Dictionnaire pratique du droit humanitaire

« Mal nommer les choses c’est ajouter au malheur du monde. » Albert Camus.

Agence centrale de recherches (ACR)

L’Agence centrale de recherches (ACR) est un département du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Genève, qui sert d’intermédiaire pour retrouver des personnes disparues et renouer les contacts entre des individus et leurs proches (famille, amis, etc.) qui ne peuvent plus communiquer entre eux en raison d’un conflit, de troubles et tensions internes, de catastrophe naturelle, etc.

Le droit international humanitaire consacre le principe de l’intégrité de la famille, le droit à la correspondance familiale et le droit des familles de connaître le sort de leurs membres. C’est pourquoi les Conventions de Genève organisent un système par lequel les renseignements sont collectés et transmis aux familles par l’intermédiaire d’une Agence centrale de renseignements et de bureaux nationaux de renseignements (BNR) que les parties au conflit sont tenues de créer (GI art. 16 ; GII art. 19 ; GIII art. 122 et 123 ; GIV art. 136 à 140). L’Agence centrale de renseignements a été remplacée par l’ACR du CICR. Le droit international humanitaire coutumier prescrit également qu’en situation de conflit armé, international comme non international, chaque partie au conflit doit prendre toutes les mesures pratiquement possibles pour élucider le sort des personnes portées disparues par suite d’un conflit armé, et doit transmettre aux membres de leur famille toutes les informations dont elle dispose à leur sujet (règle 117 de l’étude sur les règles du droit international humanitaire coutumier publiée en 2005 par le CICR).

En période de conflit armé international, l’ACR agit en liaison avec les BNR. En l’absence des BNR, ou titre auxiliaire, les sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge jouent un rôle important.

Dans tous les autres types de situations, l’ACR peut également proposer ses activités, en vertu du droit d’initiative du CICR et de son rôle d’intermédiaire neutre.

Dans toutes les situations, les tâches de l’ACR sont menées à bien grâce au réseau constitué par les sociétés nationales.

  • Les organisations humanitaires intervenant dans des contextes où les individus ont des difficultés à communiquer avec leurs proches (famille, amis, etc.) peuvent utilement les informer des différentes possibilités de renouer les contacts avec eux : échange de nouvelles, demande de recherches, de renseignements et de regroupement familial.
  • Pour chacune de ces demandes, il existe des formulaires types, disponibles auprès du CICR ou des sociétés nationales de la Croix-Rouge ou du Croissant-Rouge.

L’ACR mène cinq activités principales, avec l’aide des sociétés nationales :

  • L’échange de nouvelles. Elle intervient pour que l’échange de nouvelles familiales puisse être maintenu ou rétabli lorsque les moyens de communication habituels sont rendus difficiles ou interrompus par des conflits, des troubles et tensions internes, des catastrophes naturelles…

L’ACR met en place un système de courrier spécial, si et aussi longtemps qu’aucun autre moyen d’acheminer la correspondance familiale n’existe. Ce « courrier Croix-Rouge » est mis essentiellement à la disposition des familles, mais cette règle peut être assouplie dans les situations d’urgence. L’ACR a créé des formulaires types en conformité avec les Conventions de Genève :

  • le message Croix-Rouge (MCR) est le plus connu. Il mentionne l’adresse complète de l’expéditeur et du destinataire en 25 mots maximum. Il ne doit contenir que des nouvelles de caractère strictement familial ou personnel, sans mention politique, économique, militaire ou discriminatoire. Le message n’est pas confidentiel. Les autorités civiles ou militaires du pays d’expédition ou du pays de destination peuvent donc le censurer. La censure des sociétés nationales ne s’exerce que si le message contient des nouvelles autres que familiales et personnelles ;
  • le formulaire « Urgent donner nouvelles » est utilisé dans certaines situations d’urgence pour obtenir des nouvelles rapidement. Comme pour le MCR, l’adresse récente et complète du recherché doit être donnée par le demandeur. Le message de 25 mots est en revanche remplacé par la mention « Urgent donner nouvelles » ;
  • la carte « En bonne santé » est utilisée par les victimes d’événements graves pour faire savoir à leurs proches qu’elles sont en bonne santé.
  • Les renseignements. L’ACR et les sociétés nationales reçoivent, recueillent et conservent des renseignements nominatifs relatifs à une personne ou à un groupe de personnes susceptibles de faire ensuite l’objet d’une demande de nouvelles, de recherches ou de regroupement familial : détenus, prisonniers de guerre, enfants non accompagnés, malades.

