Dictionnaire pratique du droit humanitaire

« Mal nommer les choses c’est ajouter au malheur du monde. » Albert Camus.

Rapporteur spécial

Les rapporteurs spéciaux sont des experts indépendants chargés de contrôler le respect de certains droits de l’homme. Ce système de contrôle créé par la Commission des droits de l’homme a été repris par le Conseil des droits de l’homme lors de sa création en 2006. Cette compétence a été reconnue à l’ancienne commission par la résolution 1235 (XLII) du 6 juin 1967 du Conseil économique et social : « La Commission des droits de l’homme peut, s’il y a lieu […] entreprendre […] une étude approfondie des situations qui révèlent de constantes et systématiques violations des droits de l’homme […] et présenter un rapport et des recommandations à ce sujet au Conseil économique et social. »

  • Les rapporteurs spéciaux sont soit désignés pour examiner la situation générale des droits de l’homme dans un pays donné, soit chargés d’étudier un aspect thématique des droits de l’homme à l’échelle internationale.
  • Les rapporteurs spéciaux sont nommés par une résolution du Conseil des droits de l’homme qui doit être confirmée par une autre résolution du Conseil économique et social de l’ONU. Leur mandat est formellement d’un an, renouvelable chaque année. Toutefois, les rapporteurs spéciaux thématiques sont nommés sur une base moyenne de trois ans, en vertu d’une pratique mise en place par l’ancienne commission.

Mission

  • Leur mission consiste à faire rapport à l’Assemblée générale et au Conseil des droits de l’homme sur la question dont ils sont saisis. Ils n’ont donc aucune fonction de protection concrète.
  • La méthode employée par les rapporteurs spéciaux consiste à recueillir toutes les informations nécessaires auprès de toutes les sources d’information disponibles, y compris les ONG. Ils peuvent également entreprendre des visites sur place. Le Conseil des droits de l’homme ou l’Assemblée générale peuvent leur demander plusieurs rapports successifs sur la même question.
  • Au fil de leur pratique, les rapporteurs spéciaux, experts indépendants et autres groupes de travail ont progressivement établi des règles pratiques que les États sont tenus de respecter afin de garantir l’indépendance, l’objectivité et l’intégrité de leur mission sur le terrain.

Ces règles sont les suivantes :

  • la liberté et la facilité de mouvement dans tout le pays, en particulier dans les zones restreintes d’accès ;
  • la liberté d’enquêter, en particulier en ce qui concerne : l’accès aux prisons, centres de détention et lieux d’interrogatoire ; contacts avec les membres du gouvernement et toutes les autorités décentralisées ; contacts avec les représentants des ONG, d’autres organisations privées et les médias ; contacts confidentiels et en l’absence de tout représentant des autorités avec des témoins et des individus, y compris les personnes privées de liberté et toute personne souhaitée par le rapporteur ; accès complet à toute information écrite relevant du mandat du rapporteur ;
  • l’assurance par le gouvernement qu’aucun représentant des autorités ou qu’aucun individu qui a été en contact avec le rapporteur ne pourra, pour cette raison, subir des menaces, des pressions, des sanctions ou des poursuites judiciaires ;
  • des garanties de sécurité accordées par le gouvernement en faveur du rapporteur, sans toutefois restreindre la liberté de mouvement et d’enquête ;
  • l’octroi des mêmes garanties et facilités au personnel des Nations unies qui assiste le rapporteur, avant, pendant et après sa visite.
  • Les informations transmises par les ONG peuvent être utilisées par le rapporteur de façon confidentielle. Il n’est pas obligé de citer la nature de ses sources. C’est une manière sûre de transmission de leurs informations pour les ONG, une fois qu’un accord a été passé avec le rapporteur spécial.
  • Les rapporteurs spéciaux présentent des rapports détaillés, parfois illustrés de cas précis, en se basant sur les informations fournies par les différentes sources, à l’Assemblée générale de l’ONU, ce qui peut libérer ces rapports d’un certain nombre de contraintes diplomatiques. Ces rapports peuvent constituer des instruments pratiques pour faire pression sur les États afin qu’ils respectent les droits de l’homme et le droit humanitaire.
  • La pertinence et l’autorité du rapport dépendent souvent de la personnalité et de la compétence du rapporteur.

