome).

Le Procureur est élu à la majorité absolue des membres de l’AEP pour un mandat de neuf ans, non renouvelable. Il peut être assisté d’un ou plusieurs procureurs adjoints, qui sont élus de la même manière sur une liste de candidats fournie par le Procureur.

Le Procureur et le (ou les) substitut(s) sont totalement indépendants et doivent être de nationalités différentes. Ils doivent être des personnes de haute moralité, être très compétents et avoir une grande expérience des affaires pénales. Ils ne peuvent exercer aucune autre activité professionnelle pendant qu’ils exercent les fonctions de procureur ou de substitut de la CPI.

Le procureur peut nommer le personnel nécessaire à l’exercice de ses fonctions, y compris des conseillers et des enquêteurs.

Le Bureau du Procureur enquête sur des affaires ou des situations qui lui ont été déférées soit par un État partie (article 14 du Statut de Rome), soit par le Conseil de sécurité des Nations unies (article 13 du Statut de Rome). Dans certaines circonstances, le Procureur peut également ouvrir une enquête de sa propre initiative (proprio motu), sur la base de renseignements reçus de diverses sources, concernant des crimes relevant de la compétence de la Cour (art. 15 du Statut de Rome).

Dans ce cas, si le Procureur conclut qu’il existe une base raisonnable pour mener une enquête, il doit demander à la Chambre préliminaire l’autorisation d’ouvrir officiellement une affaire. Dans l’attente de la décision de la Chambre préliminaire, le Procureur ne peut, « à titre exceptionnel, demander à la Chambre préliminaire l’autorisation de prendre les mesures d’enquête nécessaires à la préservation des éléments de preuve » que s’il existe une possibilité d’obtenir des éléments de preuve importants ou s’il y a un risque que ces éléments de preuve ne soient pas disponibles ultérieurement (article 18 6 du Statut de Rome).

Le Procureur peut « demander des renseignements supplémentaires aux États, aux organes des Nations Unies, aux organisations intergouvernementales ou non gouvernementales, ou à d’autres sources dignes de foi qu’il juge appropriées, et recevoir des témoignages écrits ou oraux » (art. 15(2) du Statut de Rome). (Voir infra , Section III.1 et Section VI).

3. Les chambres et les juges

L’organe judiciaire de la CPI est composé de 18 juges, répartis dans les différentes Chambres (préliminaire, de première instance et d’appel). Les juges sont élus par l’AEP sur la liste des candidats présentés par les États parties (article 36 du Statut de Rome). Ils sont choisis parmi des personnes de haute moralité, impartiales et intègres, qui possèdent les qualifications requises dans leurs États respectifs pour être nommées aux plus hautes fonctions judiciaires. Ils doivent être compétents dans les domaines pertinents du droit international, tels que le droit international humanitaire ou les droits de l’homme, et avoir l’expérience nécessaire en matière de droit pénal et de procédure pénale.

Lors de la sélection des juges, les États parties doivent tenir compte de la nécessité d’une représentation des principaux systèmes juridiques du monde, d’une représentation géographique équitable et d’une représentation équitable des hommes et des femmes. Les juges sont nommés pour un mandat complet de neuf ans au maximum (sauf pour leur permettre de conclure un procès ou un appel qu’ils ont mené et pour lequel l’audience a déjà commencé pendant leur mandat), et ils ne peuvent pas être réélus. Ils ne peuvent exercer aucune autre activité professionnelle.

Les juges sont répartis en trois sections, dont les fonctions judiciaires sont exercées par trois chambres (art. 39 du Statut de Rome) :

-La Section des appels est composée du président et de quatre juges ; la Chambre des appels est composée de tous les juges de la Section.

-La Section de première instance est composée d’au moins six juges ; la Chambre de première instance est composée de trois des juges de cette Section.

-La Section préliminaire est composée d’au moins six juges ; la Chambre préliminaire est composée de trois juges ou d’un juge unique de cette section, conformément au règlement de procédure et de preuve.

Le Statut prévoit la possibilité de faire fonctionner simultanément plusieurs Chambres de première instance ou Chambres préliminaires lorsque la charge de travail de la Cour l’exige (art. 39 2 c du Statut de Rome).

4. Le Greffe

Le Greffe est l’organe administratif de la CPI. Il est responsable des aspects non judiciaires de l’administration et du service de la Cour (article 43 du Statut de Rome). Le greffier est élu à la majorité absolue des juges pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois. Il peut avoir un greffier adjoint, si nécessaire, qui est élu de la même manière. Le greffier exerce ses fonctions sous l’autorité du président de la Cour. Les responsabilités du greffier comprennent la mise en place d’une Unité d’aide aux victimes et aux témoins (art. 43(6) du Statut de Rome) qui est chargée d’assister les victimes et les témoins qui comparaissent devant la Cour et d’autres personnes qui courent un risque en raison des dépositions faites par ces témoins, à savoir leurs familles. L’Unité prévoit des mesures de protection, des dispositions de sécurité, des conseils et d’autres formes d’assistance appropriées.

5. La présidence

Trois juges sont élus à la majorité absolue des juges aux trois postes de président, de premier et de deuxième vice-président, pour un mandat de trois ans. Ils sont rééligibles une fois. La Présidence est responsable de la bonne administration de la Cour et de toute autre fonction qui lui est confiée conformément au Statut de Rome (art. 38).

III. Les compétences de la CPI

1. Exercice de la compétence

Le Statut de Rome prévoit que l’exercice de la compétence de la Cour peut être déclenché de trois manières différentes. Un État partie (article 14 du Statut de Rome) ou le Conseil de sécurité des Nations unies (article 13 du Statut de Rome) peut déférer une situation au Procureur. Le Procureur (art. 15 du Statut de Rome) peut également déclencher la compétence de la CPI proprio motu, c’est-à-dire de sa propre initiative, sous réserve du contrôle de la Chambre préliminaire. Toutefois, comme expliqué précédemment, si un État partie ou le Procureur renvoie une situation à la CPI, il existe une condition préalable à l’exercice de la compétence de la Cour : l’État de nationalité de l’accusé ou l’État où le crime a été commis doit être partie au Statut de Rome. Seule une saisine par le Conseil de sécurité des Nations unies permet de lever cette contrainte (art. 13 du Statut de Rome). Il est également possible pour un État qui n’est pas partie au Statut de Rome mais qui est soit l’État de nationalité de l’accusé, soit l’État où le crime a été commis, d’accepter la compétence de la CPI à l’égard d’une affaire, sur une base ad hoc, auquel cas l’État en question doit accepter de coopérer pleinement avec la Cour (art. 12 du Statut de Rome).

Toutefois, même lorsque la Cour est saisie d’une affaire, le CSNU a le droit de suspendre l’enquête ou les poursuites de la Cour pour une période de 12 mois. Cette suspension nécessite l’adoption d’une résolution du CSNU au titre du chapitre VII de la Charte des Nations unies, qui traite de la gestion de la sécurité internationale. Cette suspension peut être renouvelée indéfiniment sous la même forme (article 16 du Statut de Rome).

Outre les enquêtes sur les affaires ou les situations officiellement déférées à la Cour, le Procureur peut également procéder à l’examen préliminaire de situations qu’il juge préoccupantes avant de procéder à une demande officielle d’enquête.

Depuis sa création jusqu’en juin 2025, la CPI a enquêté sur 32 affaires dans 17 pays (Voir Infra, section VI). En juin 2025 , le Procureur mène également trois examens préliminaires dans trois pays (Voir Infra, section VI)

Compte tenu de l’existence de trois voies différentes de saisine de la CPI, il est intéressant de voir comment chacune d’entre elles a été utilisée.

Depuis la création de la CPI jusqu’à juin 2025, les États ont saisi directement la CPI concernant des situations dans 9 pays : L’Ouganda, en 2003, a été le premier État à déférer une situation sur son propre territoire. Il a été suivi par la RDC en 2004 puis à nouveau en juin 2023. La République centrafricaine a saisi la CPI en 2005 et de nouveau en 2014, le Mali en 2012, les Comores en 2013, le Gabon en 2016, l’Ukraine en 2014 et 2022 et l’Etat de Palestine depuis 2015. La situation au Venezuela a aussi été déférée à la CPI par un groupe de 6 Etats parties en 2018.

Depuis la création de la CPI jusqu’à juin 2025, le CSNU a fait usage de son pouvoir d’imposer la compétence de la CPI à deux Etats qui ne sont pas parties à la CPI. Dans le cas du Soudan, en 2005, le CSNU a renvoyé la situation au Procureur, imposant ainsi cette décision au gouvernement soudanais dans le cadre du conflit au Darfour (Résolution 1593, 31 mars 2005). Dans le cas de la Libye, le CSNU a également imposé la compétence de la CPI en inculpant le président libyen en 2011, tout en autorisant une intervention militaire internationale pour protéger les civils contre leur propre gouvernement (Résolution 1970, 26 février 2011).

Depuis la création de la CPI jusqu’à juin 2025, le Procureur a exercé son pouvoir d’ouvrir des affaires proprio motu dans 7 cas différents . L’affaire de l’Ukraine ayant ensuite été renvoyée par 38 autres États, le Procureur enquête actuellement sur six affaires de sa propre initiative : le Kenya, la Cote d’Ivoire, la Géorgie, le Bangladesh/Myanmar, les Philippines et l’Afghanistan. Le 31 mars 2010, la Chambre préliminaire II de la CPI a autorisé pour la première fois le Procureur à ouvrir une enquête de sa propre initiative sur la situation au Kenya concernant des crimes contre l’humanité qui auraient été commis dans le contexte des violences post-électorales de 2007-2008. Le 3 octobre 2011, la Chambre préliminaire III de la CPI a également autorisé le Procureur à ouvrir une enquête de sa propre initiative sur la situation en Côte d’Ivoire en ce qui concerne les crimes qui auraient été commis depuis le 28 novembre 2010 et les crimes qui pourraient être commis à l’avenir dans le cadre de cette situation. La Côte d’Ivoire, qui a ratifié le Statut de Rome en février 2013, avait déjà fait une déclaration acceptant la compétence de la CPI le 18 avril 2003 et plus récemment le 3 mai 2011. Le 27 janvier 2016, la Chambre préliminaire I de la CPI a autorisé le Procureur à ouvrir une enquête proprio motu sur la situation en Géorgie concernant des crimes présumés commis dans le cadre d’un conflit armé international entre le 1er juillet et le 10 octobre 2008 en Ossétie du Sud et dans ses environs. Le 14 novembre 2019, la Chambre préliminaire III a autorisé le Procureur à enquêter sur des crimes présumés relevant de la compétence de la CPI commis dans le cadre de la situation au Bangladesh/Myanmar. Cette autorisation fait suite à la demande du Procureur soumise le 4 juillet 2019, d’ouvrir une enquête sur les crimes présumés relevant de la compétence de la CPI commis à l’encontre du peuple Rohingya au Myanmar. La Chambre a conclu que la Cour peut exercer sa compétence sur les crimes si une partie de la conduite criminelle a eu lieu sur le territoire d’un État partie. Bien que le Myanmar ne soit pas un État partie, le Bangladesh a adhéré au Statut de Rome en 2010. Après avoir examiné les informations disponibles, la Chambre a admis qu’il y avait des motifs raisonnables de croire que des actes de violence généralisés et/ou systématiques ont pu être commis, qui pourraient être assimilés aux crimes contre l’humanité que sont la déportation à travers la frontière entre le Myanmar et le Bangladesh et les persécutions fondées sur l’appartenance ethnique et/ou la religion à l’encontre de la population rohingya. La Chambre n’a pas jugé nécessaire d’examiner si d’autres crimes relevant de la compétence de la Cour ont pu être commis, bien que de tels crimes allégués puissent faire partie de l’enquête future du Procureur. Le 14 juin 2021, le Procureur a demandé l’ouverture d’une enquête sur la situation de la République des Philippines, ce qui lui a été accordé le 15 septembre 2021 par la Chambre préliminaire I. L’enquête porte sur tout crime présumé, y compris, mais sans s’y limiter, le crime contre l’humanité de meurtre, commis aux Philippines entre le 1er novembre 2011 et le 16 mars 2019 dans le cadre de la campagne dite de « guerre contre la drogue». Le 5 mars 2020, la Chambre d’appel de la CPI a autorisé le Procureur à ouvrir une enquête proprio motu sur la situation en Afghanistan concernant des crimes présumés commis sur son territoire, amendant ainsi la décision de la Chambre préliminaire II du 12 avril 2019 qui avait rejeté la demande du Procureur. (Voir infra, section VI).

2. Crimes relevant de la compétence de la CPI (compétence ratione materiae)

L’article 5 du Statut de Rome énumère les 4 crimes relevant de la compétence de la Cour :

  • Le génocide (défini à l’article 6).

La définition de la CPI est la même que celle utilisée dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948. ➔ Génocide

  • Les Crimes contre l’humanité (définis à l’article 7)
  • Les Crimes de guerre (définis à l’article 8)

La définition de la CPI couvre les crimes commis dans les conflits armés internationaux qui étaient déjà énumérés dans le droit international humanitaire, ainsi que les crimes commis dans les conflits armés non internationaux qui n’étaient pas encore couverts par les conventions internationales précédentes. Toutefois, lors de la ratification du Statut de Rome, les États ont la possibilité de se soustraire à la compétence de la Cour en matière de crimes de guerre pour une période non renouvelable de sept ans (art. 124 du Statut de Rome). ➔ Crimes de guerre/crimes contre l’humanité ;

  • L’Agression (définie à l’article 8 bis du Statut de Rome)

Agression

Selon l’ancien article 5(2) du Statut de Rome, la CPI « exerce sa compétence à l’égard du crime d’agression une fois qu’une disposition est adoptée conformément aux articles 121 et 123 définissants le crime et énonçant les conditions dans lesquelles la Cour exerce sa compétence à l’égard de ce crime. »

Par sa nature même, le crime d’agression implique la responsabilité directe du chef de l’État. Cela explique pourquoi il a fallu plus de temps pour que les États Parties parviennent à un consensus sur la définition et la poursuite de ce crime international particulier. Cela explique également les limitations spécifiques convenues entre les États concernant la compétence de la CPI sur le crime d’agression.

La compétence théorique de la CPI sur le crime d’agression, prévue dans le Statut original de 1998, s’est lentement matérialisée.

La définition de l’agression a été adoptée par consensus par l’Assemblée des États Parties (AEP) lors de la Conférence de révision du Statut de Rome de 2010, tenue à Kampala, en Ouganda. La définition du crime d’agression, inspirée par la Résolution 3314 de l’Assemblée générale des Nations Unies du 14 décembre 1974, a ainsi été incorporée dans le Statut de Rome à l’article 8 bis. Deux conditions devaient être remplies avant que la Cour puisse exercer sa compétence à l’égard de ce crime : premièrement, au moins 30 États Parties devaient ratifier ou accepter l’amendement, et deuxièmement, les deux tiers des États Parties devaient adopter une décision pour activer la compétence de la Cour (art. 9(1), 15 bis (2), (3), 15 ter (2), (3) et 121(5) du Statut de Rome). Le 30ème État, la Palestine, a adopté l’amendement le 26 juin 2016. Le 14 décembre 2017, l’AEP a voté par consensus pour adopter l’amendement, marquant la première fois dans l’histoire qu’une cour internationale est habilitée en permanence à tenir des individus responsables du crime d’agression.

Cependant, les États ont adopté deux conditions supplémentaires limitant la compétence de la CPI sur le crime d’agression. Ces conditions restrictives diffèrent de celles applicables aux autres crimes relevant de la compétence de la CPI. La première condition concerne la possibilité pour tout État Partie de se soustraire à la compétence de la CPI en matière d’agression. La deuxième condition concerne l’exigence spécifique que l’État accusé d’agression et l’État victime soient tous deux parties au Statut de Rome, et qu’ils aient tous les deux ratifié l’amendement et accepté la compétence optionnelle de la cour pour ce crime. La compétence de la CPI sur le crime d’agression n’est effective que depuis le 7 juillet 2018, date à laquelle le Statut de Rome est entré en vigueur avec ses divers amendements établissant le régime spécial de compétence de la CPI sur ce crime. Cela se reflète dans les nouveaux articles 15 bis (4) et (5) et l’article 121(5) du Statut de Rome.

Ces conditions cumulatives limitent la compétence effective de la CPI sur le crime d’agression. Les Éléments des crimes de la CPI ont également été amendés pour inclure ceux du crime d’agression. L’un des éléments affirme que le crime d’agression doit être commis par une personne ou des personnes « en mesure de contrôler effectivement ou de diriger l’action politique ou militaire de l’État ayant commis l’acte d’agression » (Éléments des crimes, art. 8 bis, Éléments 2, p. 30). Le crime d’agression a un régime juridictionnel unique par rapport aux autres crimes relevant de la compétence de la Cour. En effet, le Procureur doit respecter trois conditions pour ouvrir une enquête soit sur renvoi d’un État partie (art. 14(1) du Statut de Rome) soit de sa propre initiative (proprio motu) (art. 15(1) du Statut de Rome). Le Procureur ne peut agir : (1) qu’après avoir vérifié si le Conseil de sécurité des Nations Unies a déterminé l’existence d’un acte d’agression (conformément à l’article 39 de la Charte des Nations Unies) (art. 15 bis(6) et (7) du Statut de Rome) ; (2) en cas d’acte d’agression commis entre États Parties ; et (3) après que la Division préliminaire de la Cour a autorisé l’ouverture de l’enquête si, six mois après l’événement, le Conseil de sécurité n’a pas reconnu l’acte d’agression (art. 15 bis(8) du Statut de Rome). ➔ Agression

En complément à la définition des crimes prévue aux articles 6, 7, 8 et 8 bis du Statut de Rome, deux documents procéduraux essentiels ont été adoptés par l’Assemblée des États Parties (AEP) en juillet 2002, lors de l’entrée en vigueur de la CPI : le Règlement de procédure et de preuve et les Éléments des crimes. Les États voulaient fournir des orientations strictes aux juges dans leur interprétation de la définition des crimes, dans la conduite de leurs enquêtes, ainsi qu’en ce qui concerne le niveau de preuve requis devant la CPI. Le Règlement de procédure et de preuve est un document qui aide la Cour dans l’application du Statut de Rome et fixe la procédure devant la Cour, tandis que les Éléments des crimes assistent la Cour dans l’interprétation et l’application de la définition substantielle des crimes énumérés dans le Statut, à savoir le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre. Les Éléments des crimes et le Règlement de procédure et de preuve peuvent être amendés par proposition de (a) tout État Partie, (b) les juges agissant à la majorité absolue, et (c) le Procureur. Cependant, les amendements proposés doivent être adoptés à la majorité des deux tiers des membres de l’AEP et doivent être conformes au Statut de Rome (art. 9 et 51 du Statut de Rome).

3. Compétence personnelle (juridiction ratione personae)

La Cour a compétence sur toute personne accusée d’un crime relevant de la compétence de la CPI, à l’exception de toute personne qui était âgée de moins de 18 ans au moment de la commission présumée du crime (art. 26 du Statut de Rome).

Le Statut de Rome prévoit expressément à l’article 27 que l’immunité ne peut jamais être invoquée concernant les crimes sur lesquels la CPI a compétence.

L’article 27(1) du Statut de Rome stipule que la Cour aura compétence sur « toutes les personnes sans aucune distinction basée sur la qualité officielle. En particulier, la qualité officielle en tant que chef d’État ou de gouvernement, membre d’un gouvernement ou d’un parlement, représentant élu ou fonctionnaire gouvernemental ne saurait en aucun cas exonérer une personne de sa responsabilité pénale en vertu du présent Statut, ni constituer en soi un motif de réduction de peine. »

Cet article réaffirme les principes dérivés des précédents établis par les procès de Nuremberg conduits sous l’égide du Tribunal militaire international (TMI) (voir art. 7 de la Charte de Londres (établissant le TMI) et TMI, Jugement du 1er octobre 1946 dans Le Procès des grands criminels de guerre allemands, Allemagne, Partie 22 à la p. 56), le Tribunal militaire international de Tokyo (voir art. 6 de la Charte du TMI de Tokyo), l’affaire Eichmann tenue en Israël en 1961 et la Cour internationale de Justice (CIJ) (voir République démocratique du Congo c. Belgique, Affaire concernant le mandat d’arrêt du 11 avril 2000, Jugement, 14 février 2002, par. 61) et les deux Tribunaux pénaux internationaux ad hoc pour l’ex-Yougoslavie (voir art. 7(2) de son Statut) et le Rwanda (voir art. 6(2) de son Statut). Il confère un statut juridique permanent et contraignant à l’impossibilité pour les responsables officiels d’invoquer l’immunité pour leur responsabilité pénale individuelle concernant les crimes contre l’humanité, l’agression et/ou les crimes de guerre devant une cour internationale (voir par exemple, les Conventions de Genève, la Convention contre le génocide et la Convention contre la torture).

Immunité

4. Compétence temporelle (juridiction ratione temporis)

La CPI n’a compétence que sur les crimes commis après l’entrée en vigueur du Statut de Rome pour l’État concerné (art. 11 et 24(1) du Statut de Rome). Cela découle du principe juridique bien établi de non-rétroactivité des lois pénales, qui est une dérivation de la doctrine nullum crimen sine lege (pas de crime sans loi) et selon laquelle une loi ne peut pas être appliquée à des actes survenus avant la promulgation de la loi.

Non-rétroactivité

5. Peines

La CPI peut imposer des peines d’emprisonnement allant jusqu’à 30 ans ou, au plus, une peine de réclusion à perpétuité. Elle peut également ordonner des amendes et la confiscation des produits, biens et avoirs provenant directement ou indirectement de ce crime (art. 77 du Statut de Rome). C’est la seule institution internationale capable d’imposer de telles peines aux individus.