Les sources de renseignements varient selon les pays. Il peut s’agir des autorités civiles, militaires, religieuses, des ONG et des agences de l’ONU, des victimes elles-mêmes ou de leurs familles. Il est important que ces différentes sources transmettent des renseignements complets et précis, conformément aux différentes rubriques du formulaire. Ceci est primordial pour une gestion efficace du fichier où les données sont regroupées.

Les renseignements peuvent arriver sous des formes multiples (lettres, fax, téléphone, mails…) mais ils doivent contenir les éléments d’information suivants :

  • renseignements sur l’identité de la personne : nom complet, sexe, date de naissance. La nationalité ou le pays d’origine, le nom de la mère, du père, de l’époux, le statut marital, la profession, etc., peuvent aussi être ajoutés si cela est pertinent ;
  • renseignements concernant l’événement : la description de l’événement (conflits, catastrophes naturelles, crise nationale ou internationale) et, si possible, ce qui est arrivé à la personne (quand elle est partie, elle a été séparée des autres, etc.) ;
  • la date et l’origine du document d’où provient l’information.

Les renseignements sont retranscrits sur une fiche individuelle standard et gérés sur le même fichier informatique que les fiches de demande, afin d’établir des concordances entre les personnes qui se cherchent. Ces renseignements sont conservés cent ans pour les personnes protégées par le droit humanitaire, ce qui représente trois générations (l’intéressé, ses enfants et ses petits-enfants). Ces informations permettent également d’établir des attestations, bien au-delà d’un conflit, pour permettre aux anciens captifs et à leur famille de faire valoir leurs droits à la retraite, aux indemnités ou aux pensions.

  • Les recherches. Les personnes inquiètes du sort de leurs proches en raison de situations d’urgence (conflit, catastrophe naturelle…) peuvent adresser une demande de recherches à la Croix-Rouge. Ces recherches sont menées par l’ACR et les sociétés nationales.

Les demandes de recherches traitées en priorité sont celles des familles, mais celles qui viennent d’amis sont également traitées quand elles sont motivées par des raisons humanitaires. S’agissant des formulaires d’identification individuels, il existe des formulaires types de demande de recherches, mais les demandes arrivent parfois sous forme de lettre. Les informations sont là aussi gérées sur le même fichier informatique que les renseignements.

Afin d’assurer la protection du recherché, lorsqu’il est localisé, il est informé qu’il fait l’objet d’une demande ; l’identité du demandeur lui est transmise et l’adresse du recherche n’est communiquée au demandeur qu’avec son accord.

  • Le regroupement familial . Une fois résolues, la plupart des demandes de nouvelles ou de recherches débouchent sur une demande de réunion de famille. Le rôle de l’ACR et des sociétés nationales consiste alors à conseiller les intéressés, à les aider à recueillir toute la documentation nécessaire et à remplir les formalités de déplacement (autorisation de départ et d’entrée).

Ce sont les intéressés eux-mêmes qui doivent indiquer où ils souhaitent se trouver réunis. Là encore, il existe des formulaires types de demande de regroupement familial. Une distinction est faite entre :

  • les réunions de famille de premier degré : le chef de famille et les membres qui dépendent directement de lui : conjoints, enfants mineurs, parents âgés ;
  • les réunions de famille de second degré : le chef de famille et les membres qui ne dépendent pas de lui car ils peuvent subvenir à leurs besoins.

Toutefois, il est possible d’élargir la notion de famille si l’environnement socioculturel en donne une définition plus large.

  • Le titre de voyage CICR. Créé en 1945, il est attribué gratuitement aux personnes déplacées, aux apatrides ou aux réfugiés qui, faute de papiers adéquats, ne peuvent pas rentrer dans leur pays d’origine ou de domicile habituel, ni se rendre dans un pays disposé à les accueillir. Il n’est délivré que sous certaines conditions (absence de passeport valable ou de tout autre document permettant le voyage, promesse de visa du pays dans lequel le demandeur désire se rendre…). Une fois le voyage accompli, le titre doit être retourné au CICR.

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Contact

Agence centrale de recherches

CICR, 19, avenue de la Paix,

CH 1202 Genève / Suisse.

Tél. : (00 41) 22 734 60 01/Fax : (0041) 22 733 20 57.

Pour en savoir plus

Bugnion F., Le Comité international de la Croix-Rouge et la protection des victimes de la guerre , CICR, Genève, 1994, p. 568-579, p. 613 et p. 635-664.

Djurovic G., L’Agence centrale de recherche du CICR , Institut Henri-Dunant, Genève, 1981.

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