Rapporteurs spéciaux, experts, représentants spéciaux par pays et par thèmes

En juin 2015, il existait 39 mandats thématiques et 14 mandats par pays :

  • Pays : Biélorussie, Cambodge, Côte-d’Ivoire, Érythrée, Haïti, Mali, Myanmar, République centrafricaine, République islamique d’Iran, République populaire de Corée, Somalie, Soudan, Syrie, Territoires palestiniens occupés depuis 1967.
  • Thèmes :
  • les moyens de bénéficier d’un environnement sûr, propre, sain et durable,
  • les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme,
  • les droits fondamentaux des personnes âgées,
  • les droits des personnes handicapées,
  • la détention arbitraire (groupe de travail),
  • la vente d’enfants, la prostitution d’enfants et la pornographie mettant en scène des enfants,
  • le droit de toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale,
  • la protection des personnes contre les disparitions forcées ou involontaires (groupe de travail),
  • le droit de réunion et d’associations pacifiques,
  • les droits culturels,
  • le droit à l’éducation,
  • le droit de toute personne de bénéficier d’un environnement sûr, propre, sain et durable,
  • les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires,
  • le droit à l’alimentation,
  • la situation des défenseurs des droits de l’homme,
  • les formes contemporaines d’esclavage,
  • le droit à un logement convenable,
  • les droits de l’homme et les libertés fondamentales des populations autochtones,
  • l’indépendance des juges et des avocats,
  • la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression,
  • la liberté de religion ou de conviction,
  • le droit des personnes déplacées dans leur propre pays,
  • l’utilisation des mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes,
  • les droits de l’homme des migrants,
  • les questions relatives aux minorités,
  • l’extrême pauvreté et les droits de l’homme,
  • les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie, et de l’intolérance qui y est associée,
  • les personnes d’ascendance africaine (groupe de travail)
  • les droits de l’homme à l’accès à l’eau potable et à l’assainissement,
  • Les droits de l’homme et la solidarité internationale,
  • les effets de la dette extérieure et des obligations financières internationales connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, particulièrement des droits économiques, sociaux et culturels,
  • la torture et les traitements cruels, inhumains et dégradants,
  • la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste,
  • les droits fondamentaux des victimes de la traite des êtres humains,
  • l’incidence sur les droits de l’homme de la gestion et de l’élimination écologiquement rationnelle des produits et déchets dangereux,
  • la question de la violence contre les femmes, y compris ses causes et ses conséquences,
  • la question de la discrimination à l’égard des femmes, dans la législation et dans la pratique,
  • la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition
  • les droits de l’homme et les sociétés transnationales et autres entreprises (groupe de travail).

Les rapporteurs spéciaux font partie des procédures spéciales dont disposent les Nations unies dans le domaine des droits de l’homme.

À côté des rapporteurs spéciaux nommés par le Conseil des droits de l’homme, le secrétaire général de l’ONU nomme également des représentants et envoyés spéciaux, mandatés par zones géographiques ou dossiers thématiques.

Une liste complète des représentants et conseillers spéciaux du secrétaire général des Nations unies est disponible à l’entrée Secrétariat général des Nations unies (SG) .

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Contact

Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme

52, rue Pâquis, 1202 Genève / Suisse.

Tél. : (00 41) 22 917 91 59.

Pour en savoir plus

Rodley Weissbodt D., « United Nations non treaty procedure for dealing with human rights violations », in Guide to International Human Rights Practice , Hurst Hannum (éd.), Transnational Publishers, 2004, p. 65-88.

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