La peine d’emprisonnement est purgée dans un État choisi par la Cour parmi une liste d’États ayant indiqué leur volonté d’accepter des personnes condamnées (art. 103 du Statut de Rome). La CPI supervise l’exécution des peines, mais les conditions d’emprisonnement sont régies par la loi de l’État responsable de leur mise en œuvre et doivent, en tout état de cause, être conformes aux normes internationales régissant le traitement des prisonniers (art. 106 du Statut de Rome). Le droit de statuer sur toute demande d’appel et de révision est cependant réservé à la CPI (art. 105 du Statut de Rome).

IV. Relations entre la CPI et les Etats

1. Relations entre la CPI et les juridictions nationales

Contrairement aux Tribunaux pénaux internationaux ad hoc, la CPI n’a pas la primauté sur les juridictions pénales nationales. Sa compétence est complémentaire aux systèmes nationaux, ce qui signifie que la compétence de la Cour ne peut être exercée si une affaire est en cours d’enquête ou de poursuite par un État ayant compétence sur celle-ci. Cette restriction peut être levée si la Cour peut établir que les procédures ont été entreprises dans le but de soustraire l’accusé à la responsabilité pénale devant la CPI, s’il y a un retard injustifié dans les procédures nationales, ou si les procédures nationales ne sont pas conduites de manière indépendante et impartiale (art. 17 et 20 du Statut de Rome). La Cour peut également exercer sa compétence si l’État en question est incapable de mener l’enquête ou la poursuite, par exemple en raison de l’effondrement total ou substantiel ou de l’indisponibilité de son système judiciaire national (art. 17(3) du Statut de Rome).

2. Ne Bis in Idem

Il s’agit d’un principe juridique bien établi, tant en droit pénal national qu’en droit international, selon lequel une personne ne doit pas être jugée deux fois pour la même infraction (également connu sous le nom de protection contre la double incrimination). C’est l’une des garanties les plus importantes du droit à un procès équitable et elle est reflétée à l’article 20 du Statut de Rome.

Un individu jugé devant la CPI ne peut donc pas être jugé à nouveau devant une cour nationale pour le même crime. De même, la CPI ne peut pas statuer sur un acte pour lequel une personne a déjà été jugée par une cour nationale. Cependant, il existe des exceptions : la CPI peut ensuite juger la personne si les procédures devant l’autre cour ont été menées “dans le but de soustraire la personne concernée à la responsabilité pénale pour des crimes relevant de la compétence de la Cour ; ou n’ont pas été conduites de manière indépendante ou impartiale conformément aux normes du procès équitable reconnues par le droit international et ont été menées de manière incompatible avec l’intention de traduire la personne concernée en justice.” (art. 20(3) du Statut de Rome).

3. Obligations de coopération des Etats et assistance judiciaire mutuelle

Le Statut de Rome établit que les États ont l’obligation générale de coopérer pleinement avec la Cour (art. 86 du Statut de Rome). Cependant, si un État refuse de coopérer, il n’existe aucune disposition pour le pénaliser. L’article 87(5)(b) et (7) établit le seul recours disponible pour la CPI : elle peut notifier l’AEP (qui n’a aucun pouvoir de pénaliser un État), ou, si le Conseil de sécurité de l’ONU a renvoyé l’affaire à la CPI, elle peut notifier le Conseil de sécurité du refus de l’État de coopérer. Malheureusement, de tels cas de non-coopération sont devenus fréquents et ont entravé le fonctionnement efficace de la Cour, comme le démontrent les situations au Soudan, en Libye et au Kenya.

L’obligation de coopérer s’applique à toutes les demandes faites par la Cour dans le cadre de ses enquêtes et poursuites. Les demandes peuvent concerner l’arrestation et la remise de personnes à la Cour, la production de documents ou de preuves, l’identification et la localisation d’une personne, l’exécution de perquisitions et de saisies, et d’autres types d’assistance (art. 89 et 93 du Statut de Rome).

Les États sont autorisés à transmettre des informations au Procureur de manière confidentielle (art. 54(3)). Si la divulgation de telles informations ou documents, selon l’avis d’un État, porterait préjudice à ses intérêts de sécurité nationale, il peut refuser la demande de la Cour. Dans ce cas, la Cour (voir par exemple art. 57(3)(c) du Statut de Rome) et l’État doivent prendre toutes les mesures raisonnables pour trouver une solution permettant d’utiliser les documents sans menacer la sécurité nationale de l’État (art. 72(5) du Statut de Rome). Si l’État considère qu’il n’y a aucun moyen ou condition sous lesquels il autoriserait la divulgation de l’information, il doit en informer la Cour (art. 72(6) du Statut de Rome), qui n’a alors d’autre recours que ceux prévus aux articles 87(5)(b) et (7) du Statut de Rome, mentionnés plus haut.

V. Le statut des victimes et des témoins

1. Le droit à réparations pour les victimes

Contrairement à la pratique des Tribunaux pénaux internationaux ad hoc, les victimes peuvent être représentées en tant que telles devant la CPI et peuvent obtenir des réparations. Il s’agit d’une étape importante vers l’instauration d’une justice réparatrice pour les victimes des crimes les plus graves relevant de la compétence de la CPI, et également dans la mise en œuvre de la résolution 60/147 de l’Assemblée générale des Nations Unies du 21 mars 2006 sur les Principes et directives fondamentaux concernant le droit à un recours et à réparation pour les victimes de violations flagrantes du droit international des droits de l’homme et de violations graves du droit international humanitaire.

La Cour distingue donc le statut des victimes de celui des témoins, conformément à l’approche prévalant dans le système de droit civil.

En effet, le Règlement de procédure et de preuve de la CPI définit les victimes à la Règle 85(a) comme « les personnes physiques qui ont subi un préjudice du fait de la commission de tout crime relevant de la compétence de la Cour. » Par conséquent, l’éligibilité aux réparations est limitée aux victimes ayant subi un préjudice du fait des crimes pour lesquels l’accusé a été condamné. Lorsque des réparations sont accordées au bénéfice d’une communauté, seuls les membres de la communauté remplissant les critères pertinents seront éligibles (voir Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04-01/06, Jugement sur les appels contre la « Décision établissant les principes et procédures à appliquer aux réparations » du 7 août 2012, Chambre d’appel, 3 mars 2015, par. 8).

En dehors de la CPI, les CETC sont la seule autre cour pénale internationale (ou hybride) où les victimes peuvent demander des réparations (voir Règlement intérieur des CETC, Règles 23(1)(b), 23bis (1)) et 23quinquies (1)). Cependant, aux CETC, seules des réparations collectives et morales peuvent être accordées, et les paiements monétaires ne sont pas autorisés (Règlement intérieur des CETC, Règle 23quinquies (1)).

Le Statut de Rome permet aux victimes d’être représentées devant la CPI par des avocats lorsque leurs intérêts personnels sont affectés (art. 68(3)). L’article 75 permet à la Cour de définir l’étendue et l’importance des dommages et fixe les principes relatifs aux diverses formes de réparation à accorder aux victimes ou à leur égard, y compris la restitution, l’indemnisation et la réhabilitation. Afin de faciliter le processus, la Cour a développé un formulaire que les victimes peuvent utiliser pour demander des réparations.

Conformément à l’article 79 du Statut de Rome, un Fonds au profit des victimes (FPV) a été créé en septembre 2002 pour le bénéfice des victimes et de leurs familles. Il est indépendant de la CPI et est dirigé par un conseil d’administration de cinq membres nommés par l’AEP pour un mandat de trois ans, renouvelable une fois. La Cour peut ordonner que l’argent et les autres biens appartenant au délinquant soient collectés par des amendes ou des confiscations et transférés au FPV. Le FPV reçoit des dons et des contributions volontaires des gouvernements, des organisations internationales, des particuliers, et d’autres fonds alloués par l’AEP. Les réparations peuvent être accordées individuellement ou collectivement et peuvent être payées par le délinquant ou par le FPV. Elles peuvent être versées directement aux victimes ou transférées à celles-ci par l’intermédiaire d’organisations internationales ou nationales approuvées par le FPV (art. 79).

Lors de sa quatrième session en 2005, l’AEP a examiné le projet de règlement du FPV. Malgré de nombreuses discussions, les États sont restés divisés sur la question de l’affectation des contributions volontaires aux victimes d’un pays particulier. Le débat a également porté sur la portée du mandat du FPV et les mécanismes de déclenchement. La question principale était de savoir si le FPV devait être utilisé uniquement pour mettre en œuvre les réparations ordonnées par la Cour aux victimes identifiées par une personne condamnée, ou si le FPV pouvait être utilisé pour fournir une assistance générale aux victimes touchées par une situation préoccupante pour la CPI, même avant la conclusion d’un procès particulier. Certains États (dont la France, la Belgique et la RDC) estimaient que le FPV devait également avoir une composante d’assistance pouvant intervenir avant la condamnation d’une personne accusée et indépendamment de la Cour, tandis que d’autres (dont le Royaume-Uni et le Canada) croyaient fermement que le FPV ne devait avoir qu’une fonction réparatrice et agir strictement sur ordre de la Cour. Un compromis a été trouvé permettant au FPV d’avoir un mandat d’assistance générale dans les pays et situations faisant l’objet d’une enquête par la Cour. Dans de telles situations, le FPV peut utiliser les contributions volontaires des donateurs pour fournir une réhabilitation physique, un soutien matériel et une réhabilitation psychologique aux victimes et à leurs familles. Cependant, le conseil du FPV doit informer la Chambre compétente de la Cour à l’avance de sa décision de mener certaines activités. Ces activités ne doivent pas préjuger de toute question à déterminer par la Cour (y compris le statut individuel des victimes), violer la présomption d’innocence, ou porter atteinte ou être incompatibles avec les droits de l’accusé à un procès équitable et impartial.

En avril 2025, le FPV gère 7 situations relevant de la compétence de la Cour : la République centrafricaine, la Côte d’Ivoire, la République démocratique du Congo, le Kenya, la Géorgie, le Mali et l’Ouganda.

Les montants des réparations déterminés par la CPI dans les cinq affaires ayant atteint le stade du jugement final sont les suivants: 10 millions de dollars pour des réparations collectives basées sur des services et des réparations symboliques dans l’affaire Lubanga, 1 million de dollars dans l’affaire Katanga pour des réparations individuelles et collectives, 2,7 millions d’euros dans l’affaire Al Mahdi pour des réparations individuelles et collectives, 31,3 millions de dollars dans l’affaire Ntaganda et 52,429 millions d’euros dans l’affaire Ongwen.

Selon le rapport de juin 2022, le FPV menait 20 projets d’assistance en République centrafricaine, en Côte d’Ivoire, en RDC, au Mali et en Ouganda, avec le début de nouveaux programmes d’assistance en Géorgie, au Kenya et au Mali pour lesquels des partenaires de mise en œuvre avaient déjà été sélectionnés. Ces projets d’assistance ont atteint environ 418 000 victimes de crimes relevant de la compétence de la Cour au cours de l’année 2021. Pour la période 2023-2025, le FPV envisage de continuer à soutenir la République centrafricaine, la Côte d’Ivoire, la République démocratique du Congo, la Géorgie, le Kenya, le Mali et l’Ouganda.

Les fonds sont alloués par divers programmes d’ONG soutenant les victimes de violences dans les zones de préoccupation de la CPI. En 2023, le budget approuvé pour le FPV était de 3,88 905 millions d’euros. Les principaux pays donateurs du FPV entre 2004 et 2020 étaient la Belgique, la Finlande, l’Irlande, les Pays-Bas, la Suède et le Royaume-Uni.

Le 7 août 2012, la Chambre de première instance I de la CPI a rendu sa première décision définissant les principes applicables aux réparations pour les victimes de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité dans l’affaire Thomas Lubanga Dyilo, reconnu coupable par la CPI le 14 mars 2012. La Chambre a décidé que les réparations seraient accordées par l’intermédiaire du FPV (infra, Jurisprudence). Après que sa condamnation a été confirmée en appel plus de deux ans plus tard, le 3 mars 2015, la Chambre d’appel a rendu une ordonnance de réparation contre Lubanga et a demandé au FPV d’élaborer un plan de mise en œuvre qui a ensuite été approuvé par la Chambre de première instance.

Réparation (Indemnisation )

2. Protection des Victimes et des Témoins

Des dispositions ont été adoptées pour assurer la sécurité, le bien-être physique et psychologique, la dignité et la vie privée des victimes et des témoins (art. 68 du Statut de Rome). Ces dispositions comprennent la possibilité de mener toute partie de la procédure à huis clos (in camera) ou de présenter des preuves par voie électronique (art. 68(2) du Statut de Rome). Des mesures permettent notamment de protéger les victimes et les témoins en limitant l’exposition publique de leur identité par l’anonymat. Cependant, l’identité des victimes et témoins doit toujours être divulgué à l’accusé pour lui permettre d’exercer son droit à la défense. Ces mesures de protection ont donc une portée très limitée .

Une Unité d’aide aux victimes et aux témoins, rattachée au Greffe de la CPI, a été créée pour mettre en œuvre ces mesures de protection.

Dans la majorité des cas nécessitant une protection pour les victimes et les témoins, le Procureur a concentré les enquêtes et les inculpations sur des crimes spécifiques tels que l’enrôlement d’enfants soldats et les violences sexuelles.

3. Statut Humanitaire pour le Comité International de la CroixRouge (CICR)

La nature spécifique et les contraintes de l’action humanitaire en situation de conflit armé et de violence ont conduit le CICR à demander et à obtenir un statut d’exemption de l’obligation de coopérer avec la Cour. Cette exemption protège le CICR de l’obligation de fournir des documents, des informations, et des preuves, ainsi que de comparaître en tant que témoin dans toute affaire ou situation examinée par la Cour. Ces privilèges sont accordés au CICR de manière permanente par la Règle 73(4) du Règlement de procédure et de preuve, adoptée par l’AEP en 2002. Cette règle accorde également ce même privilège aux personnes et informations liées par le secret professionnel : médecins, avocats, journalistes, etc. (art. 73(3) du Règlement de procédure et de preuve).

Les organisations humanitaires impartiales opérant comme le CICR dans situations de conflit armé ou de violence peuvent revendiquer les mêmes privilèges sur une base ad hoc lorsqu’elles sont confrontées à une demande de fournir des informations, des témoignages ou toute autre forme de coopération à la CPI. Leur demande doit être fondée sur l’esprit de la Règle 73(4) et sur les décisions antérieures des tribunaux internationaux ad hoc sur ce même sujet. Les tribunaux pénaux internationaux ont en effet déjà reconnu l’incompatibilité entre les activités et la sécurité des travailleurs humanitaires impartiaux et de leurs organisations associées opérant en situation de conflit armé et celles d’un témoin dans une affaire pénale. Une telle demande doit être conforme à la politique et à la pratique de l’organisation humanitaire requérante.

VI. Situation et Affaires devant la CPI

Depuis la création de la CPI, jusqu’en juin 2025, des dizaines de situations et d’affaires concernant 17 pays ont été traitées par la CPI et se trouvent actuellement au stade de l’enquête ou du jugement. Les pays concernés sont : La République démocratique du Congo (RDC), l’Ouganda, le Soudan, la République Centrafricaine (RCA), la Libye, la Côte d’Ivoire, la République du Kenya, la République du Mali, la Géorgie, le Burundi, le Bangladesh et Myanmar, l’Afghanistan, l’État de Palestine, l’Ukraine, la République des Philippines, et le Venezuela.

En 2025, le Procureur est également engagé dans l’examen préliminaire d’autres situations dans trois pays : Nigeria, Venezuela et la République de Lituanie/République Bélarus.

Ces situations, affaires et enquêtes sont résumées ci-dessous.

ENQUETES,SITUATIONS ET AFFAIRES GEREES PAR LA CPI (en date de juin 2025)

République Démocratique du Congo (RDC)

La RDC a ratifié le Statut de Rome le 11 avril 2002 et a soumis une première situation à la CPI le 19 avril 2004. Suite à un examen préliminaire, le Bureau du Procureur a ouvert officiellement une première enquête le 23 juin 2004 (RDC I).

Les juges ont émis six mandats d’arrêt dans cette situation. Un en février 2006 contre Thomas Lubanga Dyilo, Président de l’Union des Patriotes Congolais (UPC)/Forces Patriotiques pour la Libération du Congo (UPC/FPLC), un groupe rebelle actif dans l’est de la RDC (Ituri); un en juillet 2007 contre Germain Katanga, l’ex-commandant présumé de la Force de Résistance Patriotique en Ituri (“FRPI”); un autre en même temps que celui pour Katanga, en juillet 2007 contre le leader du Front Nationaliste et Intégrationiste (FNI), Mathieu Ngudjolo Chui; un en août 2006 (renouvelé en juillet 2012) contre Bosco Ntaganda, ancien chef d’état-major et commandant des opérations des Forces Patriotiques pour la Libération du Congo (FPLC); un en septembre 2010 contre Callixte Mbarushimana, l’ex-Secrétaire Exécutif présumé des Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda - Forces Combattantes Abacunguzi (FDLR-FCA, FDLR) et un en juillet 2012 contre Sylvestre Mudacumura, l’ex-commandant suprême de l’aile militaire des Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda (FLDR).

Six affaires ont été portées devant la Cour : Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo ; Procureur c. Bosco Ntaganda ; Procureur c. Germain Katanga ; Procureur c. Mathieu Ngudjolo Chui ; Procureur c. Callixte Mbarushimana ; et Procureur c. Sylvestre Mudacumura.Le 25 janvier 2011, les autorités françaises ont remis M. Mbarushimana à la CPI, et il a ensuite été transféré au Centre de Détention de la Cour à La Haye. L’audience de confirmation des charges dans l’affaire Procureur c. Callixte Mbarushimana a eu lieu du 16 au 21 septembre 2011. Le 16 décembre 2011, la Chambre préliminaire I a décidé à la majorité de ne pas confirmer les charges contre M. Mbarushimana et de le libérer de la détention de la Cour, après les arrangements nécessaires.

L’accusé Bosco Ntaganda s’est rendu volontairement à la CPI le 22 mars 2013. Le procès dans l’affaire Procureur c. Bosco Ntaganda a commencé le 2 septembre 2015 et les plaidoiries finales ont eu lieu du 28 au 30 août 2018. Le 8 juillet 2019, la Chambre de première instance VI a déclaré M. Ntaganda coupable au-delà de tout doute raisonnable de 18 chefs de crimes de guerre et crimes contre l’humanité pour des crimes commis en Ituri, RDC, en 2002-2003. La Chambre de première instance VI l’a condamné le 7 novembre 2019 à 30 ans de réclusion. Tant le Procureur que M. Ntaganda ont interjeté appel du verdict et le 30 mars 2021, la Chambre d’appel de la CPI a confirmé la condamnation et la peine. M. Ntaganda a ainsi été transféré au Royaume de Belgique pour purger sa peine d’emprisonnement à la prison de Leuze-en-Hainaut le 14 décembre 2022. Le 8 mars 2021, la Chambre de première instance VI a rendu son Ordonnance sur les Réparations aux victimes à être effectuées par le biais du Fonds au profit des victimes (TFV) de la CPI, pour laquelle plusieurs questions ont été renvoyées par l’arrêt de la Chambre d’appel du 12 septembre 2022. Suite à cette décision de 2022, la Chambre de première instance a été priée de rendre une nouvelle ordonnance de réparations. Le 14 juillet 2023, la Chambre de première instance II a émis un addendum à l’Ordonnance de Réparations du 8 mars 2021 dans lequel elle a évalué la responsabilité de M. Ntaganda pour des réparations à hauteur de 31 300 000 dollars américains et a statué sur tous les aspects du Plan de Mise en œuvre provisoire qui ne nécessitent pas de nouvelles soumissions de la part du TFV ou des parties.

Le procès dans l’affaire Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo a commencé le 26 janvier 2009. Le 14 mars 2012, il a été reconnu coupable des crimes de guerre de recrutement et d’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans et de leur utilisation active dans les hostilités. Le 10 juillet 2012, il a été condamné à 14 ans d’emprisonnement. Le verdict et la peine ont été confirmés par la Chambre d’appel le 1er décembre 2014. Le 19 décembre 2015, M. Lubanga a été transféré dans une prison en RDC pour purger sa peine d’emprisonnement et a été libéré à l’issue de sa peine le 15 mars 2020. En ce qui concerne les réparations, le 7 août 2012, la Chambre de première instance I a rendu une décision sur les principes et le processus à appliquer pour les réparations aux victimes dans l’affaire, décision qui a été modifiée par la Chambre d’appel le 3 mars 2015. Le 21 octobre 2016, la Chambre de première instance II a approuvé et ordonné le début de la mise en œuvre d’un plan soumis par le TFV pour des réparations collectives symboliques pour les victimes et le 6 avril 2017, elle a également approuvé le cadre programmatique pour des réparations collectives basées sur des services. Enfin, le 15 décembre 2017, la Chambre de première instance II a fixé le montant de la responsabilité de Thomas Lubanga Dyilo pour les réparations collectives à 10 000 000 dollars américains.

Le 4 mars 2021, la Chambre de première instance II a publié une version expurgée de sa décision du 14 décembre 2020, approuvant la mise en œuvre de réparations collectives aux victimes sous la forme de prestations de services.

Le procès dans l’affaire Procureur c. Germain Katanga et Mathieu Ngudjolo Chui a commencé le 24 novembre 2009 et a été séparé en deux affaires (Procureur c. Germain Katanga et Procureur c. Mathieu Ngudjolo Chui) le 21 novembre 2012. Le 18 décembre 2012, la Chambre de première instance II a acquitté Mathieu Ngudjolo Chui des charges de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité et a ordonné sa libération immédiate. La Chambre d’appel a confirmé ce verdict le 27 février 2015 et Chui a été libéré de la détention.Le 7 mars 2014, la Chambre de première instance II, statuant à la majorité, a rendu son jugement dans l’affaire Katanga. Germain Katanga a été reconnu coupable d’un chef de crime contre l’humanité (meurtre) et de quatre chefs de crimes de guerre (meurtre, attaque contre une population civile, destruction de biens et pillage) commis le 24 février 2003. Le 23 mai 2014, il a été condamné à un total de 12 ans d’emprisonnement. Le 25 juin 2014, la Défense de Germain Katanga et le Bureau du Procureur ont retiré leurs appels contre le jugement, le rendant ainsi définitif. Le 24 mars 2017, la Chambre de première instance II a rendu une ordonnance accordant des réparations individuelles et collectives aux victimes. La Chambre de première instance II a attribué à 297 victimes une compensation symbolique de 250 dollars américains par victime ainsi que des réparations collectives sous forme de soutien au logement, soutien aux activités génératrices de revenus, aide à l’éducation et soutien psychologique (totalisant 1 million de dollars américains selon la décision du Conseil du TFV). Le 8 mars 2018, la Chambre d’appel a confirmé, pour l’essentiel, l’Ordonnance sur les Réparations dans l’affaire. En juin 2025, M. Sylvestre Mudacumura reste en fuite et tant qu’il n’est pas arrêté, l’affaire reste au stade de l’instruction préliminaire.

République Démocratique du Congo (RDC) II

Le 23 mai 2023, la RDC a soumis une nouvelle situation à la CPI (RDC II) et a demandé à la Cour de commencer une enquête sur les crimes présumés relevant du Statut commis dans la province du Nord-Kivu en RDC, depuis le 1er janvier 2022 jusqu’à ce jour.

La situation a été attribuée à la Chambre préliminaire I le 15 juin 2023. Le Procureur procédera à un examen préliminaire des informations reçues pour évaluer les éléments de preuve et déterminer si une enquête plus approfondie est nécessaire. L’examen préliminaire visera à établir la validité des allégations et à déterminer les prochaines étapes en fonction des résultats obtenus .

Nord de l’Ouganda

L’Ouganda a ratifié le Statut de Rome le 14 juin 2002 et s’est référé à la CPI le 16 décembre 2003. Suite à un examen préliminaire, le Bureau du Procureur a officiellement ouvert une enquête le 28 juillet 2004. Les juges de la CPI ont délivré des mandats d’arrêt contre cinq hauts dirigeants de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) le 8 juillet 2005. Les personnes nommées dans les mandats — Joseph Kony, Vincent Otti, Okot Odhiambo, Raska Lukwiya et Dominic Ongwen — ont toutes été inculpées de nombreux chefs de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre.

L’affaire anciennement connue sous le nom Procureur c. Joseph Kony, Vincent Otti, Raska Lukwiya, Okot Odhiambo et Dominic Ongwen a été entendue par la Chambre préliminaire II. Suite à la confirmation des décès de M. Lukwiya et M. Odhiambo, les procédures les concernant ont été terminées le 11 juillet 2007 et le 10 septembre 2015 respectivement. Deux des trois suspects restants dans cette affaire sont toujours en fuite : Joseph Kony et Vincent Otti. Tant qu’ils ne seront pas arrêtés et transférés au siège de la Cour à La Haye, l’affaire restera au stade préliminaire, la CPI ne jugeant les individus que s’ils sont présents dans la salle d’audience (en l’absence).

L’accusé Dominic Ongwen (ancien enfant soldat devenu l’un des principaux commandants du groupe armé LRA) a été remis à la garde de la CPI le 16 janvier 2015 et son procès devant la Chambre de première instance IX a commencé le 6 décembre 2016. Le 4 février 2021, il a été reconnu coupable de 61 chefs d’accusation comprenant des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, commis dans le nord de l’Ouganda entre le 1er juillet 2002 et le 31 décembre 2005. Il a été condamné le 6 mai 2021 à 25 ans d’emprisonnement. Malgré la présentation de 90 moyens de défense en appel, sa culpabilité et sa peine ont été confirmées par la Chambre d’appel le 15 décembre 2022. La Chambre d’appel a reconnu la complexité et les dilemmes posés par l’affaire, notamment pour déterminer le niveau de responsabilité criminelle d’une personne ayant commis des crimes de guerre tout en ayant été elle-même victime de crimes de guerre lorsqu’elle était enrôlée comme enfant soldat. C’était la première fois que la CPI devait évaluer les motifs d’exclusion ou d’atténuation de la responsabilité criminelle tels que la contrainte, et interpréter certains crimes sexuels et basés sur le genre.

La phase dédiée aux réparations pour les victimes s’est terminée le 28 février 2024, deux décennies après le début de l’affaire, lorsque la Chambre de première instance IX a rendu son ordonnance, fixant le montant des réparations à 52,429 millions d’euros pour un total de 49 772 victimes. C’est le montant le plus élevé jamais accordé par le TFV. En raison de l’indigence de M. Ongwen, la Chambre de première instance a encouragé le TFV à compléter les réparations dans la mesure du possible et à entreprendre des efforts de collecte de fonds supplémentaires si nécessaire pour compléter le montant total accordé. Cela représente un défi majeur pour le TFV, qui manque de ressources financières pour se conformer à l’ordonnance de la Cour. Les juges de la Chambre de première instance ont noté que le TFV devra entreprendre des efforts de collecte de fonds substantiels auprès des États, des organisations, des entreprises et des particuliers.

Enfants , Viol

Darfour, Soudan

Le Soudan n’est pas un État partie au Statut de Rome. Le 31 mars 2005, le Conseil de sécurité de l’ONU a renvoyé la situation au Darfour/Soudan à la CPI pour enquête par sa Résolution 1593. Après un examen préliminaire, le Bureau du Procureur a officiellement ouvert une enquête au Darfour le 6 juin 2005.

Les juges ont émis six mandats d’arrêt dans cette situation. Le 27 avril 2007, deux mandats d’arrêt ont été émis contre M. Ali Muhammad Ali Abd-Al-Rahman, le prétendu leader de la Milice/Janjaweed (réémis le 11 juin 2020) et M. Hamad Harun, l’ancien ministre d’État à l’Intérieur. Puis, le 4 mars 2009, un premier mandat d’arrêt a été émis contre M. Omar Hassan Ahmad Al Bashir et un second a suivi le 12 juillet 2010. M. Al Bashir avait été Président de la République du Soudan depuis le 16 octobre 1993 jusqu’à ce qu’il soit évincé le 11 avril 2019. La Cour a également émis un mandat d’arrêt le 7 mai 2009 contre l’ancien Président et Coordonnateur Général des Opérations Militaires du Front Uni de Résistance, M. Bahar Idriss Abu Garda. Par la suite, le 27 août 2009, un mandat d’arrêt a été émis contre M. Abdallah Banda Abakaer Nourain, ancien Commandant en Chef du Mouvement pour la Justice et l’Égalité - Direction Collective. Enfin, le 1er mars 2012, un autre mandat d’arrêt a été émis contre l’ancien ministre de la Défense Nationale, M. Abdel Raheem Muhammad Hussein, qui au moment du mandat servait comme ancien ministre de l’Intérieur et ancien Représentant Spécial du Président du Soudan au Darfour.

Six affaires ont été portées devant la Cour : Procureur c. Ahmad Muhammad Harun ; Procureur c. Ali Muhammad Ali Abd-Al-Rahman ; Procureur c. Omar Hassan Ahmad Al Bashir ; Procureur c. Bahar Idriss Abu Garda ; Procureur c. Abdallah Banda Abakaer Nourain et Saleh Mohammed Jerbo Jamus ; et Procureur c. Abdel Raheem Muhammad Hussein.

Suite à la première enquête dans la région du Darfour pour les crimes commis en 2003–2004, deux mandats d’arrêt ont été émis en 2007 contre Ahmad Muhammad Harun et Ali Muhammad Ali Abd-Al-Rahman pour de nombreux chefs de crimes contre l’humanité et crimes de guerre prétendument commis entre août 2003 et au moins avril 2004 au Darfour, Soudan. Alors que M. Harun reste en fuite et que son mandat d’arrêt est toujours en vigueur, M. Abd-Al-Rahman s’est rendu de lui-même tout en étant en République Centrafricaine. Il a été transféré sous la garde de la CPI le 9 juin 2020. Le 9 juillet 2021, dans l’affaire Procureur c. Ali Muhammad Ali Abd-Al-Rahman, les 31 charges ont été confirmées par la Chambre préliminaire II. La phase de jugement a commencé le 5 avril 2022 et se poursuit actuellement devant la Chambre de première instance I.

Après une seconde enquête, la Chambre préliminaire a émis un mandat d’arrêt contre Omar Hassan Ahmad Al Bashir, Président du Soudan à l’époque, pour trois chefs de génocide commis contre les groupes ethniques Fur, Masalit et Zaghawa, cinq chefs de crimes contre l’humanité et deux chefs de crimes de guerre prétendument commis entre 2003 et 2008 au Darfour, Soudan. C’était la première fois qu’un chef d’État en exercice était recherché par une cour internationale et également le premier chef d’accusation de génocide jamais porté devant la CPI. Un second mandat d’arrêt à son encontre a été émis le 12 juillet 2010 mais reste en suspens. Son affaire illustre un problème auquel la CPI est continuellement confrontée, comme mentionné précédemment, puisque l’exécution d’un mandat d’arrêt dépend de la coopération du pays où se trouve le fugitif, et de ses forces de police. Le 6 mai 2019, la CPI a statué que l’État de Jordanie avait manqué à ses obligations juridiques internationales en n’arrêtant pas Al-Bashir lors d’une visite en 2017. La décision a confirmé qu’il n’y a pas d’immunité pour un chef d’État lorsque la Cour demande à un État Partie au Statut de Rome d’arrêter et de remettre le chef d’État d’un autre État Partie. Bien que les mandats d’arrêt aient réduit le nombre de pays vers lesquels M. Al Bashir peut voyager en toute sécurité, il continue de se rendre dans de nombreux pays, y compris des États Parties à la CPI, sans être arrêté. Le 11 avril 2019, l’armée soudanaise a annoncé qu’elle l’avait évincé du pouvoir et arrêté. Après avoir déclaré qu’ils le transféreraient à la CPI, le gouvernement de transition composé des hauts responsables militaires et civils a décidé de le juger au Soudan pour des charges domestiques telles que le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et le meurtre de manifestants lors des manifestations anti-gouvernementales précédant son arrestation. Il a été transféré à la prison de Kober à Khartoum le 17 avril 2019 et purgerait apparemment une peine de deux ans pour sa condamnation pour corruption et blanchiment d’argent. Suite aux questions concernant sa libération de prison après l’éclatement des combats dans le pays en avril 2023, l’armée soudanaise a déclaré que M. Al Bashir était détenu dans un hôpital militaire sous la garde et la responsabilité de la police judiciaire. Cependant, malgré ces charges soulevées au Soudan, le mandat d’arrêt de la CPI reste en vigueur.

  1. Bahr Idriss Abu Garda est apparu volontairement devant la Chambre le 18 mai 2009. Après l’audience de confirmation des charges en février 2010, la Chambre préliminaire I a décidé de ne pas confirmer les charges et une demande ultérieure d’appel de la décision a été rejetée. M. Garda a depuis été libéré et son affaire est considérée comme close à moins que de nouvelles preuves ne soient présentées.

Dans l’affaire Procureur c. Abdallah Banda Abakaer Nourain, le 27 août 2009, la Cour a émis une convocation à comparaître à Abdallah Banda Abakaer Nourain et Saleh Mohammed Jerbo Jamis pour trois chefs de crimes de guerre commis lors d’une attaque contre la Mission de maintien de la paix de l’Union africaine au site militaire de Haskanita au Darfour (Soudan). M. Nourain est apparu volontairement devant la Chambre préliminaire I le 17 juin 2010. La Chambre préliminaire I a unanimement décidé le 7 mars 2011 de confirmer les charges de crimes de guerre portées contre M. Banda et M. Jerbo et de les renvoyer en procès. Cependant, après avoir reçu des preuves indiquant la mort de Jerbo, la Cour a mis fin aux procédures à son encontre le 4 octobre 2013. Bien que M. Banda se soit présenté volontairement durant la phase préliminaire de son affaire, les juges de la Chambre de première instance ont dû émettre un mandat d’arrêt le 11 septembre 2014 pour garantir sa présence au procès. L’accusé est toujours en fuite, et le procès commencera en attendant l’arrestation de l’accusé ou sa comparution volontaire.

Depuis l’émission d’un mandat d’arrêt en 2012, le suspect M. Abdel Rahman Muhammad Hussein était en fuite. Il s’est rendu volontairement à la CPI le 9 juin 2020 et a comparu le 15 juin 2020. Le 9 juillet 2021, la chambre préliminaire II a confirmé toutes les charges de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité portées par le Procureur à l’encontre de M. Al Al-Rahman. Les déclarations en clôture du procès ont eu lieu du 11 au 13 décembre 2024. Le jugement suit son cours.

République Centrafricaine (RCA) I

La RCA est un État Partie au Statut de Rome et a ratifié le Statut de Rome le 3 octobre 2001. La première situation référée le 22 décembre 2004 par le gouvernement de la RCA à la Cour concernait des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité commis dans le cadre d’un conflit en RCA entre 2002 et 2003. Le Bureau du Procureur (OTP) a ouvert une enquête préliminaire à la suite de cette référence et, le 22 mai 2007, il a ouvert une enquête formelle.

Un mandat d’arrêt contre M. Jean Pierre Bemba Gombo, l’ancien Président et Commandant en chef du Mouvement de libération du Congo, a été émis le 23 mai 2008. M. Bemba a été arrêté à Bruxelles par les autorités belges le 24 mai 2008. M. Bemba, la première personne à être arrêtée dans le cadre de l’enquête de la CPI en République Centrafricaine, a été transféré à La Haye le 3 juillet 2008. Le 20 novembre 2013, des mandats d’arrêt sous scellé ont été émis concernant diverses infractions à l’administration de la justice liées à des témoignages faussement présentés dans l’affaire Bemba pour laquelle il avait été arrêté en 2008. Les mandats concernent Aimé Kilolo Musamba et Jean-Jacques Mangenda Kabongo, anciens avocats de la défense de Jean-Pierre Bemba Gombo, Fidèle Babala Wandu, Député en RDC, et Narcisse Arido, un ressortissant de la RCA. Ils ont tous été arrêtés le même jour et transférés à la CPI, à l’exception de M. Arido qui a été transféré le 18 mars 2014. M. Jean Pierre Bemba Gombo également concerné par ce mandat d’arrêt, était déjà sous la garde de la CPI.

Deux affaires ont donc été portées devant la Cour : Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo et Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo, Aimé Kilolo Musamba, Jean-Jacques Mangenda Kabongo, Fidèle Babala Wandu et Narcisse Arido.

Le 12 janvier 2009, une audience de confirmation des charges de trois jours a eu lieu dans l’affaire Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo. En conséquence, la Chambre préliminaire II de la CPI a décidé le 15 juin 2009 que Bemba serait jugé. La Chambre a confirmé deux chefs de crimes contre l’humanité (viol et meurtre) et trois chefs de crimes de guerre (viol, meurtre et pillage) contre Bemba, renvoyant son affaire en procès. Le procès, Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo, prévu pour commencer le 14 juillet 2010, a été reporté en raison d’un appel en cours dans l’affaire. Le 19 octobre 2010, la Chambre d’appel de la CPI a rejeté l’appel de Bemba concernant la décision de poursuivre le procès, appel qu’il avait interjeté sur des motifs d’admissibilité. La Chambre de première instance III a ensuite fixé l’ouverture du procès au 22 novembre 2010. Le 6 juin 2011, la défense a déposé une demande de libération provisoire de l’accusé, que la Chambre de première instance III a rejetée le 26 septembre 2011. Le 21 mars 2016, la Chambre de première instance III a déclaré, à l’unanimité, Jean-Pierre Bemba Gombo coupable au-delà de tout doute raisonnable de tous les chefs d’accusation portés contre lui et, le 21 juin 2016, l’a condamné à 18 ans d’emprisonnement. Bemba a fait appel de la décision et, le 8 juin 2018, la Chambre d’appel l’a acquitté de toutes les charges. En soutien à cette décision, la Chambre d’appel a énuméré plusieurs erreurs procédurales et factuelles mettant en doute le respect de la norme de preuve par la chambre de première instance. De plus, la Chambre d’appel a considéré que ces erreurs factuelles et juridiques ont impacté les conclusions de la Chambre de première instance selon lesquelles Bemba n’avait pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables pour prévenir ou punir les crimes commis par ses soldats de l’MLC en RCA. La Chambre d’appel a jugé qu’un des éléments de la responsabilité de commandement en vertu de l’article 28(a) du Statut n’avait pas été correctement établi et, par conséquent, M. Bemba ne peut pas être tenu pénalement responsable en vertu de cette disposition pour les crimes commis par les troupes de l’MLC lors de l’opération en RCA de 2002-2003 (par. 45, 49, 191 et 194).

Devoir des Commandants

En mars 2019, la défense de M. Bemba a déposé une demande de compensation et de dommages-intérêts en vertu de l’article 85 du Statut de Rome. Le 18 mai 2020, la Chambre préliminaire II, désignée par la Présidence pour examiner la demande, a décidé qu’il n’avait pas droit à une compensation, n’ayant pas réussi à établir qu’il avait subi une grave et manifeste erreur judiciaire. La Chambre préliminaire a déclaré : « l’historique de rédaction et le droit international des droits de l’homme montrent cependant que les rédacteurs du Statut n’avaient jamais l’intention d’octroyer à une personne acquittée un droit à compensation simplement du fait que l’acquittement avait été précédé d’une période de détention, ou de la simple durée de la procédure, aussi longue soit-elle ; la durée de la procédure en soi, tant qu’il n’y a pas de grave et manifeste erreur judiciaire, n’est pas un facteur déclenchant un droit à compensation » (Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo, Affaire n° ICC-01/05-01/08, Décision sur la demande de compensation et de dommages-intérêts de M. Bemba, 18 mai 2020, par. 44) et « qu’il n’a jamais été prévu de remédier à des dommages de nature économique et financière qui ne résultent pas d’une grave et manifeste erreur judiciaire » (voir par. 61). L’affaire est désormais close.

La deuxième affaire dans cette situation, Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo, Aimé Kilolo Musamba, Jean-Jacques Mangenda Kabongo, Fidèle Babala Wandu et Narcisse Arido, a été ouverte le 20 novembre 2013 pour des infractions présumées à l’administration de la justice, spécifiquement pour avoir influencé de manière corruptrice des témoins de la défense, commises en lien avec la première affaire Bemba et en vertu de l’article 70 du Statut de Rome. La Chambre préliminaire II a confirmé les charges et renvoyé l’affaire en procès le 11 novembre 2014. La Chambre de première instance VII a commencé le procès le 29 septembre 2015 et, le 19 octobre 2016, a déclaré les cinq accusés coupables. La Chambre de première instance VII a condamné les accusés le 22 mars 2017 et tous les cinq ont fait appel de la décision. Le 8 mars 2018, la Chambre d’appel a confirmé les condamnations pour la plupart des charges. Cependant, la Chambre d’appel a acquitté Bemba, Kilolo et Mangenda de l’accusation de violation de l’article 70(1)(b) du Statut de Rome (qui interdit la présentation à la Cour de preuves que l’une des parties sait être fausses ou falsifiées), considérant que la disposition ne s’applique qu’aux preuves documentaires, et non à l’audition de témoins. Les cinq accusés ont été recondamnés le 17 septembre 2018. Les condamnations ainsi que les acquittements et les peines sont définitifs. Les peines d’emprisonnement, allant de six mois à 30 mois, ont été purgées.

RCA II

Une deuxième situation a été renvoyée par le gouvernement de la RCA à la Cour le 30 mai 2014 (RCA II). Le gouvernement demande à la Cour d’enquêter sur des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité présumés commis dans le contexte de la violence renouvelée à partir du 1er août 2012 jusqu’à aujourd’hui, impliquant les forces gouvernementales de la RCA sous la présidence de François Bozizé, le groupe armé rebelle Seleka, et le groupe armé rebelle anti-balaka.

Le 24 septembre 2014, après une enquête préliminaire, le Bureau du Procureur (OTP) a annoncé qu’une autre enquête serait ouverte en RCA pour des crimes présumés commis depuis 2012. Le 24 septembre 2014, le Bureau du Procureur a ouvert une enquête formelle. Le 11 novembre 2018, un mandat d’arrêt a été émis contre M. Alfred Yekatom, l’ancien caporal-chef des Forces Armées Centrafricaines et membre du parlement de la RCA, qui s’est rendu à la CPI six jours plus tard, le 17 novembre 2018. Un second mandat d’arrêt a été émis contre M. Patrice-Edouard Ngaïssona, le prétendu leader le plus senior et le « Coordinateur Général National » des Anti-Balaka, le 7 décembre 2018. M. Ngaïssona a été arrêté par les autorités françaises le 12 décembre 2018 et transféré à la CPI le 23 janvier 2019. Un troisième mandat d’arrêt a été émis le 10 décembre 2018 pour M. Maxime Jeoffroy Eli Mokom Gawaka, un ancien Coordonnateur National des Opérations des Anti-Balaka. Il s’est rendu à la CPI le 14 mars 2022. Le dernier mandat d’arrêt pour cette situation a été émis le 7 janvier 2019 pour un commandant Seleka, M. Mahamat Said Abdel Kani, qui s’est rendu à la CPI le 24 janvier 2021.

Dans la situation de la RCA II, il y a trois affaires : Procureur c. Alfred Yekatom et Patrice-Edouard Ngaïssona ; Procureur c. Mahamat Said Abdel Kani ; et Procureur c. Maxime Jeoffroy Eli Mokom Gawaka.

Le 20 février 2019, la Chambre préliminaire II a décidé de joindre les affaires de Yekatom et Ngaïssona. L’audience de confirmation des charges dans l’affaire Procureur c. Alfred Yekatom et Patrice-Edouard Ngaïssona a eu lieu du 19 au 25 septembre et le 11 octobre 2019. Les deux accusés ont ensuite été renvoyés en procès le 11 décembre 2019 avec des charges de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité partiellement confirmées par la Chambre préliminaire II. Le procès, Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo, a ouvert le 16 février 2021 devant la Chambre de première instance V et les preuves de l’accusation ont été présentées. Les témoignages des témoins de l’accusation sont actuellement en cours.

L’audience de confirmation des charges a eu lieu du 12 au 14 octobre 2021 dans l’affaire Procureur c. Mahamat Said Abdel Kani. Le 9 décembre 2021, la Chambre préliminaire II a partiellement confirmé les charges de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre et a renvoyé M. Said en procès. Le procès a commencé le 26 septembre 2022. Les déclarations de clôture ont eu lieu du 9 au 12 décembre 2024. Les juges ont commencé leurs délibérations.

Dans l’affaire Procureur c. Maxime Jeoffroy Eli Mokom Gawaka, des charges de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, commis entre le 5 décembre 2013 et avril 2014, ont été soulevées par le Procureur dans un mandat d’arrêt scellé émis le 10 décembre 2018. L’accusé a fait sa première comparution devant la Chambre préliminaire II le 22 mars 2022. L’audience de confirmation des charges a eu lieu du 22 au 24 août 2023 et la décision de la Chambre préliminaire sur la confirmation des charges était attendue pour décembre 2023. Cependant, le 16 octobre 2023, le Procureur a notifié à la Chambre préliminaire II sa décision de retirer toutes les charges contre l’accusé en vertu de l’article 61(4) du Statut de Rome et de libérer l’accusé. Le Procureur a déclaré qu’après avoir examiné l’ensemble des preuves dans l’affaire Mokom et constaté que plusieurs témoins clés sont indisponibles pour témoigner, il en est venu à la conclusion qu’il n’y avait plus de perspectives raisonnables de condamnation au procès même si les charges étaient confirmées. L’affaire est donc considérée comme close à moins que de nouvelles preuves ne soient présentées.

Il convient de souligner qu’en 2015, la RCA a créé (par la Loi Organique 15/003) un tribunal hybride, la Cour Pénale Spéciale (CPS), qui est intégré dans son système judiciaire national tout en appliquant un mélange de droit national et de droit international. La CPS est “autorisée à enquêter, poursuivre et juger les violations graves des droits humains et les violations graves du droit international humanitaire […] notamment le crime de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre” commis depuis le 1er janvier 2003 (art. 3, Loi Organique 15/003 [notre traduction]). Elle a commencé ses travaux en octobre 2018 suite à l’adoption de son Règlement de procédure et de preuve. Basée à Bangui, elle est composée de magistrats nationaux et internationaux qui ont été nommés par décret présidentiel le 19 janvier 2021. Elle opère en partenariat avec la mission de maintien de la paix des Nations Unies en RCA (MINUSCA) selon un protocole d’accord signé en Aout 2014. La CPS travaille en parallèle avec la CPI selon le principe de complémentarité et selon un protocole de coopération judiciaire conclu en octobre 2021 permettant le partage d’informations pertinentes.

Lybie

La Libye n’est pas État partie au Statut de Rome. Le 26 février 2011, le Conseil de sécurité des Nations Unies a décidé à l’unanimité de renvoyer la situation en Libye, peu après le début de la guerre civile libyenne le 15 février 2011, au Procureur de la CPI. Le 3 mars 2011, le Procureur de la CPI a annoncé sa décision d’ouvrir une enquête sur la situation en Libye, laquelle a été assignée par la Présidence à la Chambre préliminaire I.

Le 27 juin 2011, la Chambre préliminaire I a délivré trois mandats d’arrêt respectivement contre M. Muammar Mohammed Abu Minyar Gaddafi, alors Chef d’État libyen et Commandant des Forces armées libyennes ; M. Saif Al-Islam Gaddafi, Président d’honneur de la Fondation internationale de charité et de développement de Gaddafi et de facto Premier ministre libyen à l’époque ; et M. Abdullah Al-Senussi, ancien colonel des Forces armées libyennes et responsable du renseignement militaire pour crimes contre l’humanité (meurtres et persécutions) prétendument commis à travers la Libye depuis le 15 février 2011, par le biais des appareils d’État et des forces de sécurité. Le 22 novembre 2011, la Chambre préliminaire I a officiellement mis fin à l’affaire contre Muammar Gaddafi en raison de sa mort. Un quatrième mandat d’arrêt a été émis sous scellés le 18 avril 2013 et ouvert le 24 avril 2017 contre M. Al-Tuhamy Mohamed Khaled, ancien Général lieutenant de l’armée libyenne et ancien responsable de l’Agence de sécurité intérieure libyenne (ISA). M. Khaled a été accusé de crimes contre l’humanité prétendument commis en Libye du 15 février 2011 jusqu’au 24 août 2011 et de crimes de guerre prétendument commis en Libye à partir de début mars 2011 jusqu’au 24 août 2011. Les procédures ont été arrêtées le 7 septembre 2020 par la Chambre préliminaire I après notification du décès de l’accusé. À ce jour, le dernier mandat d’arrêt émis était le 15 août 2017 et à nouveau le 4 juillet 2018 pour M. Mahmoud Mustafa Busayf Al-Werfalli, Commandant dans la Brigade Al-Saiqa, concernant des meurtres en tant que crime de guerre ayant eu lieu à partir du 3 juin 2016 jusqu’au 17 juillet 2017 dans les environs de Benghazi, ainsi qu’à la mosquée Bi’at al-Radwan à Benghazi le 24 janvier 2018. Toutefois, suite à la notification de sa mort, la Chambre préliminaire I de la CPI a mis fin aux procédures dans cette affaire le 15 juin 2022.

Trois affaires ont donc été portées devant la Cour : Procureur contre Mahmoud Mustafa Busayf Al-Werfalli, Procureur contre Al-Tuhamy Mohamed Khaled et Procureur contre Saif Al-Islam Gaddafi. Suite aux décès de deux des accusés, seule l’affaire Gaddafi reste active devant la CPI.

Dans l’affaire Procureur contre Saif Al-Islam Gaddafi, les affaires ont été portées contre M. Al-Senussi et M. Saif Al-Islam Gaddafi. La Libye a contesté l’admissibilité de l’affaire Al-Senussi le 2 avril 2013, arguant que M. Al-Senussi était soumis à des procédures nationales par des autorités nationales compétentes. La Chambre préliminaire I a déclaré le 11 octobre 2013 que l’affaire était irrecevable devant la CPI. La défense a fait appel de cette décision, soulignant, entre autres arguments juridiques, que dans le cas de M. Al-Senussi, tout procès national en Libye entraînerait inévitablement l’imposition de la peine de mort (Réponse de la Défense à l’« Appel au nom de M. Abdullah Al-Senussi contre la ‘Décision concernant le report de l’exécution de la demande d’arrestation et de remise d’Abdullah Al-Senussi conformément à l’article 95 du Statut de Rome et demande connexe de la Défense de renvoyer la Libye au Conseil de sécurité des Nations Unies’ », 20 septembre 2013, par. 54). La CPI a rejeté l’appel et l’affaire contre M. Al-Senussi a été arrêtée le 24 juillet 2014. Les autorités libyennes ont condamné Al-Senussi à mort en 2015. Il reste en détention en Libye.

La Libye a également contesté l’admissibilité de l’affaire de M. Saif Al-Islam Gaddafi. Contrairement à l’affaire Al-Senussi, la Chambre préliminaire I a rejeté la contestation de la Libye dans l’affaire de Saif Al-Islam Gaddafi le 31 mai 2013, décision confirmée par la Chambre d’appel le 21 mai 2014. Le gouvernement libyen n’ayant pas respecté l’ordonnance de la Cour pour remettre le suspect à la CPI, une déclaration officielle de non-conformité du gouvernement libyen a été faite le 10 décembre 2014, et la question a été renvoyée au Conseil de sécurité des Nations Unies. En juillet 2015, un tribunal de Tripoli a condamné M. Saif Al-Islam Gaddafi à mort par contumace, ce qui a suscité une condamnation généralisée, Human Rights Watch affirmant que le procès était truffé de défauts juridiques et s’est déroulé dans un climat d’anarchie généralisée minant la crédibilité de la justice. En mai 2016, à la suite d’une réunion du Conseil de sécurité des Nations Unies sur la situation en Libye, le Procureur de la CPI a noté que M. Saif Al-Islam Gaddafi avait été continuellement détenu par la milice dans la ville libyenne de Zintan depuis 2011 et que les autorités libyennes avaient donc déclaré que Gaddafi était « indisponible » pour l’État. En juillet 2016, M. Saif Al-Islam Gaddafi a été libéré par la milice et a bénéficié d’une amnistie accordée par le gouvernement libyen. M. Gaddafi a fait appel de son cas devant la CPI sur le principe de Ne Bis in Idem, mais la CPI a rejeté son appel le 5 avril 2019.L’affaire reste en attente du transfert de l’accusé au siège de la Cour à La Haye .

Côte d’Ivoire

La Côte d’Ivoire est partie au Statut de Rome depuis le 15 février 2013. Elle a d’abord accepté la compétence de la CPI le 18 avril 2003 et a réaffirmé cet engagement plus récemment le 3 mai 2011. Le 3 octobre 2011, la Chambre préliminaire III a accordé la demande du Procureur d’ouvrir des enquêtes proprio motu sur la situation en Côte d’Ivoire concernant les crimes allégués relevant de la compétence de la Cour, commis depuis le 28 novembre 2010, ainsi que sur les crimes pouvant être commis ultérieurement dans ce contexte. L’enquête a été ultérieurement élargie pour inclure les preuves de crimes depuis le 19 septembre 2002.

Un premier mandat d’arrêt sous scellés a été émis le 23 novembre 2011 par la Chambre préliminaire III contre M. Laurent Koudou Gbagbo, alors président de la Côte d’Ivoire, pour quatre chefs de crimes contre l’humanité. Le mandat d’arrêt contre M. Gbagbo a été ouvert le 30 novembre 2011, lorsque le suspect a été transféré au centre de détention de la CPI à La Haye par les autorités ivoiriennes. Le 21 décembre 2011, un deuxième mandat d’arrêt sous scellés a été émis contre M. Charles Blé Goudé, un homme politique ivoirien. Le mandat d’arrêt a été ouvert le 30 septembre 2013, et il a été placé en détention par la CPI le 22 mars 2014. Un troisième mandat d’arrêt a été émis, également sous scellés, le 29 février 2012 par la Chambre préliminaire III contre Simone Ehivet Gbagbo, ancienne Première Dame de la Côte d’Ivoire et épouse de Laurent Koudou Gbagbo, pour quatre chefs de crimes contre l’humanité. Le mandat d’arrêt a été ouvert le 22 novembre 2012. Le 11 décembre 2014, la Chambre préliminaire I a rejeté le défi de la République de Côte d’Ivoire concernant l’admissibilité de l’affaire, concluant que les autorités ivoiriennes n’avaient pas pris de mesures tangibles, concrètes et progressives visant à déterminer si Simone Gbagbo était pénalement responsable des mêmes faits allégués dans l’affaire devant la Cour. La Chambre préliminaire I a rappelé à la Côte d’Ivoire son obligation de remettre Simone Gbagbo à la CPI sans délai. Cette décision a été portée en appel, et le 27 mai 2015, la Chambre d’appel a confirmé l’admissibilité de cette affaire devant la CPI. Mme Gbagbo n’a cependant jamais été remise à la CPI.

Trois affaires ont donc été portées devant la Cour dans cette situation : Procureur contre Laurent Gbagbo, Procureur contre Charles Blé Goudé, et Procureur contre Simone Gbagbo.

Dans l’affaire Procureur contre Laurent Gbagbo, la Chambre préliminaire III a tenu une audience de première comparution le 5 décembre 2011 et a fixé la date de l’audience de confirmation des charges contre M. Gbagbo au 18 juin 2012. Celle-ci a été reportée une première fois au 13 août 2012, puis à nouveau au 2 août 2012, jusqu’à ce que la question de l’aptitude de M. Gbagbo à y participer soit résolue. Entre-temps, la Cour a décidé le 23 février 2012 d’élargir le champ de l’enquête en Côte d’Ivoire pour inclure les crimes allégués commis entre le 19 septembre 2002 et le 28 novembre 2010.

Dans les affaires Procureur contre Laurent Gbagbo et Procureur contre Charles Blé Goudé, les charges pour quatre chefs de crimes contre l’humanité ont été confirmées contre M. Gbagbo le 12 juin 2014 et contre M. Blé Goudé le 11 décembre 2014. Le 11 mars 2015, la Chambre de première instance I a joint les deux affaires afin d’assurer l’efficacité et la rapidité des procédures, et l’affaire contre M. Gbagbo et Blé Goudé a ainsi été nommée Procureur contre Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. Leur procès a débuté le 28 janvier 2016. Le 15 janvier 2019, la Chambre de première instance I, à la majorité, a acquitté M. Gbagbo et M. Blé Goudé de tous les chefs d’accusation.

Concernant l’affaire Procureur contre Simone Gbagbo, le 19 juillet 2021, la Chambre préliminaire II a annulé le mandat d’arrêt contre Mme Gbagbo. Elle a conclu que « la ‘théorie du cas’ et le ‘matériel de soutien’ sous-jacents aux accusations portées contre elle ont été en grande partie testés lors du procès contre Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé, y compris en particulier les éléments contextuels des crimes contre l’humanité plaidés [et] que les développements au stade du procès et de l’appel de l’affaire de M. Gbagbo rendent évident que les preuves sur lesquelles le mandat d’arrêt contre Simone Gbagbo était fondé ne peuvent plus être considérées comme satisfaisant le seuil de preuve requis par l’article 58(1)(a) du Statut » (Procureur contre Simone Gbagbo, Affaire No. ICC-02/11-01/12, Décision sur la demande du Procureur visant à annuler l’effet du mandat d’arrêt émis contre Mme Simone Gbagbo, 19 juillet 2021, par. 13-14).

Toutes ces affaires sont désormais clôturées .

République du Kenya

Le Kenya est parti au Statut de Rome, qu’il a ratifié le 15 mars 2005. Le 31 mars 2010, la Chambre préliminaire II a accordé la demande du Procureur d’ouvrir une enquête proprio motu sur la situation au Kenya.

Le 8 mars 2011, six convocations à comparaître ont été émises concernant des accusations de crimes contre l’humanité commis dans le contexte des violences postélectorales de 2007-2008 au Kenya. Les convocations étaient adressées à M. Henry Kiprono Kosgey, ancien ministre de l’Industrialisation du Kenya ; M. Joshua Arap Sang, ancien animateur de radio ; M. William Samoei Ruto, ministre de l’Enseignement supérieur du Kenya et ancien membre du Parlement d’Eldoret North ; M. Francis Kirimi Muthaura, Chef du Service public et Secrétaire du Cabinet et Président du Comité consultatif national en matière de sécurité ; M. Mohamed Hussein Ali, ancien Commissaire de la Police du Kenya ; et M. Uhuru Muigai Kenyatta, Vice-Premier ministre et Ministre des Finances du Kenya.

Tous ont comparu volontairement devant la Chambre préliminaire II les 7 et 8 avril 2011. Les affaires concernant les six suspects ont été consolidées en deux affaires.

Le 2 août 2013, la CPI a émis un mandat d’arrêt sous scellés contre M. Walter Osapiri Barasa, journaliste et ancien intermédiaire entre le Bureau du Procureur de la CPI et les témoins kenyans dans l’enquête sur la situation au Kenya. Il était accusé de trois chefs d’infractions à l’administration de la justice, consistant à influencer ou tenter d’influencer de manière corruptrice trois témoins de la CPI concernant les affaires de la situation au Kenya. Le mandat d’arrêt a été ouvert le 2 octobre 2013 et le suspect est toujours en fuite. L’affaire reste au stade préliminaire, en attendant l’arrestation du suspect ou sa comparution volontaire devant la Cour.

Les derniers mandats d’arrêt ont été émis sous scellés le 10 mars 2015 contre M. Paul Gicheru et M. Philip Kipkoech Bett pour des infractions à l’administration de la justice consistant à influencer de manière corruptrice des témoins concernant les affaires de la situation au Kenya. Les mandats d’arrêt ont été ouverts le 10 septembre 2015. Le 2 novembre 2020, M. Gicheru s’est rendu aux autorités des Pays-Bas, tandis que M. Bett reste en fuite.

Cinq affaires ont été portées devant la CPI dans la situation du Kenya : Procureur contre William Samoei Ruto et Joshua Arap Sang, Procureur contre Uhuru Muigai Kenyatta, Procureur contre Walter Osapiri Barasa, Procureur contre Paul Gicheru, et Procureur contre Philip Kipkoech Bett.

Dans l’affaire Procureur contre William Samoei Ruto et Joshua Arap Sang, initialement impliquant trois suspects, la confirmation des charges a été décidée le 23 janvier 2012 avec la Chambre préliminaire II rejetant la confirmation des charges contre M. Kosgey après avoir conclu qu’il n’existait pas de motifs raisonnables de croire qu’il était un coauteur indirect des crimes allégués. Le procès devait commencer le 28 mai 2013 pour les accusés William Samoei Ruto et Joshua Arap Sang. Cependant, le 5 avril 2016, la Chambre de première instance V a décidé, à la majorité, de mettre fin à l’affaire après avoir évalué les preuves du Procureur, concluant qu’il n’y avait « pas de cas à répondre », sans préjudice d’une nouvelle poursuite à l’avenir.

Dans l’affaire Procureur contre Uhuru Muigai Kenyatta, qui impliquait initialement trois accusés, les charges ont été confirmées contre M. Muthaura et M. Kenyatta le 23 janvier 2012, les affaires ayant été renvoyées en procès. Les juges préliminaires ont refusé de confirmer les charges contre M. Ali. Le 11 mars 2013, le Procureur a retiré les charges contre M. Muthaura. En grande partie en raison du non-respect de la coopération de la part du gouvernement kenyan dans l’affaire de M. Kenyatta, les charges contre M. Kenyatta ont également été retirées le 5 décembre 2014 pour insuffisance de preuves, mais sans préjudice de la possibilité de porter une nouvelle affaire si des preuves supplémentaires devenaient disponibles. Le 13 mars 2015, la Chambre de première instance V(B) a mis fin aux procédures dans cette affaire, notant cependant que la Cour conserve sa compétence sur toute ingérence avec un témoin ou avec la collecte de preuves et que les mesures de protection ordonnées pour les témoins et les victimes continueraient.

Le 11 décembre 2020, la Chambre préliminaire A a séparé les affaires contre Paul Gicheru et Philip Kipkoech Bett.

Dans l’affaire Procureur contre Paul Gicheru, le 15 juillet 2021, la Chambre préliminaire A a confirmé les charges et renvoyé l’affaire en procès. Le procès a commencé le 15 février 2022 devant la Chambre de première instance III et les plaidoiries finales ont eu lieu le 27 juin 2022. Cette affaire a été arrêtée le 14 octobre 2022 suite au décès de l’accusé.

Les affaires Procureur contre Walter Osapiri Barasa et Procureur contre Philip Kipkoech Bett sont encore au stade préliminaire, car les deux accusés ne sont pas en détention à la CPI. Elles resteront à ce stade jusqu’à ce qu’ils soient arrêtés et transférés au siège de la Cour à La Haye.

République du Mali

Le Mali est État Partie au Statut de Rome et a ratifié ce dernier le 16 août 2000. Le 16 janvier 2013, le Bureau du Procureur a ouvert une enquête sur les crimes allégués commis sur le territoire du Mali depuis janvier 2012. Cette enquête a suivi une enquête préliminaire ouverte le 18 juillet 2012 après l’auto-saisine de la Cour reçue le 13 juillet 2012 du gouvernement malien concernant des crimes atroces commis pendant un conflit armé entre les forces gouvernementales maliennes, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), et des groupes armés musulmans tels qu’Al-Qaeda au Maghreb islamique (AQMI) et Ansar Dine. Le conflit armé a eu lieu du 17 janvier 2012 à aujourd’hui.

Deux mandats d’arrêt ont été émis par la Cour. Le 18 septembre 2015, la Cour a émis un mandat d’arrêt contre M. Ahmad Al Faqi Al Mahdi pour des crimes de guerre, notamment pour avoir dirigé intentionnellement des attaques contre des sites religieux et historiques. Il a été transféré à la CPI le 26 septembre 2015. Le 27 mars 2018, la Cour a émis un deuxième mandat d’arrêt contre M. Al-Hassan Ag Abdul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud, qui est accusé de plusieurs chefs de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. Les autorités maliennes ont remis Al-Hassan à la CPI le 31 mars 2018.

Deux affaires ont été ouvertes devant la CPI dans la situation au Mali : Procureur contre Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud et Procureur contre Ahmad Al Faqi Al Mahdi.

Dans l’affaire Procureur contre Ahmad Al Faqi Al Mahdi, les charges de co-perpétration de crimes de guerre pour avoir dirigé intentionnellement des attaques contre des bâtiments religieux et historiques à Tombouctou, Mali, en juin et juillet 2012 ont été confirmées le 24 mars 2016. L’affaire a été renvoyée en procès. Le procès s’est tenu du 22 au 24 août 2016, au cours duquel Al Mahdi a reconnu sa culpabilité. Le 27 septembre 2016, la Chambre de première instance VIII a déclaré M. Al Mahdi coupable des charges retenues contre lui et l’a condamné à neuf ans de prison. C’est la première fois que la CPI se prononce sur des crimes de guerre commis contre des objets et bâtiments religieux, artistiques et historiques protégés. La Cour a émis une ordonnance de réparations le 17 août 2017 pour un montant de 2,7 millions d’euros pour des réparations individuelles et collectives pour la communauté de Tombouctou. Cette ordonnance a été largement confirmée par la Chambre d’appel le 8 mars 2018. Le 25 novembre 2021, la peine de M. Al Mahdi a été réduite à deux ans par la Chambre d’appel et il a terminé sa peine d’emprisonnement le 18 septembre 2022.

Dans l’affaire Procureur contre Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud, les charges ont été confirmées le 30 septembre 2019 et le procès a commencé le 14 juillet 2020. Les charges de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité dans cette affaire sont nombreuses. Plus que dans toute autre affaire devant la CPI, elle soumet les dirigeants rebelles à un examen judiciaire. Les plaidoiries finales ont eu lieu du 23 au 25 mai 2023 et les juges ont commencé leurs délibérations. Le 26 juin 2024, M. Al Hassan a été reconnu coupable de crimes de guerre et crimes contre l’humanité par la Chambre de première instance et la peine a été fixé à 10 ans d’emprisonnement le 20 novembre 2024. Le 10 décembre 2024, la Chambre de première instance a rendu une ordonnance concernant les réparations.

Géorgie

La Géorgie a ratifié le Statut de Rome le 5 septembre 2003. Le 27 janvier 2016, la Chambre préliminaire I a autorisé le Procureur à procéder à une enquête proprio motu sur des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, supposément commis en Géorgie et autour de l’Ossétie du Sud entre le 1er juillet et le 10 octobre 2008. La phase d’enquête a été conclue le 16 décembre 2022.

Le 30 juin 2022, trois mandats d’arrêt ont été émis contre M. Mikhail Mayramovich Mindzaev, M. Gamlet Guchmazov et M. David Georgiyevich Sanakoev pour des accusations de détention illégale, de torture et de mauvais traitements, de prise d’otages et de transfert illégal subséquent de civils géorgiens ethniques dans le contexte d’une occupation par la Fédération de Russie.

Burundi

Le Burundi a ratifié le Statut de Rome le 21 septembre 2004, mais a par la suite retiré sa ratification. La CPI peut donc exercer sa compétence sur les crimes listés dans le Statut de Rome commis sur le territoire du Burundi ou par ses ressortissants entre le 1er décembre 2004 et le 26 octobre 2017.

Le 25 avril 2016, après avoir reçu des communications concernant des crimes présumés commis au Burundi, le Bureau du Procureur de la CPI (OTP) a ouvert un examen préliminaire. La Chambre préliminaire III a ensuite autorisé le Procureur à ouvrir une enquête proprio motu le 25 octobre 2017. L’enquête en cours concerne la situation au Burundi ainsi qu’en dehors du Burundi pour des crimes commis par ses ressortissants entre le 1er décembre 2004 et le 26 octobre 2017, date à laquelle le Burundi a retiré sa ratification du Statut de Rome. Le Procureur enquête sur des crimes contre l’humanité présumés, y compris les meurtres, les viols, la torture, les disparitions forcées et les persécutions.

Il convient de rappeler qu’un État ne se libère pas, en raison de son retrait, de ses obligations en vertu du Statut de Rome, y compris le devoir de coopérer avec les enquêtes et procédures commencées avant la date à laquelle le retrait est devenu effectif, conformément à l’article 127(2) du Statut de Rome. L’enquête est toujours en cours.

Bangladesh/Myanmar

Le Bangladesh a ratifié le Statut de Rome le 23 mars 2010. Le 14 novembre 2019, la Chambre préliminaire III a autorisé le Procureur à procéder à une enquête sur des crimes présumés commis à partir du 1er juin 2010, notamment des crimes contre l’humanité tels que la déportation et la persécution, supposément commis contre la population rohingya du Myanmar ayant trouvé refuge au Bangladesh. Ces crimes ont été commis en partie sur le territoire du Bangladesh ce qui pourrait justifier la compétence de la CPI tant que ces crimes sont suffisamment liés à la situation.

Le 27 novembre 2024, le procureur de la CPI A.A. Khan a déposé une requête aux fins de délivrance d’un mandat d’arrêt contre le Général min Aung Hlaing, commandant en chef des forces de défense du peuple birman, qui dirige le pays, pour les crimes présumés contre l’humanité de déportation et de persécution commis à l’encontre des rohingya. La requête est en instance devant la Chambre préliminaire I.

Afghanistan

L’Afghanistan est Partie au Statut de Rome depuis le 10 février 2003. Après avoir reçu des communications depuis juin 2006 concernant des crimes atroces présumés commis en Afghanistan, le Procureur a rendu publique une enquête préliminaire en 2007. Le 12 avril 2019, la Chambre préliminaire II a rejeté la demande du Procureur et a décidé de ne pas autoriser l’ouverture d’une enquête, arguant que celle-ci ne serait pas « dans l’intérêt de la justice » pour plusieurs raisons, notamment le temps considérable écoulé depuis le début de l’examen préliminaire en 2006 et le manque de coopération attendu des États impliqués. Le 5 mars 2020, la Chambre d’appel a décidé à l’unanimité d’autoriser le Procureur à ouvrir une enquête. La Chambre d’appel a jugé que la Chambre préliminaire avait commis une erreur en évaluant si une enquête était dans les « intérêts de la justice ».

Le Procureur a donc été autorisé à commencer une enquête sur les crimes présumés commis sur le territoire de l’Afghanistan depuis le 1er mai 2003, ainsi que sur d’autres crimes allégués ayant un lien avec le conflit armé, suffisamment liés à la situation en Afghanistan et commis sur le territoire d’autres États Parties au Statut de Rome depuis le 1er juillet 2002.

En avril 2020, l’Afghanistan a déposé une demande en vertu de l’article 18 du Statut de Rome, demandant au Procureur de « différer aux enquêtes et procédures nationales de l’Afghanistan », que l’Afghanistan affirme couvrir « les allégations de crimes commis par les forces afghanes, les Talibans et les groupes apparentés, d’autres groupes terroristes et les forces internationales ». L’Afghanistan a fourni des informations confidentielles supplémentaires sur les procédures nationales en juin 2020, lesquelles étaient en cours d’examen par le Procureur.

Le 31 octobre 2022, la Chambre préliminaire II a autorisé le Procureur à reprendre l’enquête sur la situation en Afghanistan. Les juges ont estimé que l’Afghanistan ne menait actuellement pas d’enquêtes sérieuses d’une manière qui justifierait un renvoi des enquêtes de la Cour et que les autorités afghanes ne manifestaient pas d’intérêt pour poursuivre la demande de renvoi qu’elles avaient soumise le 26 mars 2020. Le 4 avril 2023, la Chambre d’appel de la CPI a élargi la portée de l’enquête pour correspondre aux objectifs initiaux du Procureur, incluant les crimes commis en Afghanistan et d’autres Etats parties liés au conflit. Par la suite, six pays (Chili, Costa Rica, Espagne, France, Luxembourg, Mexique) ont saisi le Bureau du Procureur concernant la situation en Afghanistan. Suite à la réception de cette saisine, le Procureur a confirmé que l’enquête est toujours active au sujet des crimes présumés décrits dans la saisine.

Le 23 janvier 2025, le Procureur de la CPI, a déposé deux requêtes aux fins de délivrance de mandat d’arrêt pour le crime contre l’humanité de persécution liée au genre, en vertu de l’article 7-1-h du Statut de Rome, à l’encontre du chef suprême des talibans, Haibatullah AKHUNDZADA, et du président de la Cour suprême de « l’émirat islamique d’Afghanistan », Abdul Hakim HAQQANI. Les requêtes sont en instance devant la Chambre préliminaire II.

État de Palestine

La Palestine est Partie au Statut de Rome et a ratifié le Statut de Rome le 2 janvier 2015. Le 22 janvier 2009, l’Autorité palestinienne a soumis une déclaration reconnaissant la compétence de la CPI pour les crimes atroces présumés commis sur son territoire.

Après réception de la déclaration, le Procureur a ouvert un examen préliminaire. Dans son rapport de novembre 2012, le Bureau du Procureur a décidé qu’en raison du statut de la Palestine aux Nations Unies en tant qu’”entité observatrice”, la déclaration ne pouvait être acceptée et il a fermé l’examen préliminaire. Dans son rapport de novembre 2013, le Bureau du Procureur a décidé qu’à partir du 29 novembre 2012, en raison du nouveau statut d’”État observateur non-membre” de la Palestine aux Nations Unies, une nouvelle déclaration pouvait être acceptée. Le 1er janvier 2015, le gouvernement palestinien a soumis une nouvelle déclaration reconnaissant la compétence de la CPI pour les crimes atroces commis sur son territoire depuis le 13 juin 2014.

Le 16 janvier 2015, après avoir reçu la nouvelle déclaration, le Procureur a ouvert un examen préliminaire.

Le 3 mars 2021, le Procureur a annoncé l’ouverture d’une enquête sur la situation dans l’État de Palestine. Cela a suivi la décision de la Chambre préliminaire I du 5 février 2021, affirmant que la Cour pouvait exercer sa compétence pénale dans cette situation et que, à la majorité, le champ territorial de cette compétence s’étend à Gaza et en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est. Par conséquent, la compétence de la CPI est établie, et l’enquête est en cours sur les crimes présumés commis depuis 2014 sur le territoire palestinien, y compris le territoire occupé. La décision de la Chambre d’appel de 2021 a précisé que : « [Les] conclusions de cette décision sont limitées à la définition des paramètres territoriaux de l’enquête du Procureur conformément au Statut » et que « en statuant sur la portée territoriale de sa compétence, la Cour ne juge ni un litige frontalier en vertu du droit international ni ne préjuge de la question de futures frontières [de l’État de Palestine] » (Situation dans l’État de Palestine, Affaire n° ICC-01/18, Décision sur la demande de la Procureur en vertu de l’article 19(3) pour une décision sur la compétence territoriale de la Cour en Palestine, 5 février 2021, para. 130).

Le 30 octobre 2023, suite aux attaques du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 et au déclenchement d’une nouvelle phase du conflit armé entre Israël et le Hamas à Gaza, le Procureur a réaffirmé la compétence de la CPI et l’enquête en cours par une équipe dédiée sur les crimes commis par les deux parties au conflit armé actuel .

Dans cette affaire, le procureur a déposé le 20 mai 2024, des requêtes en vue de la délivrance de mandat d’arrêts contre des dirigeants palestiniens et israéliens auprès de la chambre préliminaire I.

Du côté palestinien, ces mandats visaient trois dirigeants du Hamas : M. Yahya Sinwar chef du Hamas dans la bande de Gaza et M. Ismail Haniyeh, ancien chef de la branche politique du Hamas ainsi que Mohammed Diab Ibrahim Al-Masri commandant en chef de la branche militaire du Mouvement de résistance islamique « Hamas » connu sous le nom de brigades « Al-Qassam ». Les trois sont poursuivis pour les crimes contre l’humanité de meurtre, extermination, torture, viol et autres formes de violence sexuelle, ainsi que pour des crimes de guerre de meurtre, traitements cruels, torture, prises d’otages, atteintes à la dignité de la personne, viol et autres formes de violence sexuelles. Par suite du décès de MM Sinwar et Haniyeh, seul M Mohammed Diab Ibrahim Al-Masri fait l’objet de poursuite devant la CPI.

Du côté israélien, les deux mandats d’arrêt visaient le Premier ministre et le ministre de la Défense israéliens : MM Benyamin Netanyahou et Yoav Gallant pour des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre commis depuis le 8 octobre 2023 et jusqu’au 20 mai 2024 au moins. Le crime de guerre concerne le fait d’affamer des civils comme méthode de guerre. Les crimes contre l’humanité s’appliquent au meurtre à la persécution et autres actes inhumain contre la population civile de Gaza.

Le 26 septembre 2024 l’Etat d’Israël a présenté deux demandes aux fins de contester la compétence de la CPI vis-à-vis de la situation dans l’Etat de Palestine en général et des ressortissants israéliens en particulier.

Le 21 novembre 2024 la chambre préliminaire de la CPI a rejeté à l’unanimité les deux demandes israéliennes. Ce même jour elle a confirmé les mandats émis par le Procureur contre Mohammed Diab Ibrahim Al-Masri, Benyamin Netanyahou et Yoav Gallant.

République des Philippines

Les Philippines ont ratifié le Statut de Rome le 30 août 2011, mais le 17 mars 2018, le gouvernement des Philippines a déposé une notification écrite de retrait du Statut, qui est entrée en vigueur le 17 mars 2019. Toutefois, la Cour conserve sa compétence pour les crimes présumés qui se sont produits aux Philippines pendant la période où elle était Partie au Statut, soit du 1er novembre 2011 au 16 mars 2019.

L’examen préliminaire de la situation aux Philippines se concentre sur les crimes atroces présumés commis depuis le 1er juillet 2016 dans le cadre de la campagne de “guerre contre la drogue” du gouvernement des Philippines.

La Chambre préliminaire I a autorisé l’ouverture d’une enquête le 15 septembre 2021, soulignant que, « sur la base des faits tels qu’ils émergent à présent et sous réserve de l’enquête appropriée et d’une analyse plus approfondie, la soi-disant campagne de “guerre contre la drogue” ne peut pas être considérée comme une opération de maintien de l’ordre légitime, et les meurtres discutés ci-dessus ne peuvent pas être considérés comme légitimes ou simplement comme des excès dans une opération par ailleurs légitime, et que “[l]es éléments disponibles indiquent plutôt qu’une attaque contre la population civile au sens de l’article 7(2)(a) du Statut a eu lieu.” Le 18 novembre 2021, la République des Philippines a demandé, conformément à l’article 18(2) du Statut de Rome, le report de l’enquête sur la situation aux Philippines.

Le 26 janvier 2023, après une analyse minutieuse des éléments fournis par les Philippines, la Chambre préliminaire I a accordé la demande du Procureur de reprendre l’enquête sur la situation de la République des Philippines, considérant que les Philippines ne conduisaient pas d’enquêtes effectives justifiant le report des enquêtes de la Cour sur la base du principe de complémentarité. Le 18 juillet 2023, cette décision a été confirmée par la Chambre d’appel de la CPI, qui a débouté les Philippines de leur appel.

Le 7 mars 2025, la Chambre préliminaire I de la CPI a délivré un mandat d’arrêt contre M. Rodrigo Roa Duterte, ancien Président des Philippines et ancien maire de Davao, pour le crime contre l’humanité de meurtre, qui aurait été commis aux philippines entre le 1er novembre 2011 et le 16 mars 2019.

Le 12 mars 2025, M. Duterte a été remis à la CPI, après avoir été arrêté par les autorités de la République des Philippines en exécution du mandat d’arrêt.

Venezuela I

La Cour pénale internationale (CPI) a compétence au Venezuela pour les crimes commis depuis le 1er juillet 2002, car le pays a ratifié le Statut de Rome le 7 juin 2000.

Le 28 septembre 2018, la Présidence de la CPI a attribué la situation au Venezuela à la Chambre préliminaire I, suite à la demande du 27 septembre 2018 d’un groupe d’États Parties à la CPI (Argentine, Canada, Colombie, Chili, Paraguay et Pérou) sollicitant l’ouverture d’une enquête sur les crimes contre l’humanité présumés commis sur le territoire du Venezuela depuis le 12 février 2014.

La situation a ensuite été réattribuée à la Chambre préliminaire III par le Procureur le 19 février 2020.Dans son rapport du 14 décembre 2020, le Bureau du Procureur (OTP) a annoncé avoir terminé son évaluation de fond de la situation au Venezuela I et conclu qu’il existait des bases raisonnables de croire que des crimes contre l’humanité (privation de liberté, torture, viol et/ou autres actes de violence sexuelle, et persécution pour des motifs politiques) avaient été commis au Venezuela depuis au moins avril 2017. Le Bureau du Procureur a demandé des informations au gouvernement du Venezuela sur toute procédure nationale pertinente à ces crimes. Le Venezuela a demandé le 16 avril 2022 que la CPI suspende les enquêtes en faveur des actions menées par ses autorités nationales, conformément au principe de complémentarité prévu par l’article 18 du Statut de Rome. Le 27 juin 2023, la Chambre préliminaire I a autorisé la reprise de l’enquête par le Procureur, suite à sa demande du 1er novembre 2022. Le 1er mars 2024, la Chambre d’appel a rejetée l’appel par la république bolivarienne du Venezuela contre la décision de la Chambre préliminaire I du 27 juin 2023 et confirmé la décision autorisant la reprise de l’enquête.

Venezuela II

Le 13 février 2020, le Venezuela a soumis plainte à la CPI concernant les sanctions imposées par les États-Unis. L’examen préliminaire de la situation au Venezuela II porte sur les crimes contre l’humanité présumés commis sur le territoire du Venezuela, dans but de déterminer si une ou plusieurs personnes doivent être accusées de la commission de ces crimes. Dans sa demande, le Venezuela a déclaré que ces crimes résultaient des sanctions imposées par les États-Unis, lesquelles auraient entraîné une augmentation de la mortalité adulte et infantile, ainsi qu’un impact négatif sur les droits humains tels que le droit à l’alimentation, l’accès aux soins médicaux et à l’éducation.

En vertu de l’article 53(1) du Statut de Rome, le Procureur doit examiner les questions de compétence, d’admissibilité et d’intérêt de la justice pour décider de la nécessité d’ouvrir une enquête sur une situation. Dans son rapport du 14 décembre 2020, le Bureau du Procureur a indiqué qu’il avait l’intention de conclure son évaluation de la compétence matérielle de la situation au Venezuela II au cours du premier semestre 2021, mais aucune information supplémentaire n’a été communiquée depuis. Le 10 juin 2023, le Procureur a annoncé avoir signé un protocole d’accord établissant un bureau au Venezuela pour élargir l’interface nationale pour le travail de la CPI et améliorer les initiatives nationales en matière de justice.

L’examen préliminaire de la situation au Venezuela II est toujours en phase d’évaluation de la compétence matérielle .

Ukraine

Bien que l’Ukraine ne soit pas Partie au Statut de Rome, elle a exercé deux fois (les 9 avril 2014 et 8 septembre 2015) son droit d’accepter la compétence de la Cour pénale internationale (CPI) pour les crimes allégués relevant du Statut de Rome se produisant sur son territoire, conformément à l’article 12(3) du Statut de Rome.

L’examen préliminaire de la situation en Ukraine par la CPI s’est concentré sur les crimes atroces présumés commis au cours des deux situations suivantes :

La crise politique ukrainienne de 2014, également connue sous le nom de manifestations de Maïdan, impliquant les forces gouvernementales ukrainiennes et les manifestants anti-gouvernementaux pro-européens (se déroulant du 21 novembre 2013 au 22 février 2014).

Les conflits armés séparatistes en Ukraine avec la Crimée, Donetsk et Luhansk, impliquant les forces gouvernementales ukrainiennes, les groupes armés anti-gouvernementaux pro-russes et les forces gouvernementales russes (depuis le 20 février 2014 jusqu’à aujourd’hui).

Le 28 février 2022, à la suite de l’intervention militaire directe de la Russie en Ukraine lancée le 24 février 2022, le Procureur de la CPI a annoncé son intention de demander l’autorisation d’ouvrir une enquête proprio motu sur la situation en Ukraine, englobant tout nouveau crime allégué relevant de la compétence de la Cour.

Le 2 mars 2022, à la suite du renvoi officiel de la situation par la Lituanie et 38 autres États Parties au Statut de Rome (conformément à l’article 14), demandant une enquête sur les allégations passées et présentes de crimes de guerre, crimes contre l’humanité ou génocide commis sur n’importe quelle partie du territoire ukrainien par quiconque depuis le 21 novembre 2013, le Procureur a annoncé l’ouverture de l’enquête en Ukraine sur cette nouvelle base légale.

Le 17 mars 2023, la Chambre préliminaire II a émis deux mandats d’arrêt à l’encontre de M. Vladimir Vladimirovich Poutine, Président actuel de la Fédération de Russie, et de Mme Maria Alekseyevna Lvova-Belova, Commissaire aux droits de l’enfant de la Fédération de Russie, pour des allégations de crimes de guerre liés à la déportation illégale de population (enfants) et au transfert illégal de population (enfants) des zones occupées d’Ukraine vers la Fédération de Russie.

Le 5 mars 2024, la Chambre préliminaire II a émis deux autres mandats d’arrêt à l’encontre de M. Sergei Ivanovich Kobylash, lieutenant-général des forces armées russes et M.Viktor Nikolayevich Sokolov, amiral de la marine russe pour des allégations de crime de guerre consistant à diriger des attaques contre des biens de caractère civil, de crime de guerre consistant à causer incidemment des dommages excessifs à des civils ou à des biens de caractère civil, ainsi que de crime contre l’humanité d’actes inhumains.

Le 24 juin 2024, la Chambre préliminaire II a encore émis deux autres mandats d’arrêt à l’encontre de M. Sergei Kuzhugetovich Shoigu, Ministre de la défense de la Fédération de Russiev, et M. Valery Vasilyevich Gerasimov, Chef d’état-major général des forces armées et Premier vice-ministre de la défense de la Fédération de Russie pour des allégations de crime de guerre liées aux attaques dirigés contre des biens de caractère civil, de crime de guerre consistant à cause des dommages incident excessifs à des civils ou à des biens de caractère civil, et le crime contre l’humanité d’actes inhumains. La phase d’enquête est toujours en cours .

EXAMENS PRELIMINAIRES

Nigeria

Le Nigéria est un État Partie au Statut de Rome et a ratifié ce traité le 27 septembre 2001. Le 18 novembre 2010, après avoir reçu des communications concernant des crimes atroces présumés commis au Nigéria, le Procureur a annoncé l’ouverture d’un examen préliminaire. Cet examen a porté sur les crimes présumés de Boko Haram depuis 2009 et les crimes présumés des forces de sécurité nigérianes durant le conflit armé non international depuis 2011, mais il a également examiné potentiellement des informations sur des crimes en dehors du contexte de conflit armé.

Dans un rapport d’août 2013, le Bureau du Procureur a déterminé qu’il existait des motifs raisonnables de croire que Boko Haram avait commis des crimes contre l’humanité. Dans un rapport de novembre 2015, le Bureau du Procureur a identifié huit groupes potentiels d’allégations impliquant des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre commis par Boko Haram (et les forces de sécurité nigérianes). Dans son rapport de 2019, le Procureur a identifié deux autres types de crimes potentiels : les attaques présumées de Boko Haram contre le personnel ou les objets impliqués dans l’assistance humanitaire et le recrutement et l’utilisation présumés d’enfants soldats par les forces de sécurité nigérianes.

Dans son rapport de décembre 2020 sur les activités d’examen préliminaire, le Bureau du Procureur a détaillé la conclusion de son évaluation de l’admissibilité de la situation au Nigéria, concluant que les affaires potentielles découlant de cette situation seraient probablement admissibles. Il a déterminé que les enquêtes et procédures nationales au Nigéria avaient été limitées en portée et en profondeur, constatant que les procédures contre Boko Haram ne couvraient pas substantiellement la même conduite alléguée ou visaient des auteurs de bas niveau, et que les procédures contre les forces de sécurité nigérianes étaient soit absentes, soit ne démontraient pas de mesures concrètes et progressives de la part des autorités.

Le 11 décembre 2020, le Procureur a annoncé la conclusion de son examen préliminaire de la situation au Nigéria. Le dossier est en attente de la décision du Procureur de demander l’autorisation d’une Chambre préliminaire pour l’ouverture d’une enquête. En avril 2022, dès la prise de fonction du nouveau Procureur Karim Khan, celui-ci a entamé un dialogue avec les autorités nigérianes pour évaluer la situation au regard du principe de complémentarité entre les tribunaux kenyans et la CPI, Depuis, les autorités nationales ont fourni au Bureau des informations supplémentaires sur les procédures nationales concernées. En mars 2024, le Procureur adjoint s’est rendu au Nigéria pour rappeler que la CPI restait déterminée à faire avancer les enquêtes en l’absence d’efforts de la part des autorités nigérianes pour remédier aux disparités existantes en matière d’impunité.

République de Lituanie/République de Bélarus

La Lituanie est partie au Statut de Rome depuis 2003. Le 30 septembre 2024 elle a saisi le Bureau du Procureur sur la base de l’article 14.1 du Statut pour demander l’ouverture d’une enquête sur les crimes contre l’humanité qui auraient été commis depuis le 1 mai 2020dans la République du Belarus qui n’est pas parti au statut de Rome. La Lituanie que les éléments de ces crimes présumés ont été commis en partie sur le territoire de la Lituanie. Le Bureau du Procureur procède à un examen préliminaire pour analyser les informations disponibles et déterminer s’il existe une base raisonnable d’ouvrir une enquête mais aussi pour examiner les questions de compétence, de recevabilité et d’intérêt de la justice.

AgressionEnfantsGénocideDroits de l’hommeImmunitéRecours individuelTribunaux pénaux internationauxImprescriptibilitéNon-rétroactivitéSanctions pénales en droit humanitaireViolRéparation (Indemnisation)Conseil de sécurité de l’ONUCrimes de guerre/Crimes contre l’humanitéFemmes

➔ Liste des États Parties aux Conventions en Droit International Humanitaire et en Droits de l’Homme (n° 31)

**Jurisprudence

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La jurisprudence de la CPI a permis de clarifier l’interprétation et l’application de nombreuses dispositions juridiques. La jurisprudence de la CPI concernant les concepts juridiques du droit international humanitaire est présentée dans des sections thématiques pertinentes telles que ➔ Attaques (contre des civils), Enfants, Devoir des commandants, Garanties judiciaires, Viol, Responsabilité, Réparation (indemnisation), Crimes de guerre/Crimes contre l’humanité.

Les sujets mentionnés ci-dessous sont directement liés au fonctionnement de la CPI : 1) la recevabilité de la compétence ; 2) l’utilisation et l’abus de documents confidentiels et de témoignages par la CPI ; 3) la protection des victimes et des témoins ; 4) la réparation pour les victimes et 5) l’appel.

L’article 19(1) du Statut de Rome indique que : « La Cour s’assure qu’elle est compétente pour connaître de toute affaire portée devant elle ». En général, il incombe à la Chambre préliminaire de déterminer si les conditions préalables à l’exercice de la compétence de la Cour sont réunies. Un certain nombre de décisions des Chambres préliminaires citent directement l’article 19(1), y compris les décisions dans :

  • l’affaire Bemba (Le Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo, Affaire n° ICC-01/05-01/08-424, Décision prise en vertu de l’article 61(7)(a) et (b) du Statut de Rome sur les charges du Procureur contre Jean-Pierre Bemba Gombo, 15 juin 2009, para. 22) ;
  • l’affaire Kenyatta (Le Procureur c. Francis Kirimi Muthaura, Uhuru Muiai Kenyatta et Mohammed Hussein Ali, Affaire n° ICC-01/09-02/11-382-Red, Décision relative à la confirmation des charges en application de l’article 61 7 a) et b) du Statut de Rome, 23 janvier 2012, par. 22) ;
  • l’affaire Gbagbo (Le Procureur c. Laurent Gbagbo, Affaire n° ICC-02/11-01/11-656-Red, Décision sur la confirmation des charges à l’encontre de Laurent Gbagbo, 12 juin 2014, para. 18) ; et
  • l’affaire Ruto (Le Procureur c. William Samoei Ruto, Henry Kiprono Kosgey et Joshua Arap Sang, Affaire n° ICC-01/09-01/11, Décision sur la confirmation des charges conformément à l’article 61(7)(a) et (b) du Statut de Rome, 23 janvier 2012, para. 23).

En plus de se référer à l’article 19(1) de manière générale, la CPI a, à plusieurs reprises, expliqué les conditions préalables de manière plus détaillée. Plus particulièrement, la Cour a expliqué les conditions préalables dans :

-l’affaire Lubanga (Situation en République démocratique du Congo, Affaire n° ICC-01/04, Décision relative aux demandes de participation à la procédure, 17 janvier 2006, paras. 83-93);

-la situation en République du Kenya (Décision prise en application de l’article 15 du Statut de Rome sur l’autorisation d’ouvrir une enquête sur la situation en République du Kenya, 31 mars 2010) ;

-l’affaire Al Mahdi (Le Procureur c. Ahmad Al Faqi Al Mahdi, Affaire n° ICC-01/12-01/15, Décision relative à la confirmation des charges retenues contre Ahmad Al Faqi Al Mahdi, 24 mars 2016, paragraphe 2) ;

-l’affaire Gbagbo, (Le Procureur c. Charles Blé Goudé, Affaire n° ICC-02/11-02/11-186, Décision sur la confirmation des charges à l’encontre de Blé Goudé, 11 décembre 2014, para. 11 ; Le Procureur c. Laurent Gbagbo, affaire n° ICC-02/11-01/11, Décision relative à la confirmation des charges à l’encontre de Laurent Gbagbo, 12 juin 2014, para. 18) ; et

-l’affaire Kenyatta (Le Procureur c. Francis Kirimi Muthaura, Uhuru Muigai Kenyatta et Mohammed Hussein Ali, Affaire n° ICC-01/09-02/11-382-Red, Décision relative à la confirmation des charges en application de l’article 61(7)(a) et (b) du Statut de Rome, 23 janvier 2012, paras. 22 et 24).

Dans l’affaire Lubanga, la Chambre préliminaire I de la CPI a noté que quatre conditions doivent être remplies pour qu’un crime relève de la compétence de la Cour :

  1. Le crime doit entrer dans le champ d’application de l’article 5 du Statut de Rome, c’est-à-dire qu’il doit être qualifié soit de génocide, soit de crime contre l’humanité, soit de crime de guerre, soit de crime d’agression (compétence ratione materiae).
  2. Le crime doit avoir été commis dans le délai prévu à l’article 11 du Statut de Rome, ce qui signifie que la Cour ne peut exercer sa compétence à l’égard des crimes commis qu’après l’entrée en vigueur du Statut de Rome pour l’État concerné, à moins que cet État n’ait fait une déclaration en vertu de l’article 12 (compétence ratione temporis).
  3. Le crime doit remplir l’une des deux conditions alternatives décrites à l’article 12 du Statut de Rome : il doit avoir été commis soit sur le territoire d’un État partie au Statut de Rome (compétence ratione loci), soit par un ressortissant d’un État partie au Statut de Rome (compétence ratione personae).
  4. La situation doit avoir été déférée au procureur soit par un État partie, soit par le Conseil de sécurité des Nations unies agissant en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations unies, soit par le procureur lui-même.

Dans les affaires Al Mahdi, Gbagbo et Kenyatta, ces quatre conditions - en plus de l’exigence que l’affaire soit renvoyée par une voie appropriée - sont également requises. Les mêmes conditions préalables avaient déjà été affirmées par la Chambre préliminaire II de la CPI, deux ans auparavant, en ce qui concerne la situation en République du Kenya (Affaire n° ICC-01/09, Décision prise en application de l’article 15 du Statut de Rome sur l’autorisation d’ouvrir une enquête sur la situation en République du Kenya, 31 mars 2010, paragraphes 36-39). 36-39).

Il convient de rappeler que dans la situation concernant le Kenya, le Procureur a ouvert une enquête proprio motu (de sa propre initiative). Il s’agissait du premier pays pour lequel le Procureur a utilisé ses pouvoirs de proprio motu. Depuis lors, le Procureur a également utilisé les pouvoirs de proprio motu pour ouvrir des enquêtes en Côte d’Ivoire en 2011, en Géorgie en 2016, au Burundi en 2016, au Bangladesh et au Myanmar en 2019, en Afghanistan en 2020 et en Palestine, en Colombie et aux Philippines en 2021. Dans la situation au Kenya, la Chambre préliminaire II de la CPI a également expliqué la différence qui existe entre une « situation » et une « affaire », qui peut être comprise en termes de différents types de procédures qu’elles impliquent. (Situation en République du Kenya, Affaire n° ICC-01/09, Décision prise en vertu de l’article 15 du Statut de Rome sur l’autorisation d’ouvrir une enquête sur la situation en République du Kenya, 31 mars 2010, paras. 36-39). Dans l’affaire Lubanga, la Chambre a estimé que les situations sont généralement définies en termes de paramètres temporels et territoriaux, tels que la situation en RDC depuis le 1er juillet 2002, pour laquelle le Statut de Rome envisage les procédures nécessaires pour déterminer si une situation particulière devrait donner lieu à une enquête pénale. Les affaires, quant à elles, comprennent des incidents spécifiques au cours desquels un ou plusieurs crimes relevant de la compétence de la Cour semblent avoir été commis par un ou plusieurs suspects identifiés, et impliquent des procédures qui n’ont lieu qu’après la délivrance d’un mandat d’arrêt (paragraphe 65). Les situations peuvent comprendre plusieurs affaires ; par exemple, six affaires concernent la situation en RDC : Le Procureur c. Sylvestre Mudacumura (phase préliminaire) ; Le Procureur c. Bosco Ntaganda (phase des réparations) ; Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo (phase des réparations) ; Le Procureur c. Germain Katanga (phase des réparations) ; Le Procureur c. Mathieu Ngudjolo Chui (affaire classée) ; et Le Procureur c. Callixte Mbarushimana (affaire classée).

En ce qui concerne la condition préalable à l’exercice de la compétence territoriale de la CPI (article 12(2) du Statut de Rome), dans la situation palestinienne, la Chambre préliminaire I a dû interpréter l’étendue de la compétence territoriale de la Cour en vertu de l’article 12(2)(a) du Statut de Rome dans le but d’établir si la Palestine pouvait être considérée comme « l’État sur le territoire duquel les actes en question ont été commis » et, dans l’affirmative, si la compétence de la CPI s’étendait aux Territoires palestiniens occupés. La Chambre préliminaire a déclaré que la référence à l’article 12-2-a à l’État sur le territoire duquel les actes en question ont été commis doit être interprétée comme une référence à un État partie au Statut de Rome. Elle a en outre précisé qu’en statuant sur l’étendue territoriale de sa compétence, la Chambre ne se prononce pas sur un différend frontalier au regard du droit international et ne préjuge pas de la question des frontières futures. (Situation dans l’État de Palestine, Affaire n° ICC-01/18, Décision relative à la « Demande présentée par l’Accusation en vertu de l’article 19 3 pour qu’il soit statué sur la compétence territoriale de la Cour en Palestine », 5 février 2021, para. 130).

Seule l’adhésion de l’État partie au Statut de Rome doit être prise en compte pour déterminer la compétence territoriale de la CPI. Par conséquent, la Chambre de première instance a affirmé que la compétence territoriale de la Cour dans la situation en Palestine s’étend aux territoires occupés par Israël depuis 1967, à savoir Gaza et la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est. (Situation dans l’État de Palestine, Affaire n° ICC-01/18-143, Décision relative à la « requête de l’Accusation en vertu de l’article 19 3 pour qu’il soit statué sur la compétence territoriale de la Cour en Palestine », 5 février 2021, paras. 57, 93, 100, 102, 104, 106, 108-109 et 112-118).

Un État non-partie au Statut de Rome peut également conférer sa compétence à la Cour en vertu de l’article 12, paragraphe 3. C’est le cas de l’Ukraine, avec sa première déclaration en avril 2014, rétroactive aux événements du 21 novembre 2013 au 22 février 2014, et avec sa deuxième déclaration en septembre 2015, prolongeant la validité de la première déclaration pour une durée indéterminée (Situation en Ukraine, Affaire n° ICC-01/22-1, Annexe I à la Décision attribuant la situation en Ukraine à la Chambre préliminaire II, 2 mars 2022).

Selon les articles 1 et 17.1.a) de son statut, la compétence de la CPI est complémentaire à celle des juridictions pénales nationales. Le 28 octobre 2021, le Procureur a clos l’enquête en Colombie sur cette base juridique. Compte tenu du mandat de complémentarité de la Cour, le Procureur a exprimé sa satisfaction, déclarant qu’il « est satisfait que la complémentarité fonctionne aujourd’hui en Colombie » et qu’il n’y avait pas de base plus raisonnable pour poursuivre les enquêtes de la CPI. (Situation en Colombie, affaire n° ICC-RoC46(3)-01/22, réponse de l’Accusation aux demandes de la FIDH et du CAJAR ICC-RoC46(3)-01/22-3 et ICC-RoC46(3)-01/22-1-Red, 6 juin 2022 et décision relative à la « Demande de révision de la décision du Procureur du 28 octobre 2021 de clore l’examen préliminaire de la situation en Colombie » et aux demandes connexes, 22 juillet 2022).

L’article 61 du Statut de Rome fait référence à l’audience de confirmation des charges, au cours de laquelle le Procureur présente des éléments de preuve au juge de la mise en état en présence de l’accusé et de son conseil. Cette procédure est essentielle car elle permet d’éviter les procès inéquitables en s’assurant qu’il existe des preuves substantielles pour étayer la commission des crimes présumés par la personne accusée. Cette garantie est essentielle pour protéger les individus contre des accusations infondées. Elle garantit que les personnes sont présumées innocentes jusqu’à ce que leur culpabilité soit prouvée et qu’elles bénéficient d’un procès équitable et impartial. (Voir Le Procureur c. Germain Katanga et Mathieu Ngudjolo Chui, Affaire n° ICC-01/04-01/07, Décision sur la confirmation des charges, 30 septembre 2008, para. 63 ; Le Procureur c. Mahamat Said Abdel Kani, Affaire n° ICC-01/14-01/21, Décision relative à la confirmation de l’acte d’accusation à l’encontre de Mahamat Said Abdel Kani, 9 décembre 2008, para. 35 ; Le Procureur c. Callixte Mbarushimana, Affaire n° ICC-01/04-01/10, Décision sur la confirmation des charges, 16 décembre 2011, para. 41 ; Le Procureur c. Francis Kirimi Muthaura, Uhuru Muigai Kenyatta et Mohammed Hussein Ali, Affaire n° ICC-01/09-02/11, Décision sur la confirmation des charges conformément à l’article 61(7)(a) et (b) du Statut de Rome, 23 janvier 2012, para. 52 ; Le Procureur c. William Samoei Ruto, Henry Kiprono Kosgey et Joshua Arap Sang, Affaire n° ICC-01/09-01/11, Décision sur la confirmation des charges conformément à l’article 61(7)(a) et (b) du Statut de Rome, 23 janvier 2012, para. 40 ; Le Procureur c. Laurent Gbagbo, Affaire n° ICC-02/11-01/11, Décision d’ajournement de l’audience de confirmation des charges en application de l’article 61(7)(c)(i) du Statut de Rome, 3 juin 2013, para. 18).

Une fois les charges confirmées, le président constitue une chambre de première instance, ce qui marque le début de la phase du procès. Par ailleurs, l’article 61(4) du Statut de Rome permet au Procureur de retirer les charges avant la tenue de l’audience de confirmation des charges.

En 2023, le fait le plus marquant à la CPI sera probablement la décision de l’Accusation de retirer les charges contre M. Mokom peu avant l’audience de confirmation des charges. Cette décision a été motivée par l’indisponibilité d’un témoin clé et la collecte infructueuse de preuves (Le Procureur c. Maxime Jeoffroy Eli Mokom Gawaka, Affaire n° ICC-01/14-01/22, Avis de retrait des charges à l’encontre de Maxime Jeoffroy Eli Mokom Gawaka, 16 octobre 2023). Cet incident fait écho à un autre survenu en 2014, lorsque le Procureur a retiré les charges dans l’affaire Kenyatta, invoquant l’insuffisance des preuves suite à la corruption et au décès de témoins et à l’ingérence politique (Le Procureur c. Uhuru Muigai Kenyatta, Affaire n° ICC-0l/09-02/11, Décision sur le retrait des charges à l’encontre de M. Kenyatta, 13 mars 2015).

Dans l’affaire fondamentale de l’affaire Lubanga (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04-01/06-8-Corr, Décision relative à la requête du Procureur aux fins de délivrance d’un mandat d’arrêt. Article 58, 10 février 2006, paras. 29-63), la Chambre préliminaire I de la CPI a estimé qu’en vertu de l’article 17 1 du Statut de Rome, deux critères cumulatifs doivent être remplis pour qu’une affaire soit recevable :

  1. l’inaction, le manque de volonté ou l’incapacité de l’État à agir dans le cadre d’une affaire, étant entendu que l’incapacité de l’État à agir n’est pas contraignante pour la Cour et ;
  2. le seuil de gravité, qui signifie que seules les affaires contre « les plus hauts dirigeants soupçonnés d’être les plus responsables » sont recevables.

Les deux mêmes conditions de recevabilité ont été réaffirmées à plusieurs reprises par les Chambres préliminaires, notamment dans la Situation en République du Kenya, Affaire n° ICC-01/09, Décision prise en vertu de l’article 15 du Statut de Rome autorisant l’ouverture d’une enquête sur la situation en République du Kenya, 31 mars 2010, paras. 40-62 ; Le Procureur c. William Samoei Ruto, Henry Kiprono Kosgey, et Joshua Arap Sang, Affaire n° ICC-01/09-02/11-96, Décision relative à la requête du Gouvernement du Kenya contestant la recevabilité de l’affaire en vertu de l’article 19 2) b) du Statut, 30 mai 2011, par. 47-70 ; Le Procureur c. Francis Kirimi Muthaura, Uhuru Muigai Kenyatta et Mohammed Hussein Ali, Affaire n° ICC-01/09-02/11, Décision relative à la requête du Gouvernement du Kenya contestant la recevabilité de l’affaire en vertu de l’article 19 2) b) du Statut, 30 mai 2011, par. 43-66) ; et Le Procureur c. Germain Katanga et Mathieu Ngudjolo Chui, Affaire n° ICC-01/04-01/07 OA 8, Jugement relatif à l’appel interjeté par M. Germain Katanga contre la décision orale rendue le 12 juin 2009 par la Chambre de première instance II sur la recevabilité de l’affaire, 25 septembre 2009, par. 56. Dans cette affaire Katanga, la Cour a également ajouté que la recevabilité devait « être déterminée sur la base des faits tels qu’ils existent au moment de la procédure relative à l’exception d’irrecevabilité ». (Katanga, paragraphe 56). Dans son arrêt sur l’appel de la République du Kenya contre la décision de recevabilité de la Chambre préliminaire II du 30 mai 2011 intitulée « Décision relative à la requête du Gouvernement du Kenya contestant la recevabilité de l’affaire conformément à l’article 19 2 b du Statut » (30 août 2011), la Chambre d’appel a confirmé les décisions antérieures des Chambres préliminaires. Elle a statué que, pour qu’une affaire soit irrecevable, une enquête nationale doit être en cours et doit couvrir les mêmes individus et substantiellement le même comportement que celui allégué dans la procédure devant la CPI (para. 39).

La CPI a depuis clarifié les normes pour chacune des deux parties du test de recevabilité : l’inaction de l’État liée à son incapacité ou à son manque de volonté d’enquêter ou d’engager des poursuites et le seuil de gravité.

  • L’État n’a pas pu ou voulu agir (art. 17(1)(a) et (b) du Statut de Rome) :

Dans l’affaire Abu Garda (Le Procureur c. Bahar Idriss Abu Garda, Affaire n° ICC-02/05-02/09, Décision sur la confirmation des charges, 8 février 2010), la Cour a estimé que « en l’absence de toute action de l’État, il n’est pas nécessaire d’examiner les questions relatives à la réticence ou à l’incapacité d’un État donné d’enquêter sur l’affaire ou d’engager des poursuites à son encontre » (Abu Garda, par. 29). Cela confirme une norme établie par l’affaire Katanga, dans laquelle la Cour a également déclaré que « la question du manque de volonté ou de l’incapacité ne doit être examinée que (1) lorsqu’il existe, au moment de la procédure relative à une exception d’irrecevabilité, des enquêtes ou des poursuites internes susceptibles de rendre l’affaire irrecevable devant la Cour, ou (2) lorsque de telles enquêtes ont eu lieu et que l’État compétent a décidé de ne pas poursuivre la personne concernée ». (Katanga, paragraphes 1 et 2).

En plus de discuter de l’absence totale d’action de l’État, la Cour dans l’affaire Katanga a également clarifié son approche de la norme de « mauvaise volonté » lorsque l’État a pris une certaine forme d’action. Trois circonstances en particulier sont des signaux d’alarme pour la « mauvaise volonté » telle que l’entendent les rédacteurs du Statut de Rome. Il s’agit des cas suivants (a) les procédures judiciaires nationales « ont été ou sont engagées […] dans le but de soustraire la personne concernée à sa responsabilité pénale » dans le cadre de la compétence de la CPI ; (b) les procédures judiciaires ont été retardées de manière injustifiée dans des circonstances qui sont « incompatibles avec l’intention de traduire la personne concernée en justice » ; et (c) les procédures n’ont pas été ou ne sont pas menées de manière impartiale. (Katanga, paragraphe 74).

La Cour a également précisé qu’en vertu de la règle 53 du Règlement de procédure et de preuve de la CPI : « il incombe à l’État de démontrer que des enquêtes ou des poursuites sont ou ont été engagées « en fournissant à la Cour des éléments de preuve attestant que “ des mesures d’enquête tangibles, concrètes et progressives sont prises […] en vue d’engager des poursuites pénales ”. (voir Situation en République islamique d’Afghanistan, Affaire n° ICC-02/17, Décision en vertu de l’article 18(2) du Statut autorisant l’Accusation à reprendre l’enquête, 31 octobre 2022, paras. 45 et 79 ; Le Procureur c. Saif Al-Islam Kadhafi, affaire n° ICC-01/11-01/11, Décision sur la recevabilité de l’affaire contre Saif Al-Islam Kadhafi, 31 mai 2013, par. 54). Conformément au principe fondamental de justice naturelle audi alteram partem (possibilité d’être entendu), la Cour a déclaré que « toute décision de la Chambre de première instance susceptible d’impliquer ou d’exprimer une conclusion selon laquelle un État partie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du Statut de Rome entraîne l’obligation pour la Chambre de première instance de donner à cet État une possibilité raisonnable de présenter ses observations avant que cette décision ne soit rendue ». (voir Le Procureur c. Alfred Yekatom et Patrice-Édouard Ngaïssona, Affaire n° ICC-01/14-01/18 OA, Jugement relatif à l’appel interjeté par M. Yekatom contre la « Décision relative à l’exception d’irrecevabilité soulevée par la défense de Yekatom » de la Chambre de première instance V, 11 février 2021, paras. 45-57).

En ce qui concerne la contestation de l’irrecevabilité d’une affaire portée devant la Cour en vertu de l’article 18, paragraphe 2, du Statut de Rome, la charge de fournir des informations pertinentes incombe toujours à l’État qui cherche à s’en remettre à la CPI. En effet, lorsqu’un État prétend qu’une affaire est irrecevable au motif qu’il enquête ou a enquêté sur ses ressortissants ou d’autres personnes relevant de sa juridiction pour des actes criminels susceptibles de constituer des crimes visés à l’article 5 du Statut de Rome, la Chambre d’appel a confirmé que l’État doit fournir à la Cour des éléments de preuve suffisamment précis et probants pour démontrer qu’il enquête effectivement sur l’affaire (Le Procureur c. Saif Al-Islam Kadhafi, Affaire n° ICC-OI/II-OI/IIOA6, Arrêt relatif à l’appel interjeté par M. Abdullah Al-Senussi contre la décision de la Chambre préliminaire I du 11 octobre 2013 intitulée « Décision sur la recevabilité de l’affaire à l’encontre d’Abdullah Al-Senussi », 24 juillet 2014, para. 166). Il ne suffit pas d’affirmer qu’une enquête est en cours. « L’un des principes essentiels de l’État de droit est que les décisions judiciaires doivent être fondées sur des faits établis par des preuves et, surtout, que l’apport de preuves à l’appui d’une allégation est l’une des caractéristiques des procédures judiciaires. (Situation en République des Philippines, affaire n° ICC-01/21 OA, arrêt relatif à l’appel interjeté par la République des Philippines contre l’autorisation donnée par la Chambre préliminaire I de reprendre l’enquête conformément à l’article 18-2 du Statut, 18 juillet 2023, par. 72-73 ; Procureur c. République des Philippines, arrêt relatif à l’appel interjeté par la République des Philippines contre l’autorisation donnée par la Chambre préliminaire I de reprendre l’enquête, 18 juillet 2023, par. 72-73 ; Le Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo, Affaire n° ICC-01/05-01/08OA3, Jugement relatif à l’appel interjeté par M. Jean-Pierre Bemba Gombo contre la décision du 24 juin 2010 de la Chambre de première instance III intitulée « Décision sur les exceptions d’irrecevabilité et d’abus de procédure », 19 octobre 2010, para. 10).

Cependant, même si la Cour constate qu’un État n’est pas disposé à poursuivre un crime, l’affaire peut rester irrecevable si d’autres motifs d’irrecevabilité sont remplis, tels que Ne Bis In Idem (art. 17 1 c du Statut de Rome), ou si l’affaire n’est pas suffisamment grave pour justifier une action ultérieure de la Cour (art. 17 1 d du Statut de Rome) (le seuil de gravité, infra) n’est pas atteint (voir également Katanga, par. 59).

  • Seuil de gravité (art. 17(1)(d) du Statut de Rome) :

Le deuxième volet du test d’admissibilité est l’exigence de gravité. L’évaluation de la gravité d’une affaire peut porter sur des questions concernant « la nature, les modalités et l’impact » du crime allégué (Abu Garda, paragraphe 31), mais « [l]es seuls critères quantitatifs, y compris le nombre de victimes, ne sont pas déterminants pour la gravité d’une affaire donnée » (Le Procureur c. Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud, Affaire n° ICC-01/12-01/18 OA, Arrêt relatif à l’appel interjeté par M. Al Hassan contre la décision de la Chambre préliminaire I intitulée « Décision relative à l’exception d’irrecevabilité pour insuffisance de gravité de l’affaire soulevée par la défense », 19 février 2020, para. 94), ainsi que d’autres facteurs énumérés à la règle 145(1)(c) du Règlement de procédure et de preuve relative à la détermination d’une peine (Kenyatta, para. 50). L’évaluation doit être à la fois quantitative et qualitative (Abu Garda, para. 31) et « implique une évaluation holistique » des quatre principaux facteurs établis dans la jurisprudence de la Cour : (i) « l’ampleur des crimes allégués : nombre de victimes, zone géographique affectée, étendue et intensité des crimes allégués dans le temps “ ; (ii) ” la nature des crimes allégués : qualification juridique du comportement allégué, droits de l’homme violés du fait des crimes allégués “ ; (iii) ” le mode de perpétration des crimes allégués : moyens employés pour exécuter les crimes allégués, si les crimes allégués ont été commis avec une cruauté ou une brutalité particulière, s’ils ont été commis sur la base de motifs discriminatoires, contre une victime particulièrement sans défense ou vulnérable, ou en application d’un plan ou d’une politique » ; et (iv) »l’impact des crimes allégués : préjudice causé aux victimes et à leurs familles, étendue des dommages causés, impact au-delà des victimes directes et de leurs familles ou au-delà des dommages immédiats « (Situation relative aux navires immatriculés de l’Union des Comores, de la République hellénique et du Royaume du Cambodge, Affaire n°. ICC-01/13, Décision relative à la « Demande de contrôle judiciaire présentée par le Gouvernement des Comores », 16 septembre 2020, paras. 20-21 ; Le Procureur c. Charles Blé Goudé, Affaire n° ICC-02/11-02/11, Décision relative à l’exception d’irrecevabilité de l’affaire contre Charles Blé Goude soulevée par la Défense pour insuffisance de gravité, 12 novembre 2014, para. 19). Il n’est pas nécessaire que l’accusé soit un délinquant de haut rang (Goudé, paragraphe 18). Le seuil de gravité doit être atteint « en plus » du crime énuméré aux articles 6 à 8 du Statut de Rome ; la gravité seule n’est pas suffisante. (Abu Garda, paragraphe 30).

La Cour a statué qu’une décision d’admissibilité n’est pas obligatoire mais plutôt discrétionnaire, à moins que l’une des parties ne soulève une contestation. (Le Procureur c. William Samoei Ruto, Henry Kiprono Kosgey et Joshua Arap Sang, Affaire n° ICC-01/09-01/11, Décision sur la confirmation des charges conformément à l’article 61(7)(a) et (b) du Statut de Rome, 23 janvier 2012, para. 38).

Selon l’article 19(2) du Statut de Rome, la recevabilité d’une affaire et la compétence de la Cour peuvent être contestées par :

  1. un accusé ou une personne à l’encontre de laquelle un mandat d’arrêt ou une citation à comparaître a été délivré(e) en vertu de l’article 58 du Statut de Rome ;
  2. un État qui a compétence en l’espèce, au motif qu’il mène une enquête ou des poursuites ou qu’il a mené une enquête ou des poursuites ; ou
  3. un État dont l’acceptation de la compétence est requise en vertu de l’article 12 du Statut de Rome.

Dans une décision de la Chambre d’appel (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04-01/06 (OA4), Arrêt relatif à l’appel interjeté par M. Thomas Lubanga Dyilo contre la décision relative à l’exception d’incompétence soulevée par la défense conformément à l’article 19-2-a du Statut du 3 octobre 2006, 14 décembre 2006, paragraphe 24), la CPI a décidé que l’« abus de procédure » ne pouvait pas constituer un motif d’exception d’incompétence de la Cour. Enfin, une contestation de la recevabilité d’une affaire doit être faite avant ou au début du procès, c’est-à-dire « au moment où la Chambre de première instance est constituée ». (Katanga, para. 28).

La Cour a le pouvoir inhérent de déterminer l’étendue de sa propre compétence en vertu du principe de la compétence de la compétence (Situation au Bangladesh/Myanmar, Affaire n° ICC-RoC46(3)-01/18, Décision relative à la « Requête de l’Accusation aux fins d’une décision sur la compétence en vertu de l’article 19(3) du Statut », 6 septembre 2018, para. 33).

Dans l’affaire Kony (Le Procureur c. Joseph Kony, Vincent Otti, Raska Lukwiya, Okot Odhiambo et Dominic Ongwen, Affaire n° ICC-02/04-01/05, Décision relative à la position du Procureur sur la décision de la Chambre préliminaire II d’expurger les descriptions factuelles des crimes des mandats d’arrêt, requête en réexamen et requête en éclaircissement, 28 octobre 2005, para. 19), la Chambre préliminaire II de la CPI a interprété de manière restrictive l’article 21 du Statut de Rome relatif au droit applicable par la CPI, estimant que les règles et pratiques d’autres juridictions, qu’elles soient nationales ou internationales, ne sont pas « en tant que telles applicables devant la Cour au-delà du champ d’application de l’article 21 du Statut », ce qui signifie que les lois nationales ne peuvent être utilisées comme droit applicable devant la CPI que si la Cour n’est pas parvenue à une conclusion après avoir appliqué d’autres sources de droit applicable.

Les textes fondateurs de la CPI doivent être interprétés comme un tout, l’interprétation ne peut ignorer ou rendre nulle une autre de ses dispositions (Katanga, arrêt, 7 mars 2014, par. 46). En 2016, la Cour, dans l’affaire Le Procureur c. Bemba, a examiné la « hiérarchie » des sources de droit énoncée à l’article 21 (Le Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo, affaire n° ICC-01/05-01/08, arrêt rendu en application de l’article 74 du Statut, 21 mars 2016, par. 66). Cette hiérarchie exige que la Chambre applique d’abord le Statut de Rome lui-même, les Éléments des crimes et le Règlement de procédure en tant que sources primaires de droit. En cas de conflit entre ces trois sources, le Statut de Rome lui-même reste la première source d’autorité.

Si l’application de ces sources primaires laisse une « lacune “, la Chambre peut ensuite considérer les ” traités applicables “ et les ” principes et règles du droit international » (Bemba, paras. 69-71). Dans le passé, la Chambre a appliqué la Convention de Vienne sur le droit des traités, la Convention relative aux droits de l’enfant, la Convention sur le génocide, les Conventions de Genève du 12 août 1949 et les deux Protocoles additionnels à la Convention de Genève (Bemba, para. 70). Pour la preuve du droit international, la Chambre s’est tournée vers la jurisprudence d’autres cours internationales, en particulier la CIJ (Bemba, para. 71). Si les règles et la pratique des tribunaux pénaux internationaux ad hoc ne sont pas considérées par la Cour comme du droit applicable en soi, elles doivent néanmoins être utilisées comme des orientations implicites (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04-01/06, Décision relative à l’exception d’incompétence de la Cour soulevée par la défense en vertu de l’article 19-2-a du Statut, 3 octobre 2006, p. 9 ; Katanga, Arrêt, 7 mars 2014, para. 47). La CPI peut également prendre en compte ses propres précédents à ce stade, bien qu’ils ne soient pas juridiquement contraignants (Bemba, par. 74).

Enfin, si la question soumise à la Cour n’est toujours pas satisfaite par l’une des approches ci-dessus, la CPI peut se tourner vers « les principes généraux de droit tirés par la Cour des lois nationales des systèmes juridiques du monde entier, y compris, le cas échéant, les lois nationales des États qui exerceraient normalement leur compétence à l’égard du crime » (Bemba, para. 73, citant l’article 21(1)(c) du Statut de Rome). Cependant, pour que les lois nationales constituent le droit applicable, elles doivent être conformes au Statut de Rome et au droit international, qu’il soit conventionnel ou coutumier. Toutefois, lorsque le cadre juridique de la Cour régit une question de manière exhaustive, il n’est pas nécessaire de recourir à des sources de droit secondaires (Situation en République bolivarienne du Venezuela I, affaire n° ICC-02/18, Décision autorisant la reprise de l’enquête conformément à l’article 18-2 du Statut, 27 juin 2023, par. 37).

La Cour a également souligné que l’application et l’interprétation du droit doivent toujours être conformes aux « droits de l’homme internationalement reconnus », ce qui, selon la Cour, renvoie aux résolutions de l’Assemblée générale des Nations Unies et du Conseil de sécurité des Nations Unies ainsi qu’à la jurisprudence de la Cour interaméricaine des droits de l’homme et de la Cour européenne des droits de l’homme (Situation en RDC, Affaire n° ICC-01/04, Décision relative aux demandes de participation à la procédure de VPRS 1, VPRS 2, VPRS 3, VPRS 4, VPRS 5 et VPRS 6, 17 janvier 2006, paras. 81, 115-116).

L’affaire Lubanga a permis de clarifier les limites de l’utilisation de documents confidentiels devant la CPI.

Thomas Lubanga Dyilo a été le premier accusé à être jugé individuellement par la CPI. En 2004, la RDC a demandé à la Cour d’enquêter et de poursuivre les crimes commis en RDC depuis le 1er juillet 2002. En 2006, la CPI a délivré un mandat d’arrêt à l’encontre de Thomas Lubanga Dyilo, accusé de crimes de guerre pour conscription, enrôlement et utilisation d’enfants soldats. Cela a soulevé un certain nombre de questions procédurales liées à la gestion des documents confidentiels et à la protection des témoins sans compromettre le droit à la défense et à un procès équitable.

En 2006, la Chambre préliminaire I de la CPI a décidé que le président de la Cour pouvait établir un « régime de coopération » avec l’ONU par le biais d’un accord qui doit être approuvé par l’AEP. Ce régime de coopération permet à l’ONU de fournir à la Cour des informations confidentielles, avec l’assurance que ces documents ne seront pas divulgués (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04-01/06, Decision on Defense Requests for Disclosure of Materials, 17 novembre 2006, p. 5 et 7).

La Chambre préliminaire I de la CPI a rappelé que, conformément à l’article 54 3 e du Statut de Rome, le Procureur doit demander le consentement de l’auteur de la preuve s’il souhaite la divulguer sous une forme expurgée (Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04-01, Décision sur les informations communiquées par l’Accusation concernant la deuxième décision sur les requêtes au titre de l’article 81, 28 septembre 2006, p. 5). En outre, la Cour peut demander des mesures compensatoires pour divulguer les informations nécessaires pour garantir les droits de l’accusé à un procès équitable (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire No. ICC-01/04-01/06 OA 13, Arrêt relatif à l’appel interjeté par le Procureur contre la décision de la Chambre de première instance I intitulée « Décision relative aux conséquences de la non-divulgation de pièces à décharge couvertes par les accords au titre de l’article 54 3 e) et à la demande de suspension des poursuites engagées contre l’accusé, ainsi qu’à certaines autres questions soulevées lors de la conférence de mise en état du 10 juin 2008 », 21 octobre 2008, para. 48).

La Chambre préliminaire I de la CPI a également rappelé la règle 82 3 du Règlement de procédure et de preuve, qui stipule que si le Procureur appelle un témoin à présenter des pièces ou des informations qui ont été obtenues et protégées en vertu de l’article 54 3 e, il ne peut être possible de contraindre ce témoin à répondre à une question relative à ces pièces ou informations. (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/-04-01/06, Décision sur les pratiques de familiarisation des témoins et d’administration de la preuve, 8 novembre 2006, p. 21).

La Chambre préliminaire I de la CPI a estimé que la remise de l’accusé, M. Thomas Lubanga Dyilo, à la Cour le 17 mars 2006 a déclenché l’obligation pour l’accusation de divulguer, « dès que possible », tout élément de preuve à décharge à la défense, avant l’audience de confirmation des charges, comme le prévoit l’article 67-2 du Statut de Rome (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/-04-01/06, Décision sollicitant les observations de l’Accusation et du Conseil de permanence de la Défense sur le système de divulgation et établissant un système provisoire de divulgation, 23 mars 2006, p. 3, 4 et 7).

Dans une autre décision rendue dans la même affaire, la Chambre a décidé que les éléments de preuve à décharge devaient être divulgués par l’Accusation avant l’audience de confirmation des charges et que cette obligation était plus large « lorsque de nouvelles charges ou de nouvelles allégations factuelles étayant les charges actuelles sont alléguées » (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/-04-01/06, Décision relative au système définitif de divulgation et à l’établissement d’un calendrier, 15 mai 2006, paras. 119 et 123).

La Cour a rappelé que le droit d’être jugé sans retard et avec célérité est l’un des principaux attributs d’un procès équitable. Ce droit doit être respecté à tous les stades de la procédure (Situation en RDC, affaire n° ICC-01/-04, arrêt relatif à la requête du Procureur aux fins d’examen extraordinaire de la décision de la Chambre préliminaire I du 31 mars 2006 rejetant l’autorisation d’interjeter appel, 13 juillet 2006, par. 11).

En ce qui concerne la protection de la victime et son impact sur l’équité du procès, la Chambre préliminaire I de la CPI a estimé que « le fait de ne pas divulguer l’identité des demandeurs à la défense ne constitue pas une atteinte à la présomption d’innocence ». (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/-04-01/06, Décision sur la demande d’autorisation d’appel de la Défense concernant la transmission des demandes de participation des victimes, 6 novembre 2006, p. 7).

Le 13 juin 2008, la Chambre de première instance I de la CPI a décidé de suspendre la procédure en raison de l’incapacité de l’Accusation à divulguer à la défense des informations potentiellement disculpatoires, incapacité qui, de l’avis de la Chambre, entraînait une violation des droits de la défense à un procès équitable : Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/-04-01/06, Décision relative aux conséquences de la non communication des pièces à décharge visées par les accords de l’article 54 3 e) et à la demande de suspension des poursuites contre l’accusé, ainsi qu’à certaines autres questions soulevées lors de la conférence de mise en état du 10 juin 2008, 13 juin 2008, paras. 91 et 94).

Cette décision stipule que l’Accusation n’a pas correctement utilisé l’article 54(3)e) du Statut de Rome, qui permet à l’Accusation de recevoir des informations ou des documents confidentiels afin de trouver de nouveaux éléments de preuve, et qui prévoit que ces documents ne seront pas utilisés pendant le procès. Elle a déclaré que l’Accusation avait largement utilisé cet article, alors qu’il ne devait être utilisé qu’à titre exceptionnel. Elle a également estimé qu’en vertu de l’article 67, paragraphe 2, du Statut de Rome, la divulgation des éléments de preuve à décharge en possession du Procureur est un aspect fondamental du droit de l’accusé à un procès équitable. Au moment de la décision de mettre fin à la procédure, l’ONU n’avait pas encore accepté d’autoriser la divulgation de documents confidentiels qu’elle avait soumis à l’accusation. La Chambre a donc suspendu le procès, estimant que la possibilité d’un procès équitable était en danger. Finalement, cette autorisation a été obtenue et les documents ont été divulgués. En novembre 2008, les juges ont décidé que le Procureur avait pris les mesures nécessaires pour garantir le respect des droits de Lubanga à un procès équitable, autorisant ainsi la poursuite du procès. Ce dernier a été condamné par la Cour le 14 mars 2012 a une peine de 14 ans d’emprisonnement.

L’article 68(1) du Statut de Rome prévoit que la Cour prend les mesures appropriées pour protéger les victimes et les témoins. La Cour a recommandé l’adoption de différents types de mesures, telles que la mise en place de formations sur les procédures de la Cour par l’Unité d’aide aux victimes et aux témoins (UVT) ; le renforcement de la coopération en matière de protection avec l’État concerné, ou avec d’autres États parties, des États non parties et des organisations intergouvernementales (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04-01/06, Décision relative à un cadre général concernant les mesures de protection en faveur des témoins à charge et à décharge, 19 septembre 2006) ; ainsi que l’autorisation d’une participation anonyme à l’audience de confirmation des charges lorsque cela s’avère nécessaire (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04-01/06, Décision autorisant le dépôt d’observations sur les demandes de participation aux procédures a/0004/06 à a/0009/06, a/0016/06 à a/0063/06 et a/0071/06, 22 septembre 2006, p. 4 et 5), la restriction des contacts entre les organes de la Cour et les victimes (Situation en RDC, Affaire n ICC-01/04, Décision relative aux mesures de protection demandées par les demandeurs 01/04-1/dp à 01/04-6/dp, 21 juillet 2005, p. 6), et la reclassification d’une décision publique en décision confidentielle (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04-01/06, Décision portant reclassification du document n° ICC-01/04-01/06-690, 9 novembre 2006, p. 2). D’autres mesures ont été prises, notamment l’octroi par la Cour d’un statut de protection des témoins, l’autorisation de rendre « privées » ou « fermées » certaines parties du procès au cours desquelles les victimes témoignent, et l’expurgation des parties sensibles des documents de la Cour, notamment en remplaçant parfois les noms des témoins par des numéros. (Le Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo, Affaire n° ICC-01/05-01/08, Arrêt rendu en application de l’article 74 du Statut, 21 mars 2016, paras. 247-249 ; Le Procureur c. Germain Katanga, Affaire n° ICC-01/04-01/07, Arrêt rendu en application de l’article 74 du Statut, 7 mars 2014, paras. 97-100 ; et Le Procureur c. Mathieu Ngudjolo, Affaire n° ICC-01/04-02/12, Arrêt rendu en application de l’article 74 du Statut, 18 décembre 2012, paras. 63-66).

Néanmoins, la Cour a estimé que ces mesures de protection ne doivent pas être préjudiciables ou incompatibles avec les droits de l’accusé et le droit à un procès équitable et impartial (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04-01/06 (OA 5), Arrêt relatif à l’appel interjeté par M. Thomas Lubanga Dyilo contre la décision de la Chambre préliminaire I intitulée « Première décision sur les requêtes de l’Accusation et les requêtes modifiées aux fins d’expurgation en vertu de l’article 81 du Règlement », 14 décembre 2006, para. 34 ; Le Procureur c. Alfred Yekatom et Patrice-Edouard Ngaïssona, Affaire n° ICC-01/14-01/18, Décision relative à la demande du Procureur d’utiliser des résumés anonymisés des déclarations des témoins, 3 février 2020, para. 26). Cela signifie que le recours à la confidentialité pour la protection des victimes et des témoins n’est pas absolu en ce sens que leur identité n’est pas divulguée au public, mais qu’elle sera disponible pour la défense et/ou l’accusé afin de garantir le droit à une défense équitable et efficace.

L’article 68(3) du Statut de Rome stipule que « lorsque les intérêts personnels des victimes sont en jeu, la Cour permet que leurs vues et préoccupations soient exposées et prises en considération aux différents stades de la procédure ». La Cour a précisé les modalités de cette participation ; elles ont le droit d’être entendues, d’exprimer leurs vues et préoccupations, de déposer des conclusions, d’assister aux audiences publiques et autres audiences liées à leurs intérêts, de demander à la Chambre compétente d’ordonner des mesures spécifiques, d’être informées de la procédure, d’être notifiées de la publication des documents publics et autres documents liés à leurs intérêts, de demander que des éléments de preuve soient versés au dossier, de déposer des conclusions tout au long de la procédure, de faire des déclarations liminaires et de déposer des conclusions finales, de faire des déclarations finales et de choisir si elles acceptent ou non de divulguer leur identité à la défense avant l’ouverture du procès (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04-01/06, Première décision sur les demandes de l’Accusation et les demandes modifiées d’expurgation au titre de la règle 81, 15 septembre 2006, p. 9 ; Le Procureur c. Germain Katanga, Affaire n° ICC-01/04-01/07, Arrêt rendu en application de l’article 74 du Statut, 7 mars 2014, paras. 31-36 ; Le Procureur c. Ngudjolo, Affaire n° ICC-01/04-02/12, Arrêt rendu en application de l’article 74 du Statut, 18 décembre 2012, para. 27 ; Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04, Décision relative aux demandes de participation à la procédure, 17 janvier 2006, paras. 70-76). Les victimes ont également le droit de ne pas assister aux audiences si leur sécurité est en jeu (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04-01/06, Décision relative aux demandes de participation aux procédures a/0004/06 à a/0009/06, a/0016/06, a/0063/06, a/0071/06 à a/0080/06 et a/0105/06 dans l’affaire Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, 20 octobre 2006, p. 11 ; Le Procureur c. Bahar Idriss Abu Garda, Affaire n° ICC-02/05-02/09, Décision relative aux modalités de participation des victimes à la phase préliminaire de l’affaire, 6 octobre 2009, paras. 14 et 15 ; Le Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo, Affaire n° ICC-01/05-01708, Quatrième décision relative à la participation des victimes, 12 décembre 2008, para. 103 et Décision relative à la participation des victimes au procès et à 86 demandes de participation de victimes à la procédure, 12 juillet 2010, para. 47 ; Le Procureur c. Abdallah Banda Abakaer Nourain, Affaire n° ICC-02/05-03/09, Décision relative à la participation des victimes au procès, 20 mars 2014, par. 36 et 38 ; Le Procureur c. Dominic Ongwen, Affaire n° ICC-02/04-01/15, Décision relative à la divulgation de l’identité des victimes, 17 juin 2016 ; Le Procureur c. Al Hassan, Affaire n° ICC-01/12-01/18, Décision relative à la demande de présentation d’éléments de preuve, de points de vue et de préoccupations par les représentants légaux des victimes, 9 décembre 2021.

Le 3 octobre 2012, la Chambre de première instance V a statué sur la représentation légale et les droits des victimes dans les deux affaires kenyanes afin de faire face au grand nombre de victimes et à leurs besoins de protection (Procureur c. Uhuru Muigai Kenyatta ; Procureur c. William Samoei Ruto et Joshua Arap Sang). La Chambre de première instance a établi une nouvelle procédure à suivre par les victimes qui souhaitent participer aux procès. Cette nouvelle procédure a créé une nouvelle catégorie de victimes : celles qui ne souhaitent pas comparaître en personne devant la Cour. Seules les victimes souhaitant comparaître en personne devant la Cour ont été obligées de soumettre une demande détaillée conformément à la règle 89 du Règlement de procédure et de preuve. Les autres ont été autorisés à s’inscrire auprès du Greffe par le biais d’une procédure moins détaillée et à participer au procès par l’intermédiaire du représentant légal commun des victimes, qui a exprimé les points de vue et les préoccupations des victimes non enregistrées ou non identifiées.

Dans l’affaire Katanga, la Chambre de première instance a autorisé une procédure similaire, établissant des conseils juridiques distincts pour les victimes en général et pour les victimes qui étaient des enfants soldats. Cela a permis à chaque groupe d’avoir la meilleure représentation possible et d’éliminer les conflits d’intérêts potentiels entre les deux groupes (Le Procureur c. Germain Katanga, Affaire n° ICC-01/04-01/07, Jugement rendu en application de l’article 74 du Statut, 7 mars 2014, para. 34 ; Voir aussi Procureur c. Ongwen, Affaire n° ICC-02/04-01/15, Observations sur l’organisation de la représentation légale des victimes, 6 juin 2016).

Cependant, ces développements pragmatiques, basés sur les souhaits des victimes, ne contribuent pas à clarifier les droits des victimes en ce qui concerne leur représentation devant la CPI.

La réparation ne peut être ordonnée sans une condamnation (Le Procureur c. William Samoei Ruto et Joshua Arap Sang, Affaire n° ICC-01/09-01/11, Décision relative à la requête en réparation, 1er juillet 2016, para. 6). En octobre 2023, cinq affaires de la CPI auront atteint le stade des réparations. La première affaire à avoir atteint ce stade est l’affaire Lubanga en août 2012, suivie de l’affaire Katanga en mars 2017, puis de l’affaire Al Mahdi en août 2017 et enfin de l’affaire Ntaganda en mars 2021. Les procédures de réparation concernant Ongwen ont été ouvertes en mai 2021 et clôturées le 28 février 2024. Ces affaires sont désormais closes.

Par décision du 7 août 2012 dans l’affaire Lubanga (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Affaire n° ICC-01/04-01/06, Décision établissant les principes et procédures applicables aux réparations), la Chambre de première instance I de la CPI a énoncé pour la première fois les principes applicables aux réparations en faveur des victimes. Compte tenu de la nature et de l’ampleur des crimes commis par Thomas Lubanga, qui ont affecté de nombreuses communautés, la Chambre a décidé d’adopter une approche collective.

Ces principes sont les suivants :

-Le droit à réparation est un droit de l’homme fondamental et bien établi (paragraphe 185) ; -Toutes les victimes doivent être traitées de manière juste et équitable en ce qui concerne les réparations, qu’elles aient ou non participé au procès. Les besoins de toutes les victimes doivent être pris en compte, en particulier ceux des enfants, des personnes âgées, des personnes handicapées et des victimes de violences sexuelles ou sexistes. Les victimes doivent être traitées avec humanité et dignité, et leur sécurité, leur bien-être physique et psychologique ainsi que leur vie privée doivent être assurés. En outre, les réparations doivent être accordées aux victimes sans distinction défavorable fondée sur le sexe, l’âge, la race, la couleur, la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou autres, l’orientation sexuelle, l’origine nationale, ethnique ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. Enfin, les réparations doivent éviter de stigmatiser davantage les victimes et d’entraîner une discrimination de la part de leur famille et de leur communauté (paragraphes 187-193) ;

-Les réparations peuvent être accordées aux victimes directes et indirectes, y compris les membres de la famille des victimes directes, mais aussi aux personnes morales (paragraphe 194) ;

-Les réparations doivent être accessibles à toutes les victimes, en adoptant une approche sensible au genre et à la culture. Les victimes, leurs familles et les communautés doivent pouvoir participer au processus de réparation (paragraphes 195 et 196) ;

  • Combinés, ces principes favorisent les projets de réhabilitation communautaire plutôt que les indemnisations individuelles.

La Chambre de première instance II a complété ce schéma dans son ordonnance de réparation dans l’affaire Le Procureur c. Germain Katanga, Affaire n° ICC-01/04-01/07, rendue le 24 mars 2017.

La Chambre a défini trois types de réparations :

  1. Réparation individuelle ;
  2. Réparations collectives visant à bénéficier à la communauté dans son ensemble ; et
  3. Réparations collectives axées sur les membres individuels du groupe.

La Chambre a également noté que « les modalités de réparation ne se limitent pas à celles énoncées à l’article 75 1 du Statut […] Il peut s’avérer que d’autres modalités de réparation sont appropriées, par exemple celles qui ont une valeur symbolique, préventive ou transformatrice ». (Katanga, Affaire n° ICC-01/04-01/07, Ordonnance de réparation en vertu de l’article 75 du Statut, 24 mars 2017, paras. 281-297). Parmi ces trois types de réparations, la Chambre a privilégié les réparations individuelles et les réparations collectives axées sur les individus, notant en particulier l’importance de l’indemnisation individuelle pour permettre « une reconnaissance personnelle et symbolique du préjudice subi » (Katanga, Réparations, para. 285). Cependant, la Chambre a également souligné que cette décision a été prise en partie parce qu’une réparation individuelle était possible : il y avait 297 victimes individuelles dans l’affaire Katanga, ce qui, selon la Cour, rendrait « possible l’octroi d’indemnités individuelles » (Katanga, Réparations, para. 287). Pour tous les programmes de réparation, qu’ils soient individuels ou collectifs, la Chambre a déclaré qu’il était souhaitable que le soutien soit « autonome » afin de garantir le versement des prestations sur une longue période (Katanga, Réparations, para. 268).

Bien qu’elle se concentre sur l’indemnisation individuelle plutôt que collective, la Cour a par ailleurs réaffirmé bon nombre des principes annoncés dans l’affaire Lubanga. La Chambre a convenu que « les réparations devraient refléter les pratiques culturelles et coutumières locales » et a ajouté que les réparations ne devraient pas reproduire des pratiques discriminatoires (Katanga, Réparations, para. 268). La Cour a également confirmé que les réparations devaient éviter la stigmatisation (Katanga, Réparations, para. 285) et que les victimes elles-mêmes devaient percevoir les réparations comme significatives (Katanga, Réparations, para. 268).

En ce qui concerne l’indemnisation collective, la Chambre a précisé que « le cœur des réparations collectives réside dans les perceptions des membres du groupe qui subissent un préjudice “, ce qui signifie que les victimes doivent se percevoir comme ” ayant subi un préjudice commun » pour qu’une réparation collective soit appropriée (Katanga, Réparations, para. 275). Cependant, cette exigence ne signifie pas que le groupe doit être investi d’une personnalité juridique collective préalable (Katanga, Réparations, para. 276).

Le Procureur et le(s) défendeur(s) peuvent tous deux interjeter appel d’un jugement ou d’une décision de la Chambre de première instance. Le même critère d’examen s’applique aux appels interjetés par l’une ou l’autre partie (comparer l’affaire Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyiolo, Affaire n° ICC-01/04-01/06 A 5, Jugement d’appel, 1er décembre 2014 avec l’affaire Le Procureur c. Mathieu Ngudjolo Chui, Affaire n° ICC-01/04-02/12 A, Jugement relatif à l’appel interjeté par le Procureur contre la décision de la Chambre de première instance II intitulée « Jugement rendu en application de l’article 74 du Statut », 7 avril 2015). Conformément à l’article 81 1 du Statut de Rome, un appel peut soulever (i) des erreurs de procédure, (ii) des erreurs de fait, (iii) des erreurs de droit, ou (iv) tout autre motif ayant affecté l’équité de la procédure ou de la décision au niveau de la Chambre de première instance. En outre, conformément à l’article 83(2), la Chambre d’appel ne peut interférer avec la décision de la Cour de première instance que si l’erreur ou l’autre motif en question « a matériellement affecté » la décision en question et « [une] décision est “matériellement affectée par une erreur de droit” si la chambre “aurait rendu une [décision] substantiellement différente de la décision affectée par l’erreur, si elle n’avait pas commis l’erreur”. (Situation en République des Philippines, Affaire n° ICC-01/21 OA, Arrêt relatif à l’appel interjeté par la République des Philippines contre l’autorisation donnée par la Chambre préliminaire I de reprendre l’enquête conformément à l’article 18-2 du Statut, 18 juillet 2023, par. 36 ; voir également Procureur c. République des Philippines, Arrêt relatif à l’appel interjeté par la République des Philippines contre l’autorisation donnée par la Chambre préliminaire I de reprendre l’enquête. 36 ; Voir également Le Procureur c. Germain Katanga et Mathieu Ngudjolo Chui, Affaire n° ICC-01/04-01/07 OA 8, Jugement relatif à l’appel interjeté par M. Germain Katanga contre la décision orale rendue le 12 juin 2009 par la Chambre de première instance II sur la recevabilité de l’affaire, 25 septembre 2009, para. 37 ; Lubanga, Jugement d’appel, para. 16 ; Ngudjolo, Jugement sur l’appel du Procureur, para. 18). L’examen de la Chambre d’appel est de nature corrective et n’est pas de novo (Le Procureur c. Abdallah Banda Abakaer Nourain et Saleh Mohammed Jerbo Jamus, Affaire n° ICC-02/05-03/09-295 (OA 2), Jugement relatif à l’appel interjeté par le Procureur contre la décision de la Chambre de première instance IV du 12 septembre 2011 intitulée « Motifs de l’ordonnance relative à la traduction des déclarations des témoins (ICC-02/05-03/09-199) et instructions supplémentaires relatives à la traduction », 17 février 2012, par. 20).

Des allégations d’erreurs procédurales peuvent être soulevées sur la base d’événements survenus au cours de la procédure préliminaire et de la procédure de première instance (Ngudjolo, arrêt sur l’appel du Procureur, par. 21). Souvent, les allégations d’erreurs procédurales portent sur le fait que la Chambre de première instance a abusé de son pouvoir discrétionnaire. Il y a abus de pouvoir discrétionnaire lorsque « la décision est à ce point injuste ou déraisonnable qu’elle “force à conclure que la Chambre n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judicieuse” “ (Le Procureur c. Ukuru Muigai Kenyatta, Affaire n° ICC-01/09-02/11 OA 5, Jugement relatif à l’appel interjeté par le Procureur contre la ” Décision relative à la requête de l’Accusation aux fins de constat de non-conformité en vertu de l’article 87 7 du Statut “ de la Chambre de première instance V(B) ”, 19 août 2015, paras. 22-25).

La Chambre d’appel n’interviendra pas sur les conclusions factuelles de la Chambre de première instance à moins que celle-ci n’ait commis une erreur manifeste. La Chambre d’appel ne remettra pas en cause les conclusions de fait d’une Chambre de première instance au seul motif qu’elle serait parvenue à une conclusion différente. (Situation en République des Philippines, para. 41 ; Voir également Le Procureur c. Abd-Al-Rahman, Affaire n° ICC-02/05-01/20 OA12, Jugement relatif à l’appel interjeté par M. Ali Muhammad Ali Abd-Al-Rahman contre la décision de la Chambre de première instance I du 17 février 2023 intitulée « Décision relative à l’admissibilité de la vidéo (DAR-OTP-0216-0119) et des enregistrements d’appels téléphoniques (DAR-OTP-0216-0127, DAR-OTP-0216-0128) », para. 22 et Le Procureur c. Bosco Ntaganda, Affaire n° ICC-01/04-02/06-2667-Red (A3), Jugement relatif à l’appel interjeté par M. Bosco Ntaganda contre la décision de la Chambre de première instance VI du 7 novembre 2019 intitulée « Jugement portant condamnation », Jugement, 30 mars 2021, paras. 27-29.) La Chambre d’appel a précisé qu’une « erreur manifeste » peut inclure une mauvaise appréciation des faits, la prise en compte de faits non pertinents ou l’absence de prise en compte de faits pertinents. (Kenyatta, Jugement sur l’appel du Procureur, par. 22-25). Le critère ultime est de savoir si la Chambre de première instance « aurait pu raisonnablement parvenir à la conclusion contestée » (Lubanga, Jugement d’appel, para. 21). Enfin, la Chambre d’appel a rappelé qu’un « appelant est tenu d’exposer toutes les erreurs alléguées dans le mémoire d’appel et “d’indiquer, avec suffisamment de précision, comment [l”]erreur alléguée aurait matériellement affecté la décision contestée ». (Situation dans la République des Philippines, paragraphes 38, 52 et 55).

La Chambre d’appel ne s’en remet pas à la Chambre de première instance sur les questions de droit. Au contraire, la Chambre d’appel « parviendra à ses propres conclusions quant au droit approprié “ (Le Procureur c. Callixte Mbarushimana, Affaire n° ICC-01/04-01/10 (OA 4), Arrêt relatif à l’appel interjeté par le Procureur contre la décision de la Chambre préliminaire I du 16 décembre 2011 intitulée ” Décision relative à la confirmation des charges », 30 mai 2012, para. 15 ; et Lubanga, arrêt d’appel, para. 18). Cependant, comme pour les erreurs de procédure ou de fait, la Chambre d’appel n’interviendra que si l’erreur de droit a « matériellement affecté » la décision.

Un appel peut également être interjeté au motif qu’une décision ou un jugement particulier est inéquitable d’une manière qui a affecté la fiabilité de la décision ou de la sentence. Pour satisfaire la Chambre d’appel sur ces motifs, deux conditions doivent être remplies. Tout d’abord, le requérant doit indiquer précisément en quoi la procédure a été inéquitable. Deuxièmement, l’appelant doit démontrer comment le caractère inéquitable de la procédure a « affecté la fiabilité “ de la décision (Le Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo, Affaire n° ICC-01/05-01/08 A, Jugement relatif à l’appel interjeté par M. Jean-Pierre Bemba Gombo contre le ” Jugement rendu par la Chambre de première instance III en application de l’article 74 du Statut », 8 juin 2018, par. 62).

La Chambre d’appel peut également réviser les peines, qu’elle ne modifiera que si la peine imposée par la Chambre de première instance est « disproportionnée » par rapport au crime (Lubanga, par. 39, cité avec approbation dans Bemba, Jugement d’appel, par. 21).

Contact

http://www.icc-cpi.int/

Fonds au profit des victimes : https://www.trustfundforvictims.org

Coalition pour la CPI : https://www.iccnow.org ;

**Pour en savoir plus

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